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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 17.1897

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Nr. 2
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Molinier, Émile: Un don au Musée du Louvre: la collection du comte Isaac de Camondo
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https://doi.org/10.11588/diglit.28018#0113

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UN DON AU MUSÉE DU LOUVRE

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grands musées ou dans les rares collections formées à une époque
où l’art du xve siècle était dédaigné. Il appartient à la série des
œuvres que Piot ramassait en Italie pour un morceau de pain et
qu’il vit repoussées quand il offrit, en 1849, de les céder au Louvre
pour un prix dont la modicité fait sourire aujourd’hui. Je n’ai pas
besoin de décrire longuement ce bas-relief de la Crucifixion, dont le
lecteur a une excellente reproduction sous les yeux. La composition,
toute traditionnelle au point de vue iconographique, est des plus
simples : le Christ en croix; autour de lui, quelques-uns des instru-
ments de la Passion; puis, à gauche et à droite, la Vierge et saint
Jean. Après avoir modelé avec énergie le corps du Sauveur, dont la
tête, d'un très beau caractère, mais d’une beauté peu régulière et à
demi voilée par une chevelure en désordre, s’incline sur la poitrine,
toute l’attention de l’artiste s’est portée sur les autres figures, aux-
quelles il a cherché à donner une expression dramatique. Cette
image de la Vierge douloureuse, drapée dans de longs voiles dont les
plis verticaux accentuent l’allongement, le corps penché en avant, les
mains croisées sur la poitrine sont pour ainsi dire de style dans l’école
réaliste du xve siècle. L’admirable bas-relief de la Mise au Tombeau,
conservé au Musée de Vienne, œuvre dont l’attribution à Donatello
n’est pas contestable, peut être considéré comme un des exemples
les plus frappants de cette tentative, souvent renouvelée, pour faire
exprimer à la sculpture les plus violentes douleurs. En pendant à
cette figure désolée, se dresse le disciple, qui, plus calme en appa-
rence, se voile la face de sa main droite pour cacher ses larmes. Ce
saint Jean, fièrement drapé dans son manteau, a une noblesse d’atti-
tude qui n’échappera à personne et forme un heureux contraste avec
la Mère exhalant sa douleur. Même parti pris, du reste, dans les deux
figures, pour la disposition des draperies en longs plis verticaux, que
la sécheresse du travail de reprise du bronze après la fonte accentue
encore. Car, ainsi que dans beaucoup d’œuvres de la Renaissance,
tout le modelé a été repris à l’outil ; les contours ont été cernés
et suivis. Ces procédés sont surtout visibles dans le corps du Christ,
qui a subi un véritable travail de sculpture., destiné à accentuer cer-
tains détails, à détacher certaines parties, les bras, par exemple,
pour les mieux accentuer sur le fond, les faire se dessiner par leur
ombre portée. Derrière la croix, on aperçoit plusieurs figures de
soldats, traitées en relief peu accentué, si bien qu’on peut se deman-
der si elles existaient réellement dans le projet primitif de l'artiste,
si, en ciselant le métal, il ne les a pas créées de toutes pièces, après
 
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