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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Per. 19.1898

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Nr. 2
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Gauthiez, Pierre: Hans Holbein sur la route d'Italie, 2: Lucerne, Altdorf
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https://doi.org/10.11588/diglit.24683#0181

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168

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Insigne honneur et marque d’estime singulière pour le canton cl’Uri
de voir ses armes figurer en pareil lieu.

Tout conspirait donc, traditions, impressions, et la nature même
du pays qu'il allait traverser, à faire que llolbein voulût s’arrêter
sur la route du Saint-Gothard et marquer sa halte particulière dans
Altdorf. L’amour du pays originel a coutume d’agir avec puissance
sur 1 artiste ; l’imagination plus vive, le vague amour de la tradition
qui souvent arrive à s’allier avec l’existence la plus nomade, colorent
dans son esprit les contrées où il croit voir revivre ses ancêtres; il
ne voit point la réalité, c’est-à-dire l’indifférence des générations
successives les unes envers les autres quand elles ne se connaissent
pas, leur instinctive hostilité dès qu’elles sont en contact. Il aime
ces aïeux inconnus, disparus; il les aime d’autant plus qu’il n’a pu les
connaître et reste libre de se les figurer suivant ses désirs. Il aime la
terre d’ou ils sont sortis, où ils sont rentrés. Il est juste de dire qu’il
y demeure rarement, sur cette terre-là : il ne l’en aime que plus fort.

La beauté du pays et son caractère tout à fait nouveau n’étaient
pas pour décourager l’artiste, llolbein n’avait jamais rien vu de
pareil à ces horizons. Ni les campagnes tempérées de Bâle, ni les
larges plans de montagnes en gradins qui dominent Lucerne ne le
préparaient au spectacle que le tournant du lac d’Uri devait dévoiler
à ses yeux. Il vint certainement au bout du lac par une barque, sans
doute par un de ces grands coches d’eau, chalands massifs et à fond
plat, tels que l’on en découvre encore dans les plus anciens ex-voto
des chapelles riveraines. Et, dès que le golfe d’Uri, se découvrant
entre la pointe de Treib et la baie de Brunnen, lui montra les escar-
pements des Bauen et de l’Axenberg, les rochers tellement abrupts
que les paysans les nommèrent le Moùtier du Diable (Teufels-
Mïinster), et, de l’Uri Rothstock, du Gitschen, aux Clarides et au
Scheer Horn, toutes ces âpres citadelles de pierre et de glace, que
ferme, vers l’horizon de l’Italie, la formidable pyramide du Bristen-
stock, Llolbein dut prendre la vision d’une autre Suisse que celle des
belles collines et des monts en amphithéâtre. Altdorf, au pied de
ces montagnes, sous l’abri de sa forêt sainte1, Altdorf, la seule ville
que l’on pût trouver entre Lucerne et Lugano, devait le retenir alors.

fut son premier grand ouvrage. Brave peintre, qui a meublé mainte église de ce
pays, avec ses toiles proprettes et consciencieuses, bien faites pour la mysticité
partiulière de ces cantons; assurément point inférieur à son patron Overbeck,
et, sans conteste, préférable au terrible Bœcklin.

1. Bannwald.
 
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