Acques Sirmond nâquit à Riom en Auvergne en l'an^
née 1558. de parens considerables , qui ayant remarqué en luy
dés son bas âge une vivacité d'esprit surprenante , prirent soin
de le faire instruire par d'excellens Maistres. Il profita si bien
de leurs enseignemens, que n'ayant que quinze ans il estoit luy-
même capable d'instruire les autres : Car s'estant fait Jesuite à
cet âge-là , il fut obligé par ses Superieurs dés qu'ils l'eurent reçu , d'enseigner
les langues Grecque & Latine ; ce qu'il fit pendant quelques années avec un
succez extraordinaire. Il eut l'honneur d'avoir pour disciples Charles de Va-
lois Duc d'Angoulesme , fils naturel de Charles IX. & Saint François de Sales
Evesque & Prince de Genéve. Il eut pour amis Pierre Pithou & Nicolas le
Fevre Precepteur de Louis XIII. qui ont rendu l'un & l'autre des témoignages
authentiques de l'estime singuliere qu'ils faisoient de son merite. Estant allé à
Rome à l'âge de trente-deux ans , le General de son Ordre Claude Aquaviva
le fit son Secretaire , & l'aima tendrement à cause de son extrême diligence ,
& sur tout pour le don qu'il avoir de prendre parfaitement dans ses Lettres
le sens & l'intention de son General.
Comme il avoir toujours estimé qu'il n'y avoit que deux choses qu'un hom-
me sage pût souhaiter , & qui fussent capables de le rendre heureux : la doctrine
& la vertu , il ne s'attacha qu'à acquerir ou à augmenter ces deux tresors in-
comparables ; & parce que la connoissance de toutes les sciences est d'une
étendue qui surpasfe celle de l'esprit humain , il crut devoir se retrancher à
l'étude de l'Histoire Ecclesiastique comme la plus convenable à son état , & la
plus utile à l'Eglise. Quelque progrez qu'il y fît , il ne fut point tenté dans tout
le cours de sa jeunesse de faire imprimer aucun Ouvrage par respeét pour le
Public, à qui il croyoit qu'il ne falloir rien donner qui ne se sentît de la ma-
turité de l'âge de son Auteur. Il commença par mettre au jour plusieurs Auteurs,
qui fort obscurs & renfermez dans la poudre de quelques Bibliothèques , n'é-
toient d'aucune utilité. Il les éclaircit d'une infinité de Notes tres-sçavantes , &:
par là il les rendit plus utiles qu'ils ne l'avoient jamais esté. Son plus grand
Ouvrage fut la Collection de tous les Conciles de l'Eglise Gallicane qu'il dedia
au Roy. Le Cardinal de Richelieu touché de la même admiration que toute la
Nation des Sçavans, n'oublia rien de ce qui pouvoir marquer l'estime qu'il
faisoit d'un Ouvrage de cette consequence.
Il étoit d'une force singuliere dans les disputes ou de Controverse ou de Lit-
térature,& il n'est presque jamais sorti que vainqueur de ces sortes de com-
bats. Entre plusieurs qu'il soûtint glorieusement , ilyeneut deux tres.celebres ,
& qui luy acquirent une tres-grande réputation. Le premier fut contre Jacques
Godefroy un des plus sçavans hommes du siecle, qui armé de l'autorité de Ru-
fin combattoit fortement la jurisdiétion du Pape sur les Provinces qu'on appel-
le suburbicaires. Les argumens de cet Adversaire paroissoient invincibles , non
seulement au commun des Sçavans, mais au Cardinal du Perron même recon-