LES MINIATURES DES MANUSCRITS MUSULMANS 287
néanmoins que la prohibition des figures vivantes remonte à Maho-
met, qui ha prise dans la Bible, où elle se trouve énoncée, comme
on le sait, d’une façon très sévère. Le prophète qui fit briser les
idoles de la Mecque ne pouvait guère tolérer chez ses fidèles la
reproduction des êtres vivants.
Les musulmans en donnent une raison assez singulière pour
mériter d’être cilée. Au jour du jugement dernier, disent-ils,
l’homme qui aura fait une image sera obligé de lui donner une âme ;
il perdra par conséquent la sienne propre, el sera précipité en enfer.
Cette défense a eu pour l’art les conséquences les plus déplo-
rables : Mahmoud de Ghizné, après avoir fait briser la splendide
idole indoue de Somnâth, en envoya les fragments dans sa capitale,
pour qu’on en fit les marches d’une mosquée et que les musulmans
pussent fouler aux pieds ces débris du paganisme. Quand Saladin
s’empara de Jérusalem, il lit effacer les peintures dont les chrétiens,
pendant leur courte occupation de la ville sainte, avaient couvert
les murs de la mosquée d’Omar. Bâber, qui était cependant l’un des
souverains les plus éclairés de l’Islâm, faisait détruire à coups de
canon les statues indiennes qu’il trouvait sur sa route.
C’est ce fait qui a donné à l’architecture musulmane, dans tous
les pays où se sont répandus les sectateurs du prophète, ce caractère
de sévérité où la nudité des lignes n’est guère rachetée que par l'en-
chevêtrement des arabesques et des inscriptions et par l’éclat des
mosaïques. La gravure n’a pas été plus heureuse que la sculpture
et la peinture, car les monnaies musulmanes ne portent point
l’effigie du souverain au nom duquel elles sont frappées, et les
cachets,, dont l’importance est plus considérable en Orient que la
signature, n’offrent que le nom du possesseur et l’année de l’hégire
dans laquelle ils ont été graves. Ce n’est que par la perfection de
l’écriture et par la disposition élégante des caractères que valent les
monuments sigillographiques des musulmans; il est vrai que per-
sonne ne pourrait les surpasser en calligraphie.
Si sévère, si absolue que soit cette prohibition, il faut pourtant
reconnaître qu’elle a été plus d’une fois éludée. C’est surtout en
Egypte et dans tout le nord de l'Afrique (le Maghreb des géogra-
phes arabes), ainsi que dans l’empire osmanly que se trouvent les
musulmans les plus intransigeants ; aussi ne peut-il être question
aujourd’hui d’art plastique dans ces pays. Le sultan Mahmoud II,
ayant eu l'idée de faire afficher son portrait, vêtu à l’européenne,
dans les casernes de Constantinople, et de faire frapper la monnaie à
néanmoins que la prohibition des figures vivantes remonte à Maho-
met, qui ha prise dans la Bible, où elle se trouve énoncée, comme
on le sait, d’une façon très sévère. Le prophète qui fit briser les
idoles de la Mecque ne pouvait guère tolérer chez ses fidèles la
reproduction des êtres vivants.
Les musulmans en donnent une raison assez singulière pour
mériter d’être cilée. Au jour du jugement dernier, disent-ils,
l’homme qui aura fait une image sera obligé de lui donner une âme ;
il perdra par conséquent la sienne propre, el sera précipité en enfer.
Cette défense a eu pour l’art les conséquences les plus déplo-
rables : Mahmoud de Ghizné, après avoir fait briser la splendide
idole indoue de Somnâth, en envoya les fragments dans sa capitale,
pour qu’on en fit les marches d’une mosquée et que les musulmans
pussent fouler aux pieds ces débris du paganisme. Quand Saladin
s’empara de Jérusalem, il lit effacer les peintures dont les chrétiens,
pendant leur courte occupation de la ville sainte, avaient couvert
les murs de la mosquée d’Omar. Bâber, qui était cependant l’un des
souverains les plus éclairés de l’Islâm, faisait détruire à coups de
canon les statues indiennes qu’il trouvait sur sa route.
C’est ce fait qui a donné à l’architecture musulmane, dans tous
les pays où se sont répandus les sectateurs du prophète, ce caractère
de sévérité où la nudité des lignes n’est guère rachetée que par l'en-
chevêtrement des arabesques et des inscriptions et par l’éclat des
mosaïques. La gravure n’a pas été plus heureuse que la sculpture
et la peinture, car les monnaies musulmanes ne portent point
l’effigie du souverain au nom duquel elles sont frappées, et les
cachets,, dont l’importance est plus considérable en Orient que la
signature, n’offrent que le nom du possesseur et l’année de l’hégire
dans laquelle ils ont été graves. Ce n’est que par la perfection de
l’écriture et par la disposition élégante des caractères que valent les
monuments sigillographiques des musulmans; il est vrai que per-
sonne ne pourrait les surpasser en calligraphie.
Si sévère, si absolue que soit cette prohibition, il faut pourtant
reconnaître qu’elle a été plus d’une fois éludée. C’est surtout en
Egypte et dans tout le nord de l'Afrique (le Maghreb des géogra-
phes arabes), ainsi que dans l’empire osmanly que se trouvent les
musulmans les plus intransigeants ; aussi ne peut-il être question
aujourd’hui d’art plastique dans ces pays. Le sultan Mahmoud II,
ayant eu l'idée de faire afficher son portrait, vêtu à l’européenne,
dans les casernes de Constantinople, et de faire frapper la monnaie à