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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 8.1882 (Teil 2)

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Chesneau, Ernest: A. L. C. Pagnest: 1790 - 1819
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https://doi.org/10.11588/diglit.19459#0013

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4 L'ART.

Nanteuil ont été exécutés. Cette préparation lui prenait habituellement deux heures et, sa palette
prête, nerveux, un rayon de soleil, un nuage passant, il renonçait. Plus tard, à partir de 1817,
Pagnest avait abandonné cette pratique qui d'ailleurs lui avait beaucoup appris et ne peignait
plus qu'au bout de la brosse, c'est-à-dire avec un mélange immédiat des couleurs mêmes. Sa
palette faite ainsi d'après nature, il couvrait la toile sans tâtonnements, par touches décisives
qui exprimaient les plans multipliés dont s'enveloppe la saillie de la face humaine. Jamais, une
fois posée, une touche n'était remuée. Était-il mécontent du résultat obtenu, il grattait et
recommençait, à moins que la pâte ne fût suffisamment sèche et qu'il pût sans fatiguer le ton
la recouvrir de touches nouvelles, toujours fraîches, pures, vierges, non point mélangées, ni
superposées, mais nettement juxtaposées par plans successifs jusqu'au ternie de l'ouvrage.
A cette façon de procéder la peinture de Pagnest doit son grand caractère de franchise magistrale
et l'apparence d'une exécution facile, prompte, de premier jet. La première de ces qualités est
parfaitement réelle et positive ; la seconde, comme on va le voir, n'est en effet qu'apparente.

J'ai dit que Pagnest était le fils d'un ouvrier de l'administration des Messageries. Le direc-
teur de cette compagnie était en 1817 M. le chevalier de Nanteuil-Lanorville (créé baron un peu
plus tard). Celui-ci ayant plusieurs enfants et songeant à faire peindre son portrait consulta un de
ses amis, M. Boutard, attaché à l'administration des Beaux-Arts et auteur d'un Dictionnaire des
artistes. Le chevalier hésitait entre Gérard et Girodet. Boutard coupa court à ses hésitations en
lui disant : « Mais vous avez auprès de vous un jeune homme du plus grand talent. Adressez-
vous donc à lui. J'en réponds ». M. de Nanteuil suivit ce sage conseil et installa Pagnest au
château de Rosny. Telle est l'origine du chef-d'œuvre de l'artiste.

En ce portrait M. de Nanteuil est un vigoureux vieillard de soixante ans. Nous le voyons
presque de face, la tête nue, légèrement inclinée, parée de cheveux longs et soyeux, non point
poudrés comme le disent MM. Charles Blanc et Villot, mais dont la couleur blanche oppose un
contraste piquant à la couleur noire des sourcils épais, saillants, abritant le regard brun, vif et
fin. Le front est vaste, le nez d'une belle courbe aquiline, la bouche vivante, d'un grand et ferme
dessin, le visage d'un ton chaud où s'accusent aux joues et au menton les tons froids de la barbe
soigneusement rasée. Vêtu d'une redingote verte où le ruban de la Légion d'honneur pique une
jolie note rouge, d'un gilet jaune nankin, cravaté de blanc, portant la culotte collante gris clair
d'Elleviou et les bottes à la Souvarow à glands retombants, les jambes croisées, il est tourné à
droite, assis clans un fauteuil de bureau en acajou, de forme très simple, aux bras arrondis en
volute, recouvert d'un cuir rouge fixé tout autour par une rangée de clous ronds, unis, bombés
et dorés. Sur une table placée devant lui sont posés près de sa main gauche des papiers, des
livres, un volume broché d'une Histoire de France, un tome relié de XAlmanach royal pour 18..
(les deux derniers chiffres sont illisibles), et un foulard d'une teinte indécise entre les couleurs
marron et lie de vin. La main droite est appuyée sur l'un des bras du fauteuil. Le fond du
tableau est gris. Le portrait est signé en toutes lettres et daté : Pagnest iâiy, s'il faut en croire
le livret du Louvre, mais d'une minutieuse recherche faite au moyen du tampon humide, il ressort
que de la signature, en partie engagée sous la feuillure du cadre, il ne subsiste plus que les lettres
P et G tracées en noir dans l'ombre, derrière le fauteuil. Le reste a été dévoré par le bitume du
fond.

On me pardonnera d'avoir donné une si minutieuse description de ce portrait si l'on veut
bien se rappeler que pendant longtemps il a passé pour l'œuvre unique de l'artiste, et quand
j'aurai dit qu'il n'est pas en ce chef-d'œuvre un détail de forme et de couleur que Pagnest n'ait
longuement médité. Le torse de l'École et les autres morceaux de concours ont été exécutés dans
le petit nombre de jours prescrit par les règlements, cela prouve que Pagnest pouvait quand il
le voulait achever une excellente peinture aussi rapidement que ses camarades d'atelier. Mais ce
résultat que chacun admirait était loin de le satisfaire. Il avait conçu un tel idéal de perfection

n'ont qu'une médiocre valeur commerciale, on n'avait donc aucun intérêt à lui attribuer cette peinture d'académie. D'autre part, il y a
tout lieu de penser que la toile provient de l'une des deux ventes après décès de Coupin de la Couperie ou de E. J. Delécluze, l'ancien
critique des Débats, qui moururent tous deux à Versailles, l'un en i»5i, le second en 1863.
 
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