LE SALON DE 1900
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faut porter aussi les torches qui s’éteignent. M. Vital-Cornu étire
délicieusement une chair nubile ( T or péris Amor) ; M. Puech l’assou-
plit selon la tradition glorieuse ; un sentiment très simple distingue
deux figures tombales de M. Lhoest ; M. Verlet déploie, à la manière
de Coysevox, pour une fontaine de Bordeaux, la plus riche apothéose
dont un municipe puisse s’enorgueillir. Voici Y Esclave, de M. Roux;
la Mort du chef, de M. Gréber ; le Hylas, de M. Milles; la Méditation,
de Mme Syamour ; le Christ, de M. Desca ; YAgcir et Ismaël, de M. Vidal ;
le Premier essai d'art, de M. Grouillet ; le Monument de Spuller,
de M. Gasq. Mais de la Fin d'un rêve où M. Varenne attendrit la
pulpe d’un marbre un peu mièvre à la Séparation, de M. Joseph
Bernard, que l’on ne saurait blâmer d’aimer Y Aïeule, il y a toute
une évolution du sentiment, comme des langueurs roses de Chaplin
aux gravités songeuses de Dampt.
Pvare est l’exemple d'un statuaire qui conçoit et le buste et la
stèle, et le visage et l’âme et leur destin. Avec infiniment de
tendresse simple et jolie, de compréhension affectueuse, M. Charles
Mathieu a évoqué ce qu'il y a de gracieux et de brutal, d'ironique et
de pitoyable, dans la mémoire d’Ephraïm Mikhaël. Plus rare encore
le cas d’an statuaire à qui suffit un chapiteau pour y accrocher sa
fantaisie (M. Derré). M. Abbal a modelé en plein soleil le lent effort
taciturne des bœufs ; et, s’il sacrifie à l’intérêt de ses recherches
lumineuses le caractère des labours et de l’homme, l’œuvre n'en
est pas moins l’une des plus intéressantes qu’il faille signaler
par l’aboutissement des préoccupations coloristes des sculpteurs
de ce temps, par l’élargissement aussi de la vision. La Moisson, la
Glèbe de Meunier avaient ouvert déjà l’espace aux sculpteurs. Mais
la plupart s’attachent à fixer la vérité individuelle. Les préoccupa-
tions matérielles les y contraignent, et aussi les exigences d’une
société démocratique. La probité bourgeoise exigeait des commémo-
rations solennelles. L’individualisme a érigé son culte morcelé en
statues, en bustes où chaque groupe d’une société émiettée se fixe
et s’héroïse. La « tragédie des arts » doit à ces monologues sa gloire
la plus certaine. On ne peut citer ici, après le buste un peu trop
pittoresque peut-être de Chardin par M. Fournier, après le Goya
légèrement tourmenté de M. Llaneces, que les effigies de MUo Lesley,
de MM. Calvet, Fernand Dubois (Muse de Haarlem), Bernstamm,
Maurice Roger-Marx, de Lahendrie, Usborne, Bruce-Joy, Bloch,
Pallez, Tourneux, Blay y Fabregua.
Barye exprimait un jour à la promenade le regret de n’avoir
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faut porter aussi les torches qui s’éteignent. M. Vital-Cornu étire
délicieusement une chair nubile ( T or péris Amor) ; M. Puech l’assou-
plit selon la tradition glorieuse ; un sentiment très simple distingue
deux figures tombales de M. Lhoest ; M. Verlet déploie, à la manière
de Coysevox, pour une fontaine de Bordeaux, la plus riche apothéose
dont un municipe puisse s’enorgueillir. Voici Y Esclave, de M. Roux;
la Mort du chef, de M. Gréber ; le Hylas, de M. Milles; la Méditation,
de Mme Syamour ; le Christ, de M. Desca ; YAgcir et Ismaël, de M. Vidal ;
le Premier essai d'art, de M. Grouillet ; le Monument de Spuller,
de M. Gasq. Mais de la Fin d'un rêve où M. Varenne attendrit la
pulpe d’un marbre un peu mièvre à la Séparation, de M. Joseph
Bernard, que l’on ne saurait blâmer d’aimer Y Aïeule, il y a toute
une évolution du sentiment, comme des langueurs roses de Chaplin
aux gravités songeuses de Dampt.
Pvare est l’exemple d'un statuaire qui conçoit et le buste et la
stèle, et le visage et l’âme et leur destin. Avec infiniment de
tendresse simple et jolie, de compréhension affectueuse, M. Charles
Mathieu a évoqué ce qu'il y a de gracieux et de brutal, d'ironique et
de pitoyable, dans la mémoire d’Ephraïm Mikhaël. Plus rare encore
le cas d’an statuaire à qui suffit un chapiteau pour y accrocher sa
fantaisie (M. Derré). M. Abbal a modelé en plein soleil le lent effort
taciturne des bœufs ; et, s’il sacrifie à l’intérêt de ses recherches
lumineuses le caractère des labours et de l’homme, l’œuvre n'en
est pas moins l’une des plus intéressantes qu’il faille signaler
par l’aboutissement des préoccupations coloristes des sculpteurs
de ce temps, par l’élargissement aussi de la vision. La Moisson, la
Glèbe de Meunier avaient ouvert déjà l’espace aux sculpteurs. Mais
la plupart s’attachent à fixer la vérité individuelle. Les préoccupa-
tions matérielles les y contraignent, et aussi les exigences d’une
société démocratique. La probité bourgeoise exigeait des commémo-
rations solennelles. L’individualisme a érigé son culte morcelé en
statues, en bustes où chaque groupe d’une société émiettée se fixe
et s’héroïse. La « tragédie des arts » doit à ces monologues sa gloire
la plus certaine. On ne peut citer ici, après le buste un peu trop
pittoresque peut-être de Chardin par M. Fournier, après le Goya
légèrement tourmenté de M. Llaneces, que les effigies de MUo Lesley,
de MM. Calvet, Fernand Dubois (Muse de Haarlem), Bernstamm,
Maurice Roger-Marx, de Lahendrie, Usborne, Bruce-Joy, Bloch,
Pallez, Tourneux, Blay y Fabregua.
Barye exprimait un jour à la promenade le regret de n’avoir