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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 23.1900

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Nr. 2
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Saunier, Charles: Les conquêtes artistiques de la Révolution et de l'Empire et les reprises des Alliés en 1815, 7
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https://doi.org/10.11588/diglit.24720#0173

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160

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Je vous soumets ces observations, Monsieur le Comte, et vous prie de prendre en
considération une affaire et un objet de cette importance.

Agréez, etc.

Denon.

Ce jourd’hui, 30 septembre, le secrétaire du Musée a été appelé chez le directeur pour
lui rendre compte de ce qui s’est passé hier au Musée, relativement aux enlèvements de
tableaux que M. Louis Costa, commissaire de Turin, faisait faire. M. le Directeur n’ayant
point trouvé les pouvoirs de ce commissaire suffisants, il l’a chargé de faire suspendre la
sortie de ces tableaux, jusqu’à ce qu’il eût reçu des ordres du gouvernement à ce sujet.

De retour au Musée, le secrétaire ayant prévenu M. Costa qu’il était nécessaire de
suspendre momentanément l’enlèvement jusqu’à ce qu’il eût donné la traduction en
français de l’ordre du gouverneur Mufïling qu’il venait d’exhiber, ce commissaire s’est
retiré, disant qu'il allait le faire traduire; mais une demi-heure après, il est revenu avec
l'aide-de-camp du gouverneur, le même qui, précédemment, avait arrêté le Directeur au
bureau de la direction. Cet officier a fait demander sur-le-champ et avec emportement
M. Lavallée. 11 était alors occupé avec le commissaire de la cour d’Autriche à remettre
des bronzes qui proviennent des États de Parme.

Arrivé au bureau, cet aide-de-camp l'a interpellé pour lui demander de quel droit il
avait suspendu l’enlèvement des tableaux du roi de Sardaigne. Le secrétaire lui a déclaré
qu'il avait des ordres de suspendre momentanément, et sur la demande impérieuse qui
lui fut faite de nommer les personnes qui les avaient donnés, il répondit : « Vous me
permettrez de garder le secret. » Alors M. l'aide-de-camp a dit qu’il allait faire enfoncer
les portes et monter une compagnie de Prussiens chais le Musée.

Sans faire attention à ses menaces, le secrétaire a dit à un gardien d'aller ouvrir et
l'aide-de-camp est sorti avec le commissaire Costa, pour faire enlever les cinq tableaux
qui restaient dans le grand vestibule du Musée. Un instant après, il est revenu, a réitéré
ses menaces en disant qu’à la première infraction il ferait arrêter et conduire toute
Vadministration à la grande garde, ajoutant quelle méritait d'être traitée durement.

Sur les cinq heures du soir, le commissaire Costa étant prêt à faire sortir des tableaux
qu'il avait fait descendre de la grande galerie, le secrétaire du Musée, s’est présenté pour
en prendre note. Ayant aperçu dans le nombre de ces tableaux, deux tableaux d'anciens
maîtres, achetés par le Musée et le Martyre de saint Étienne, par Jules Uomain, donné
parla ville de Gênes au gouvernement français, il s’est vivement opposé à leur sortie du
Musée. Tout ce qu’il a pu dire n’a pu déterminer le commissaire, qui s’est trouvé appuyé
de deux officiers prussiens, qui l’ont engagé à exécuter les ordres qu'il avait reçus de les
enlever. Ce n’est qu’après les plus vives instances que le commissaire a consenti à
laisser au Musée jusqu’à demain les deux tableaux d’anciens maîtres dont il est ci-dessus
parlé.

Ainsi un tableau donné volontairement à une puissance, comme hommage, vient
d’être enlevé avec la plus extrême violence du Musée Royal.

Certifié sincère et véritable le présent procès-verbal.

Paris, les jours et an que ci-dessus.

Lavallée.

Au reçu de ce rapport, le comte de Pradel se décida à protester. Il envoie
cette lettre au baron deMuffling:

Monsieur le Baron,

Paris, le 2 octobre 1815.

J’ai l'honneur de vous faire savoir qu’un officier prussien vient de se présenter au
Musée du Roi, avec des brancards, pour enlever les objets d’art provenant des États
d’Italie. Il n’était muni d’aucun ordre supérieur et agissait sans la participation du
poste autrichien qui est placé à la porte du Musée. Dans cet état de choses, il était
impossible que la responsabilité des administrateurs et gardiens fût à couvert, et ils ont
dû se refuser à la demande qui leur était faite.

Je vous prie, Monsieur le Baron, de prendre des informations à ce sujet et de vouloir
 
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