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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 15.1877

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Nr. 2
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Duranty, Edmond: Remarques sur le geste dans quelques tableaux, 2: promenades au Louvre
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https://doi.org/10.11588/diglit.21844#0182

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PROMENADES AU LOUVRE.

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alors les doigts s’entre-croisent, et c’est ici que la véritable torsion des
mains entre en action; les coudes s’élèvent à leur tour au-dessus des
épaules, les bras se replient et deviennent horizontaux ainsi que les
mains; la contraction cesse de pouvoir se produire en haut, elle réagit
vers le bas qui est la seule voie où elle trouve de l’espace, les mains
s’abaissent alors peu à peu; entraînant les bras, elles arrivent avec eux à
cette position qu’a choisie Rubens, mais où le mouvement ne s’arrête pas
encore, car il ne peut se terminer que si l’espace lui manque et si les
membres ont accompli les contorsions qu’ils sont propres à exécuter,
c’est-à-dire lorsque les mains sont entièrement redescendues de toute
la longueur des bras, et semblent pendre devant le giron. Rubens avait
donc à choisir entre trois positions significatives : celle où les mains en se
tordant s’élèvent à la hauteur du visage tandis que les coudes dépassent
les épaules, celle où elles redescendent, celle enfin où le mouvement
ayant terminé sa course, le geste dure un certain temps; c’est celle qu’il
a choisie et que je préfère, du reste, comme la véritable tonique du sen-
timent.

Art surprenant que la peinture, le seul qui réalise, et en même temps
privé de la plus importante des ressources : la faculté de suivre le
mouvement dans sa marche!

Le geste de Rubens n’est pas obscur, mais il m’a servi à bien faire
comprendre ces phases de leur évolution où les gestes peuvent devenir
obscurs si on les y arrête mal à propos. C’est ce qui est arrivé pour le
serviteur de Cuyp et pour la buveuse de thé de Miéris dont j’ai déjà
parlé. Un geste très-incertain encore est celui du Christ dans la grande
Cène copiée d’après Léonard de Vinci. Que fait sa main droite? Vient-elle
de lâcher, va-t-elle saisir? Je ne crois pas d’ailleurs qu’on puisse déter-
miner une différence entre ces deux actes, si on les prend chacun dans un
certain moment. Par parenthèse, cette Cène est une collection, un vrai
manuel, mot doublement justifié, des gestes qu’on représente le plus
ordinairement dans la haute peinture, et dont la classique netteté ne
suscite aucune observation particulière.

Les différences ne sont pas toujours faciles à marquer entre les
gestes, car des sensations pourtant très-diverses, l’une très-vive, l’autre
très-légère, peuvent amener le même mouvement, ou à peu près. Le
Peseur d'or de Quentin Matsys me fournira une démonstration à ce pro-
pos. L’artiste a donné un geste excellent à la femme du peseur d’or.
Elle interrompt sa lecture pour regarder la pièce curieuse que lui montre
son mari, mais le bout de son doigt, appuyant d’une manière presque
imperceptible sur la tranche de la page qu’elle lisait, maintient ce feuillet
 
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