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MONUMENTS DE L'ART ANTIQUE.

Les statuettes que reproduit notre planche sont de provenance douteuse.
Toutefois, à certains indices, et d'après de vagues renseignements, on peut croire
qu'elles sont de la fabrique de Pergame; la terre est très dure, très cuite, et les
couleurs ont dû passer au feu. Les chairs offrent une coloration rosée, et les acces-
soires portent des traces de peinture très visibles. Dans la première figurine, on
reconnaît, semble-t-il, un erreur public\ Complètement nu, le haut des bras orné
d'anneaux, il tient à la main une bourse bleue; le corps est rejeté en arrière, la tête
renversée : il crie à pleins poumons. 'Fait-il une proclamation, ou bien, comme
Vultéius Ménas, son confrère de Rome dont parle Horace, est-il en train de «vendre
au petit peuple des objets de rebut » :

Vilia vendentem tunicato scruta popello1 ?

Le crâne, singulièrement conformé, fait la pointe au-dessus du front et se déve-
loppe en arrière d'une façon exagérée; la poitrine est étroite et creuse, tandis que
les muscles de l'abdomen sont tendus par l'effort et font saillie au-dessus de
l'aine ; les organes sexuels sont déformés, et les jambes d'une maigreur excessive.
On ne saurait retrouver dans cette figurine l'exécution poussée et le fini du travail
qui conviennent à des sujets plus sérieux; c'est une esquisse lestement enlevée. Elle
rappelle les croquis qu'un peintre jette sur son carnet, quand il a été frappé par
un type original ; il accentue certains traits, souligne un détail comique et donne
son relief à la physionomie, au risque de l'exagérer. Ici, les difformités caractéris-
tiques sont franchement accusées, mais d'une main légère; l'artiste a évité l'excès
qui ferait d'une ébauche spirituelle une lourde charge. Ainsi, malgré sa laideur
vulgaire, la tête a une expression fort vivante, et en dépit de la maigreur voulue du
corps, l'attitude est rendue avec une rare justesse d'observation.

Les deux autres figurines se recommandent par les mêmes qualités. La suivante
représente sans doute un bateleur3. La tête couronnée de fleurs, la bouche entrou-
verte, les bras étendus, il semble débiter son boniment au public et se prépare à
exécuter un de ces tours que décrit le rhéteur Alciphron. « Un homme s'est avancé
vers l'assemblée avec une table en forme de trépied ; il y posa trois coupes ren-
versées, sous lesquelles il cacha de petits cailloux blancs et arrondis comme il en
existe au bord des torrents. Tantôt il les faisait passer d'une coupe à l'autre, tantôt
il les montrait tous sous une seule; puis ils disparaissaient d'eux-mêmes, j'ignore
comment, pour se retrouver dans sa bouche4. » On peut facilement, par la pensée,
replacer notre personnage au milieu d'un cercle de spectateurs attentifs; c'est là

1. Catalogue 0. Ray et, n° 115.

2. Epîcres, 1. I, vu, p. 65.

3. Catalogue 0. Rayet, n» 117.

4. Alciphron : Lettres grecques^ III, xx. Lettre de Napée à Créniade.
 
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