LITTÉRATURE.
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toiture; condition dispendieuse néanmoins, puisqu'il ne peut la rem-
plir : on jouait de jour, afin d'économiser la lumière, et l'on tirait sur
les spectateurs une toile qui les garantissait des rayons solaires. Cet
état de choses, si mesquin, si peu conforme aux splendeurs dramatiques
qu'aimaient les Espagnols, cessa bientôt. Dès l'année 1479, les comé-
diens devenus riches, soutenus d'ailleurs par de somptueux seigneurs,
élevèrent à leurs frais, dans la rue de la Cruz, le théâtre qui porte ce
nom. En trois mois il fut bàti, et l'art dramatique se développa d'une
manière rapide. Bientôt chaque ville principale eut son théâtre. Vers
1737, on reconstruisit le théâtre de la Cruz d'après un plan conforme aux
exigences scéniques modernes, et presque toutes les salles du royaume
furent successivement refaites, agrandies et modifiées. L'invasion fran-
çaise ne leur devint pas moins fatale qu'à l'art lui-même : à Madrid, les
théâtres du Retiro et de los Carros furent détruits, et, pendant trente
années, on vit languir presque tous les établissements de ce genre. Ils
prennent leur revanche aujourd'hui, grâce aux progrès des acteurs et
aux dépenses faites par les administrations bienfaisantes; car, du
royaume, les théâtres sont la propriété des hospices, qui les louent,
les exploitent, et font servir ainsi les dépenses des riches au soulage-
ment des pauvres.
Excepté le théâtre del Oriente à Madrid et le nouveau théâtre de
Barcelone, l'apparence extérieure des monuments dramatiques du
royaume n'indique pas du tout leur destination. 11 s'en faut bien aussi
que les salles soient décorées comme les salles françaises : leurs orne-
ments nous ont paru lourds; mais la disposition générale des places
semble assez convenable. Je ne sache pas qu'il existe des foyers chez nos
voisins.
Après l'Oriente, théâtre central où se jouent les opéras italiens pen-
dant six mois d'hiver, les théâtres principaux de Madrid sont ceux de
la Cruz, del Circo et del Principe. A la Cruz, on donne des opéras ita-
liens; au théâtre del Circo, des opéras indigènes; au théâtre del Prin-
cipe, des pièces nationales, accompagnées, suivies de boléros, de fan-
dangos, de jotas aragonesas, danses plus remarquables par l'entrain
général des acteurs que par la grâce qu'ils y déploient.
Nous avons rencontré en Espagne, parmi les artistes dramatiques, des
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toiture; condition dispendieuse néanmoins, puisqu'il ne peut la rem-
plir : on jouait de jour, afin d'économiser la lumière, et l'on tirait sur
les spectateurs une toile qui les garantissait des rayons solaires. Cet
état de choses, si mesquin, si peu conforme aux splendeurs dramatiques
qu'aimaient les Espagnols, cessa bientôt. Dès l'année 1479, les comé-
diens devenus riches, soutenus d'ailleurs par de somptueux seigneurs,
élevèrent à leurs frais, dans la rue de la Cruz, le théâtre qui porte ce
nom. En trois mois il fut bàti, et l'art dramatique se développa d'une
manière rapide. Bientôt chaque ville principale eut son théâtre. Vers
1737, on reconstruisit le théâtre de la Cruz d'après un plan conforme aux
exigences scéniques modernes, et presque toutes les salles du royaume
furent successivement refaites, agrandies et modifiées. L'invasion fran-
çaise ne leur devint pas moins fatale qu'à l'art lui-même : à Madrid, les
théâtres du Retiro et de los Carros furent détruits, et, pendant trente
années, on vit languir presque tous les établissements de ce genre. Ils
prennent leur revanche aujourd'hui, grâce aux progrès des acteurs et
aux dépenses faites par les administrations bienfaisantes; car, du
royaume, les théâtres sont la propriété des hospices, qui les louent,
les exploitent, et font servir ainsi les dépenses des riches au soulage-
ment des pauvres.
Excepté le théâtre del Oriente à Madrid et le nouveau théâtre de
Barcelone, l'apparence extérieure des monuments dramatiques du
royaume n'indique pas du tout leur destination. 11 s'en faut bien aussi
que les salles soient décorées comme les salles françaises : leurs orne-
ments nous ont paru lourds; mais la disposition générale des places
semble assez convenable. Je ne sache pas qu'il existe des foyers chez nos
voisins.
Après l'Oriente, théâtre central où se jouent les opéras italiens pen-
dant six mois d'hiver, les théâtres principaux de Madrid sont ceux de
la Cruz, del Circo et del Principe. A la Cruz, on donne des opéras ita-
liens; au théâtre del Circo, des opéras indigènes; au théâtre del Prin-
cipe, des pièces nationales, accompagnées, suivies de boléros, de fan-
dangos, de jotas aragonesas, danses plus remarquables par l'entrain
général des acteurs que par la grâce qu'ils y déploient.
Nous avons rencontré en Espagne, parmi les artistes dramatiques, des