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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 23.1900

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Nr. 5
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Rais, Jules: Le salon de 1900, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24720#0380

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362

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

III

La statuaire, dès lors, s’abandonne. Nul qui la sollicite d’enno-
blir nos demeures par des inspirations plus intimes. Combien de
bâtisseurs ont souci d’accorder ses reliefs avec les saillies des
ordres, ses mouvements avec le rythme immobile des colonnades?
Où voit-on qu’un dessinateur de parcs ose rêver un poème aux
stances d’ombre, d’eaux et de marbres? De là tant de morceaux
épars, fragments prétentieux d’une œuvre qui ne sera jamais
conçue, ou qu’on dirait arrachés à des monuments énigmatiques,
et plus morts que des ruines, n’ayant jamais vécu : symboles décou-
pés, peuplés d’attitudes, vidés de pensée (Charité), niaiseries héroï-
ques ( Vers l’Infini), romances monumentales orchestrées par Zanetto
(.Militza) ! Ou le prétexte semble insuffisant à renverser des chairs
colossales (H y menée), ou bien c’est un joli thème menu qu’on
prétend rénover à grand renfort de plâtre (L’Ame des ruines), on
telle délicatesse de profil dont Burne-Jones se fût étonné qu’on
décuplât la ligne (L’Ange de la Mort). Faut-il condamner l’artiste
qui cède à ces glorieuses ambitions? Un haut-relief de Mme Dumontet
[Le Vaincu) plaide éloquemment la cause de tels efforts. Faut-il
déplorer que si l’architecte, d’aventure, propose au sculpteur une
Frise du travail, M. Guillot s’arrête au pittoresque du particulier,
sans se hausser jusqu’à la synthèse? Mais quelle singulière collabo-
ration ici associe l'artiste épris de réalité au décorateur d’une porte
d’Exposition lourde et bariolée, unit les mains et oppose les pen-
sées ! Le trophée de M. Mac-Monniès pour l’arc-de-triomphe de
Brooklyn : L'Armée, avec sa divergence de mouvements contrariés,
et le trou de lumière qui le vide au centre, ne nous rappellera-t-il
pas le long recommencement nécessaire des mêmes tâches, par où
le geste peu à peu se détache, la silhouette se libère, l’attitude atteint
l’expression, et qu’un bloc de Rude exilé dans l’arc de l’Etoile, un
sourire aigu de Carpeaux dans la pierre de l’Opéra, les bronzes
épars de Constantin Meunier, les frénésies arrachées à la Porte de
l'Enfer par Rodin, cette Porte elle-même, comme le mausolée de
Bartholomé, ne sont peut-être que des prémisses ?

Ainsi rien ne nous paraîtra perdu dans l’effort le plus dispro-
portionné ; aucun labeur qui n’achemine l’art vers une vérité ;
aucune misère qui ne l’enrichisse. Les plus frustes figurines des
musées, comme les plus molles, en témoignent. On ne s’étonnera
ni des Biblis sans mystère, ni des Maternités sans amour. Il
 
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