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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
tous ses soins. Mais Madame Henriette mourut à vingt-quatre ans,
le 10 février 1752, et aussitôt le famille royale, qui l’aimait beau-
coup, insista pour que son portrait fût promptement livré. M. de
Yandières (Marigny) le réclamait à Coypel, au nom de Marie Lec-
zinska, par la lettre que voici :
A Versailles, le 22 février -1752.
La Reine m’a dit, Monsieur, qu’elle désiroit avoir le portrait que M. Nattier a
fait de feüe Madame jouant de la basse de viole. Ayés agréable, je vous prie, de
voir M. Nattier et de sçavoir de luy en quel état est ce portrait, s’il est flny ou non.
Au premier cas, il faut le faire porter icy incessamment; au second cas, vous
demanderés à M. Nattier de l’achever le plus promptement qu'il sera possible,
parce que la Reine veut l’avoir. Je compte que vous m’informerés de l’état où il est
et que vous me dires dans quel temps je pourrày le recevoir icy.
Vandières 1.
De tous les portraits de Madame Henriette que j’examine ici, c’est
le seul qui soit venu jusqu’à nous avec une tradition certaine. Je
n'aurais donc rien à dire de nouveau sur le tableau, si je ne devais à
M. Fernand Engerand connaissance de deux lettres inédites de
Nattier, dont la première nous fait connaître l’importance que
l’auteur attachait à cette œuvre. Il écrit en ces termes au directeur
général des bâtiments pour obtenir de Madame Adélaïde, à qui
appartient le portrait, la faveur de l’exposer au Salon du Louvre :
A Paris, ce 10 aoust 1755.
Monsieur, comme vous avés donné vos ordres pour l’exposition des tableaux au
Salon, permeltez-moi de vous faire une prière qui est d’obtenir de Madame Adélaïde
qu’elle trouve bon que le tableau de Madame Henriette y soit exposé. Comme c’est
un de mes meilleurs ouvrages, je croy qu’il me feroit honneur. D’ailleurs c’est un
tableau intéressant et qui y ligureroit très bien. Comme je ne doute nullement
qu’elle n’y consente, je vous demande en grâce d’en donner l’ordre ίι M. Portail,
adii qu’il le fasse arriver à Paris assez à tems pour y avoir une place convenable
dans la décoration du Salon. Vous obligeras sensiblement celuy qui est avec un
respect inlini, Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur,
Nattier 2.
1. Ardi, nat., 0*1907. Communication de M. Fernand Engerand.
2. Ardi, nat., 0*1934 B. Voici la réponse de Marigny :
A Compïègne, le 14 août 1755.
Madame Adélaïde, Monsieur, a acquiescé à votre demande. Elle consent que
le tableau de Madame Henriette soit exposé au Salon du Louvre, et en conséquence
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
tous ses soins. Mais Madame Henriette mourut à vingt-quatre ans,
le 10 février 1752, et aussitôt le famille royale, qui l’aimait beau-
coup, insista pour que son portrait fût promptement livré. M. de
Yandières (Marigny) le réclamait à Coypel, au nom de Marie Lec-
zinska, par la lettre que voici :
A Versailles, le 22 février -1752.
La Reine m’a dit, Monsieur, qu’elle désiroit avoir le portrait que M. Nattier a
fait de feüe Madame jouant de la basse de viole. Ayés agréable, je vous prie, de
voir M. Nattier et de sçavoir de luy en quel état est ce portrait, s’il est flny ou non.
Au premier cas, il faut le faire porter icy incessamment; au second cas, vous
demanderés à M. Nattier de l’achever le plus promptement qu'il sera possible,
parce que la Reine veut l’avoir. Je compte que vous m’informerés de l’état où il est
et que vous me dires dans quel temps je pourrày le recevoir icy.
Vandières 1.
De tous les portraits de Madame Henriette que j’examine ici, c’est
le seul qui soit venu jusqu’à nous avec une tradition certaine. Je
n'aurais donc rien à dire de nouveau sur le tableau, si je ne devais à
M. Fernand Engerand connaissance de deux lettres inédites de
Nattier, dont la première nous fait connaître l’importance que
l’auteur attachait à cette œuvre. Il écrit en ces termes au directeur
général des bâtiments pour obtenir de Madame Adélaïde, à qui
appartient le portrait, la faveur de l’exposer au Salon du Louvre :
A Paris, ce 10 aoust 1755.
Monsieur, comme vous avés donné vos ordres pour l’exposition des tableaux au
Salon, permeltez-moi de vous faire une prière qui est d’obtenir de Madame Adélaïde
qu’elle trouve bon que le tableau de Madame Henriette y soit exposé. Comme c’est
un de mes meilleurs ouvrages, je croy qu’il me feroit honneur. D’ailleurs c’est un
tableau intéressant et qui y ligureroit très bien. Comme je ne doute nullement
qu’elle n’y consente, je vous demande en grâce d’en donner l’ordre ίι M. Portail,
adii qu’il le fasse arriver à Paris assez à tems pour y avoir une place convenable
dans la décoration du Salon. Vous obligeras sensiblement celuy qui est avec un
respect inlini, Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur,
Nattier 2.
1. Ardi, nat., 0*1907. Communication de M. Fernand Engerand.
2. Ardi, nat., 0*1934 B. Voici la réponse de Marigny :
A Compïègne, le 14 août 1755.
Madame Adélaïde, Monsieur, a acquiescé à votre demande. Elle consent que
le tableau de Madame Henriette soit exposé au Salon du Louvre, et en conséquence