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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 12.1886 (Teil 1)

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Lafond, Paul: Histoire de Saint Jean-Baptiste au Château de Pau: suite de tapisseries de la fin du XVe siècle
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https://doi.org/10.11588/diglit.19705#0149

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HISTOIRE DE SAINT JEAN-BAPTISTE AU CHATEAU DE PAU. 125

Eyck ou de Memling. Mais, parmi ceux-ci, il faut d'abord écarter Roger Van der Weyden, par
la raison que ce maître, ayant exécuté les cartons de la suite de l'histoire de saint Jean-Baptiste
de Madrid, dont nous allons dire deux mots tout à l'heure, n'aurait pu dessiner les mômes sujets
une seconde fois sans y laisser échapper quelques réminiscences des premiers. Peut-être pour-
rions-nous donner la paternité de nos tentures à Bouts ou à Gérard David, mais, là encore, tout
n'est qu'incertitude, et nous restons réduits à des conjectures. Nous considérons ces pièces
comme un des plus beaux spécimens de l'art du tissage au xvc siècle, qui est, pour nous, le grand
siècle de la tapisserie. Elle atteignit alors un degré de perfection auquel elle n'était pas arrivée
antérieurement et qu'elle n'a jamais dépassé depuis. Ce fut son apogée et, quoi qu'on puisse
dire, dès le xvie siècle commença la décadence.

Malgré les défauts que l'on rencontre dans les œuvres du xvc siècle, et qui sautent aux yeux
de tous, jamais la naïveté du dessin, l'amour de la nature ne fut plus grand que chez les maîtres
naturalistes de ce temps. Les artistes qui suivirent montrèrent une science plus grande, un art
de composition plus consommé, une compréhension plus absolue de la beauté, une entente plus
complète de la perspective; les teinturiers trouvèrent des nuances inconnues alors, des couleurs
dont on ne s'était pas encore servi, mais, malgré tout, les tentures des siècles suivants n'atteignirent
jamais au charme pénétrant de celles du xv° siècle.

Du xiv1' au milieu du xve siècle, le centre de la production de la tapisserie fut Arras ; mais
la prise de la ville par Louis XI et ensuite, en 1479, l'expulsion de ses habitants portèrent à son
commerce et à son industrie un coup fatal dont elle ne parvint pas à se relever.

Bruges, malgré le séjour qu'y firent les Van Eyck, les Memling et les Roger Van der
Weyden, fut plutôt un entrepôt qu'un centre de fabrication, et quoique cette cité renfermât de
magnifiques spécimens de tapisseries, comme le signale M. Wauters dans son travail sur les
tapisseries bruxelloises, on ne trouve que fort peu de fabricants qui y aient été établis.

Pour Lille, quoique nous sachions que des ateliers y existassent dès la fin du xive siècle,
ces ateliers ne se développèrent que beaucoup plus tard, à la fin du xvic.

Audenarde fut, il est vrai, un centre très important de production, mais, à part quelques
exceptions, il semble s'être tout particulièrement attaché à la reproduction des scènes champêtres,
des paysages, des verdures, et n'est arrivé à son apogée de fabrication qu'aux xvie et xvne siècles.

Du xvc au xvie siècle, Tournay produisit de splendides tentures ; les fastueux ducs de Bour-
gogne, auprès desquels les pauvres rois de France faisaient alors fort triste figure, y firent
exécuter des ouvrages de toute beauté, mais l'importance de ces productions le cédait cependant
à celle de Bruxelles. Le nombre des métiers était encore plus considérable dans cette dernière
ville et la qualité de ses productions égalait au moins celles de sa rivale.

Nous inclinons donc à attribuer à la fabrication bruxelloise nos tapisseries de l'histoire de
saint Jean-Baptiste, toutes les probabilités nous semblant réunies de ce côté.

Maintenant pour qui ont-elles été tissées? Sans pouvoir rien affirmer, tout nous porte à croire
qu'elles ont été commandées par Louis XI ou Charles VIII ou peut-être même par Louis XII,
quoique les costumes des personnages soient plutôt ceux des règnes des deux premiers de ces
rois. A ce moment, la puissante maison de Bourgogne venait de s'écrouler et les rois de France
avaient hérité de sa suprématie. Autre raison plus concluante, et qui nous semble presque sans
réplique, dans la troisième tenture, le manteau que porte le Christ, le personnage le plus auguste
de tous ceux qui sont représentés, est semé de fleurs de lis.

Avant de finir, faisons remarquer que cette suite est absolument différente de celle que l'on
peut voir à Madrid, de la même époque, également d'origine flamande, et qui est connue de
tous ceux qui s'intéressent à l'art de la tapisserie. Le seul rapport que ces deux suites présentent
l'une avec l'autre est d'avoir toutes deux l'histoire de saint Jean-Baptiste pour sujet. D'ailleurs,
on peut voir combien elles sont différentes dans la collection même de notre revue, la deuxième
et la quatrième pièce de l'histoire de saint Jean-Baptiste de Madrid ayant été reproduites dans
l'Art (1876, tome IV, pages 178 et 183).

Paul Lafond.

Tome XL. 18
 
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