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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 14.1895

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Nr. 2
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Reinach, Salomon: Courrier de l'art antique, 12
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https://doi.org/10.11588/diglit.24667#0165

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150

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Clazomènes et une nombreuse série de vases découverts à Caere (Corneto). Cet
art présente des contrastes singuliers, du moins au goût des modernes, entre
la finesse exquise de l’exécution et la brutalité voulue de certaines formes.
L’esprit qui l’anime n’est ni réaliste, ni idéaliste : il conviendrait plutôt, je
crois, de l'appeler épique, en y voyant comme un reflet de ces vieilles épopées
qui ont pénétré si profondément la civilisation ionienne. C’est peut-être pour
cela que l’on s’égare, à coup sûr, lorsqu’on prononce, à l’aspeçt de ces bas-
reliefs, le nom de quelque artiste de la première Renaissance italienne.
Tentation forte et à laquelle ne résistaient guère, j’en ai fait l’épreuve, les

visiteurs de l’exposition des fouilles de
Delphes à l’École des Beaux-Arts. Mais,
après avoir lancé un nom presque au
hasard, on ne tardait pas à reconnaître,
autour de moi, que toutes les analogies
invoquées étaient superficielles, que
l’esprit“et le caractère de l’œuvre grec-
que sont quelque chose de tout à fait
particulier. Entre elle et les produits du
xve siècle italien, il y a la différence
énorme qui sépare VOdyssée et l’Iliade
des Évangiles et des Vies des Saints.
Même quand un artiste de la première
Renaissance traite un sujet profane, on
sent qu’il a été formé par l'art reli-
gieux. Une certaine gravité d'exécu-
tion, un peu de raideur hiératique
s’allient toujours, dans nos souvenirs
d'Italie, à cette suavité mystique dont
l’art du xve siècle est comme impré-
gné. 11 n’y a rien de tel dans la Grèce du vie siècle. Peints ou sculptés,
les personnages agissent, ils ne rêvent pas. La sentimentalité qu’on a cru
découvrir dans quelques-unes de ces œuvres n’est due qu’à la fantaisie
complaisante des exégètes : ce qui domine en elles, c’est un idéal de grâce
robuste, qui est celui des héros d’Homère, aussi éloigné que possible du
christianisme médiéval auquel se rattache le sentiment religieux du
xve siècle. Ainsi, qu’on ne vienne plus nous parler, à propos des bas-reliefs
découvertsà Delphes, de Ghiberti, de Donatello, encore moins de Lucca della
Robbia ou — pis encore — de Botticelli. Si l’art est vraiment l’expression d’une
civilisation, ce que confirment tous les jours l'érudition et l’observation
personnelle, il faut étudier chaque monument en relation avec le temps qui
Ta produit et se garder de chercher des ressemblances là où la mise en lumière
des divergences est seule instructive. J’insiste sur ce point, parce que tous
ceux qui s’occupent d’art antique sont un peu séduits par des comparaisons

TÈTE A T TIQUE DU V» SIÈCLE AV. J.-C.

(Collection Humphry Ward.)
 
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