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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
apercevoir, élève un monument de passion brûlante et touchante
à la fois U
L’intrigue se noue vers la fin de l’an ix, à l’aube du xixe siècle.
Mm? Amélie Lefort est une jeune veuve de vingt-huit ans, quand
Claude lloin la rencontre à l’Athénée des Arts et chez les Gois. Elle
est ia fille d'un employé supérieur de banque. Son père, qui possède
une certaine fortune, désire la remarier, mais rêve pour elle un
établissement moins précaire ; aussi l’artiste est-il éconduit poli-
ment. Il peut saluer son amie à la promenade, au théâtre, dans les
concerts, mais la prudence et les convenances leur imposent à tous
deux une grande réserve, d’autant qu’une tante acariâtre, baptisée
par eux de « fée grognon » et de « sainte l’engrimacée » fait bonne
garde.
Hoin est réduit à couvrir de baisers, dans l'intervalle de ses trop
rares visites, le portrait qu’il a fait de la femme adorée. Quand il
passe sur le Pont-Neuf, en revenant de donner au faubourg Saint-
Germain sa leçon de miniature à Mme de Saint-Clou ou de pastel à
Mmc de Fontanges, ou bien encore de faire sa cour au prince de
Bouillon, il cherche à voir, ne serait-ce qu’un instant, à sa fenêtre
donnant sur le quai, la silhouette de sa bien-aimée.
La sensible Amélie, tout occupée de travaux de broderie
sur étoffes pour de grands tapissiers décorateurs, dérobe quelques
instants à sa famille et à ses occupations, afin d’apporter un peu
de bonheur dans le petit atelier de la rue de la Jussienne. L'artiste,
pour se consoler, lui conte en détail tout ce qu’il fait, le portrait
qu’il commence, l’aquarelle qu'il laisse sécher, la visite d’une jolie
voisine, scs leçons aux jeunes femmes du monde, ses promenades
avec Colson, ses visites au Muséum ou dans les expositions de pein-
ture, ses parties de reversi chez les Gois avec « son objet », c’est-à-
dire avec Mme Lortin, demeurée son amie et dont le surnom n’est
plus pour eux qu’une innocente plaisanterie ; iJ narre ses tentatives
pour rencontrer Radet, afin d’avoir des billets d’auteur pour le
Vaudeville, cherche enfin à lui donner, par ces minutieux détails,
l’illusion de la vie en commun.
Cependant le temps passe sans amener de solution. Le père,
M. Thuaut, semble indifférent au désir de sa fille. Iloin sent qu’il
ne l’obtiendra qu’en pouvant lui offrir au moins un logement plus
convenable, au Louvre par exemple, au lieu de l’atelier de garçon
Nous donnons de nombreux extraits de ce Journal dans le tirage à part
de cette étude.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
apercevoir, élève un monument de passion brûlante et touchante
à la fois U
L’intrigue se noue vers la fin de l’an ix, à l’aube du xixe siècle.
Mm? Amélie Lefort est une jeune veuve de vingt-huit ans, quand
Claude lloin la rencontre à l’Athénée des Arts et chez les Gois. Elle
est ia fille d'un employé supérieur de banque. Son père, qui possède
une certaine fortune, désire la remarier, mais rêve pour elle un
établissement moins précaire ; aussi l’artiste est-il éconduit poli-
ment. Il peut saluer son amie à la promenade, au théâtre, dans les
concerts, mais la prudence et les convenances leur imposent à tous
deux une grande réserve, d’autant qu’une tante acariâtre, baptisée
par eux de « fée grognon » et de « sainte l’engrimacée » fait bonne
garde.
Hoin est réduit à couvrir de baisers, dans l'intervalle de ses trop
rares visites, le portrait qu’il a fait de la femme adorée. Quand il
passe sur le Pont-Neuf, en revenant de donner au faubourg Saint-
Germain sa leçon de miniature à Mme de Saint-Clou ou de pastel à
Mmc de Fontanges, ou bien encore de faire sa cour au prince de
Bouillon, il cherche à voir, ne serait-ce qu’un instant, à sa fenêtre
donnant sur le quai, la silhouette de sa bien-aimée.
La sensible Amélie, tout occupée de travaux de broderie
sur étoffes pour de grands tapissiers décorateurs, dérobe quelques
instants à sa famille et à ses occupations, afin d’apporter un peu
de bonheur dans le petit atelier de la rue de la Jussienne. L'artiste,
pour se consoler, lui conte en détail tout ce qu’il fait, le portrait
qu’il commence, l’aquarelle qu'il laisse sécher, la visite d’une jolie
voisine, scs leçons aux jeunes femmes du monde, ses promenades
avec Colson, ses visites au Muséum ou dans les expositions de pein-
ture, ses parties de reversi chez les Gois avec « son objet », c’est-à-
dire avec Mme Lortin, demeurée son amie et dont le surnom n’est
plus pour eux qu’une innocente plaisanterie ; iJ narre ses tentatives
pour rencontrer Radet, afin d’avoir des billets d’auteur pour le
Vaudeville, cherche enfin à lui donner, par ces minutieux détails,
l’illusion de la vie en commun.
Cependant le temps passe sans amener de solution. Le père,
M. Thuaut, semble indifférent au désir de sa fille. Iloin sent qu’il
ne l’obtiendra qu’en pouvant lui offrir au moins un logement plus
convenable, au Louvre par exemple, au lieu de l’atelier de garçon
Nous donnons de nombreux extraits de ce Journal dans le tirage à part
de cette étude.