VILLES ANCIENNES D'ESPAGNE. 25
d'une main défaillante, n'étant dominés ni par le fanatisme, ni par
la haine, les Goths respectèrent les créations du peuple qu'ils avaient
vaincu; les villes sont demeurées telles, à peu près, qu'ils les avaient
trouvées; les monuments, restés debout, servirent aux mêmes usages et
les autels au même culte , malgré quelques différences qu'introduisit
l'arianisme.
Ces hommes du Nord, ces Goths, pénétrés du génie providentiel de la
conservation, s'abstenaient de fonder. On ne désigne que deux ou trois
villes construites, agrandies ou rebâties par eux, entre lesquelles Ori-
huela, qu'ils appelaient Orlis, et Tolède, dont Wamba fit presque une
cité nouvelle. Les imposantes murailles élevées par lui existent presque
intactes, défiant les siècles, les orages de la politique, méprisant la né-
gligence que les modernes ont apportée dans leur entretien, et parlant
de la puissance des Goths, comme si derrière elles leur maîtres se dres-
saient encore.
L'invasion des Arabes, au huitième siècle, fut un grand malheur pour
la Péninsule; elle changea complètement le régime pacifique des villes.
Bien différents des Goths, les Arabes étaient animés par le fanatisme et
par un esprit de domination exclusive. Ils faisaient aux idées religieuses
des populations dissidentes une guerre impitoyable sous laquelle suc-
combaient les monuments eux-mêmes. Dans les premières années d'in-
vasion, n'ayant ni la patience, ni peut-être le génie d'ériger des édifices
spéciaux, ils transformaient les édifices anciens, ou leur prenaient toute
la partie ornementale dont ils décoraient leurs propres constructions;
ils brisaient les bas-reliefs, les statues, ne réservant que les colonnes,
pour fonder avec elles des mosquées rectangulaires, plus remarquables
de splendeur que d'harmonie.
Ainsi disparurent, sous les coups de l'islamisme, les cités grecques,
les cités celtibériennes et les cités romaines. Il n'en resta presque rien,
parce que les croyances, les habitudes, les mœurs des conquérants
arabes n'ayant aucun rapport avec la vie intime des peuples vain-
cus, l'expression matérielle de la société envahissante se subtituait à
l'autre.
L'Alcazar de Ségovie, s'élevant comme la proue d'un navire au-
dessus des eaux qui baignent sa base, groupe majestueux de toits coni-
4
d'une main défaillante, n'étant dominés ni par le fanatisme, ni par
la haine, les Goths respectèrent les créations du peuple qu'ils avaient
vaincu; les villes sont demeurées telles, à peu près, qu'ils les avaient
trouvées; les monuments, restés debout, servirent aux mêmes usages et
les autels au même culte , malgré quelques différences qu'introduisit
l'arianisme.
Ces hommes du Nord, ces Goths, pénétrés du génie providentiel de la
conservation, s'abstenaient de fonder. On ne désigne que deux ou trois
villes construites, agrandies ou rebâties par eux, entre lesquelles Ori-
huela, qu'ils appelaient Orlis, et Tolède, dont Wamba fit presque une
cité nouvelle. Les imposantes murailles élevées par lui existent presque
intactes, défiant les siècles, les orages de la politique, méprisant la né-
gligence que les modernes ont apportée dans leur entretien, et parlant
de la puissance des Goths, comme si derrière elles leur maîtres se dres-
saient encore.
L'invasion des Arabes, au huitième siècle, fut un grand malheur pour
la Péninsule; elle changea complètement le régime pacifique des villes.
Bien différents des Goths, les Arabes étaient animés par le fanatisme et
par un esprit de domination exclusive. Ils faisaient aux idées religieuses
des populations dissidentes une guerre impitoyable sous laquelle suc-
combaient les monuments eux-mêmes. Dans les premières années d'in-
vasion, n'ayant ni la patience, ni peut-être le génie d'ériger des édifices
spéciaux, ils transformaient les édifices anciens, ou leur prenaient toute
la partie ornementale dont ils décoraient leurs propres constructions;
ils brisaient les bas-reliefs, les statues, ne réservant que les colonnes,
pour fonder avec elles des mosquées rectangulaires, plus remarquables
de splendeur que d'harmonie.
Ainsi disparurent, sous les coups de l'islamisme, les cités grecques,
les cités celtibériennes et les cités romaines. Il n'en resta presque rien,
parce que les croyances, les habitudes, les mœurs des conquérants
arabes n'ayant aucun rapport avec la vie intime des peuples vain-
cus, l'expression matérielle de la société envahissante se subtituait à
l'autre.
L'Alcazar de Ségovie, s'élevant comme la proue d'un navire au-
dessus des eaux qui baignent sa base, groupe majestueux de toits coni-
4