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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Per. 19.1898

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Nr. 2
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Champeaux, Alfred de: L' ancienne École de Peinture de la Bourgogne, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24683#0147

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

les rayons un peu dédorés traversent tout le panneau. Dans la partie
gauche est une tour en briques, par la fenêtre grillagée de laquelle le
Christ, assisté de douze anges, donne la communion à l’évêque saint
Denis; celle de droite est occupée par le martyre de saint Denis et de
ses acolytes, saint Rustique et saint Eleuthère, dont les têtes gisent
déjà séparées du corps, tandis que l’apôtre agenouillé attend le coup
que va lui asséner le bourreau ; cinq spectateurs placés en arrière
assistent à cette scène sanglante.

Le Martyre de saint Denis semble une miniature agrandie de ces
admirables manuscrits que les enlumineurs exécutaient à Paris dans
les premières années du xve siècle. La franchise des tons des vête-
ments, bleus pour la plupart, les procédés et les détails sont identiques
à ceux que l’on retrouve dans divers manuscrits, notamment dans le
Livre des Merveilles, et dans les Bibles bistoriales que le duc de Bour-
gogne faisait exécuter en 1401-1407 chez le médecin Jean Durand et
le marchand Jacques Baponde, par les enlumineurs Polequin et
Hennequin Manuel, que nous avons assimilés à Paul de Limbourg et
à ses deux frères Hennequin et Hermann1. Tous ces artistes étaient
de la même province et ils entretenaient nécessairement des rapports
fréquents; il ne serait donc pas surprenant qu’ils se soient fait de
nombreux emprunts. Les figures de ce grand panneau révèlent
encore bien de l’inexpérience et, malgré toute leur délicatesse, on y
trouve la timidité d’une école qui commence en imitant les compo-
sitions italiennes. Il s’en dégage l’impression douce et tendre d’une
miniature rappelant les fresques de Sienne et de Pise, tandis que le
bourreau et certaines figures sont traités avec la vigueur dramatique
des œuvres rhénanes. Ce qui redouble l’intérêt de ces retables, c’est
que les têtes en sont étudiées avec une recherche de ressemblance qui
est certainement l’un des premiers essais que l’on ait conservés de
l’art du portrait dans notre contrée.

Il semble que la part de Malouel ait été prépondérante dans cette
œuvre et que le propre de son talent ait été sinon d’imiter, au moins
de s’assimiler les chefs-d’œuvre dus aux miniaturistes de son
époque. Il est évident que Henri Bellechose, pour achever le tableau
commencé par son maître, n’aura fait que suivre le patron qu’il
avait dessiné et que peut-être il avait transporté en partie sur le
panneau destiné à la Chartreuse. Ce qui nous confirmerait dans cette

1. Y. A. de Champeaux et Gauchery. Les Travaux d’art exécutés pour Jean de
France, duc de Berry. Il est curieux de voir quelquefois le nom des enlumineurs
Manuel, converti en celui de Malouel (compte de Jehan Chousat).
 
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