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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 11.1875

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Nr. 5
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Duplessis, Georges: Les eaux-fortes de Rembrandt
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https://doi.org/10.11588/diglit.21840#0496

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LES

EAUX

-FORTES

DE REMBRANDT.

reront toujours les modèles du genre, parce qu'ils possèdent des qualités
de l'ordre le plus élevé.

En face des horizons immenses que présente à chaque pas la Hollande,
Rembrandt, se sent ému et transmet aisément son émotion. Choisissant
toujours avec esprit les points de vue qu'il entend recommander, il
grave de nombreux paysages qui n'ont jamais été mieux rendus par aucun
de ses compatriotes, fort, habiles, comme on sait, dans ce genre particulier.
Il se plaît à représenter ces prairies sans fm, coupées par d'innombrables
canaux, au milieu desquelles s'élèvent tantôt un modeste clocher, tantôt
un moulin superbe; il aime à dessiner sur le cuivre une humble masure
abritée par un bouquet d'arbres ou protégée par une barrière en planches,
un cours d'eau sur lequel glisse un lourd bateau chargé de bois, un ha-
meau perdu au milieu de gras pâturages ; il transmet ainsi au loin la phy-
sionomie tout à fait fidèle d'un pays qu'il ne quitta jamais, dans lequel
il puisa toutes ses inspirations, et qu'il semble avoir aimé avec passion.

Dans les moindres croquis tracés sur le cuivre par Rembrandt, dans
les sujets familiers, clans les essais de pointe auxquels il ne semble avoir
attaché aucun prix, l'homme de génie apparaît ; la composition est dispo-
sée avec art, la silhouette est toujours juste, la pantomime est rigoureuse-
ment exacte et le dessin est précis. Sans doute Rembrandt ne procède
pas de la même manière que certains maîtres qui ont donné au dessin
proprement dit tous leurs soins. Il ne se complaît pas dans un contour
exquis, dans des proportions harmonieusement établies et dans des lignes
pondérées avec art ; mais comme il possède à fond le sentiment de la
forme, comme il sait donner aux ligures qu'il invente une expression
juste et appropriée à leur situation, comme chez lui le sens de la vie est
aussi développé que le sens de la lumière, on peut affirmer que le génie
du dessin ne lui a pas manqué et que, s'il n'en a pas fait le même usage
que d'autres maîtres également illustres, c'est que son tempérament
s'opposait à cette interprétation de la nature, à ce choix dans les types
qui constitue la réelle beauté.

Si Rembrandt, n'a pas connu le style, c'est-à-dire la beauté et l'idéal,
il a suppléé à ces qualités qui lui manquaient par des qualités d'un autre
ordre développées chez lui à tel point que l'on songe à peine à s'aper-
cevoir de la vulgarité des types qu'il introduit dans ses compositions.
k Rembrandt fut un grand artiste, dit M. Charles Blanc, parce qu'il fut
ému; il sentit profondément, ce qu'il voulut nous faire sentir. Entouré de
formes triviales, il s'en servit pour exprimer les sentiments les plus nobles,
en leur prêtant le charme inattendu de ses ombres transparentes, le
prestige de sa lumière magique et la mélancolie de ses demi-teintes. »
 
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