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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0644

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534 LETTRE A LA SOEUR MATHILDE.
Cette intelligence, cette foi des légendes, cette poésie de l'àme qu'un
artiste, qu'un écrivain devraient toujours sentir, avant de composer
des sujets pieux, nous les avons cherchées vainement parmi les sculp-
teurs, les peintres et les graveurs modernes de l'Espagne. Aucun d'eux
ne rendrait la tradition légendaire comme le faisaient les artistes des
treizième et quatorzième siècles. Leurs tendances les rapprocheraient
plutôt du genre historique et du portrait; mais il faudrait, pour ne point
laisser épuiser ni la verve, ni le sentiment qu'ils recèlent en eux-mê-
mes, que des études sérieuses se fissent dans les écoles académiques;
qu'on en proscrivît ces modèles ignobles qu'un barbare esprit de con-
servation a fait revêtir de plusieurs couches de lait de chaux ; il faudrait
que six heures par jour , pendant neuf mois de l'année, les élèves co-
piassent le nu; il faudrait proscrire toutes les mauvaises lithographies,
tous ces petits paysages, toutes ces mille niaiseries qui servent de point
de départ, d'éléments primaires; et s'il entrait dans les vues du gouver-
nement d'imprimer certain essor à la sculpture, à la peinture chré-
tiennes, il y aurait urgence de rassembler dans un grand centre, tel que
Séville, le plus de monuments possible de l'art espagnol au moyen âge.
Cette collection nationale manque; elle serait une des gloires du pays.
Pour la rendre complète, pour réunir les divers genres qu'embrasse la
nature figurée, nous voudrions y voir, en nombre plus ou moins consi-
dérable, ces livres d'heure, ces missels, ces évangiles ornés de minia-
tures; ces incunables du quinzième siècle illustrés de gravures sur bois
et de gravures en fonte , tels que nous en ont montré le bibliothécaire
particulier de la reine à Madrid, celui de l'Escurial, celui de l'Académie
d'histoire et le conservateur du cabinet de M. le duc d'Ossuna. Sans ap-
pauvrir chaque grande bibliothèque, il serait possible, moyennant des
échanges, de former un musée spécial éminemment utile.
Nous voici bien loin d'Avilâ, de sainte Thérèse, de ce que j'aurais
voulu vous dire; mais en tontes choses l'imprévu nous emporte, la
dernière idée domine les autres idées, et je viens, ma révérende, comme
le faisait Cervantès avant de livrer au public la seconde partie du
Don Quichotte, vous poser cette question : Croyez-vous que ce soit chose
facile de faire un livre? (Prologue, 1. hf)
Agréez.
Emile Bégin.
FIN.
 
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