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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 11.1875

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Nr. 3
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Mantz, Paul: Charles Gleyre, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.21840#0254

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242 GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

musées d'Italie, il pensait aux élégances, aux saveurs de la forme nue.
On se rappelle qu'aux dernières années du règne de Louis-Philippe,
quelques artistes de l'école française s'étaient épris d'un goût très-vif
pour les sujets empruntés à la fable ou à l'antique symbolisme. Ils se di-
saient que les maîtres de l'Académie, échos affaiblis de la pensée de David,
de Gérard, de Guérin, avaient affadi les types augustes du monde grec et
rétréci l'idéal. On doutait de Picot ; Blondel lui-même était suspect. On
croyait, à la façon d'André Ghénier, qu'une idée nouvelle pouvait être
versée dans une forme épurée et plus authentique. De là cette petite
école des néo-grecs qui inspira à quelques-uns tant d'espérances et qui,
on le sait, a si peu tenu ses promesses. Bien qu'il ait pu, de son côté,
faire le même rêve, Gleyre ne se mêla pas à la tentative de ces jeunes
résurrectionnistes ; il combattait à part et il était de beaucoup mieux
armé que les meilleurs d'entre eux. La révolution de 1848 ne l'interrompit
pas dans son travail, et l'année suivante il put exposer l'un de ses
tableaux tes plus importants, la Danse des Bacchantes.

L'intensité des préoccupations du moment détourna un peu la curio-
sité publique de l'exposition du palais des Tuileries. L'œuvre de Gleyre
ne fut pas étudiée avec toute la liberté d'esprit désirable, et cette étude
ne put être reprise après le Salon, car les Bacchantes ne restèrent pas
en France. « Je regrette sincèrement, dit Planche, que ce tableau soit
parti pour Madrid. » Une assez faible gravure, publiée par l'Artiste, peut
seule aujourd'hui rappeler h la mémoire des contemporains le souvenir
de cette composition sévère. On y voyait la trace d'un immense effort.
Dans cette peinture, longuement mûrie, Gleyre avait résumé tout ce qu'il
savait de l'art grec. Les bas-reliefs que décorent des figures dansantes,
les vases peints autour desquels s'enroulent des silhouettes légères
avaient fourni des formes et des attitudes. Pour rhythmer savamment les
saltationsde ses bacchantes, Gleyre avait consulté les bons auteurs, inter-
rogé les textes les plus purs. De touchantes qualités de dessin, une con-
science digne de tous les respects, éclataient dans cette peinture, mais,
chose grave, ce tableau, qui devait être brillant de toutes les flammes
de la volupté et de l'ivresse, était d'une froideur singulière. C'est une
terrible question que celle de savoir si l'on peut, avec des procédés pru-
dents, réservés, presque timides, donner l'idée de la folie en mouvement
et des délires orgiaques. Gleyre y réussit peu, et cependant, à prendre
isolément les figures, combien il y avait d'élégance dans le -type de
quelques-unes des danseuses, et, pour le dessin du détail, pour le rendu
des accessoires, combien d'habileté et de goût ! Mais, encore une fois, la
sagesse patiente et appliquée n'est pas l'inspiration et le lyrisme. Ce
 
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