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Ierome Bignon nasquit en l'année 1590. avec toutes les difc
portions que peut donner une heureuse nature , & son Pere qui
se chargea luy-mesme de son Institution luy apprit les Langues ,
les Humanités, l'Eloquence , la Philosophie , les Mathématiques ,
l'Histoire , la Jurisprudence & la Théologie , sans l'avoir jamais
envoyé au College. Il fut élevé enfant d'honneur auprès du feu Roy Loüis X1IL
qui l'estimoit tant, que lorsquïl s'absentoit de la Cour il l'envoyoit ausli-tost
chercher , n'y ayant point de conversation qui luy plust tant que la sienne.
A l'âge de dix ans il donna au public la Description de la Terre-Sainte , à
i, ans les Antiquitez Romaines avec un Traité du Droit & un autre de la ma-
nière d'élire les Papes. A 18. ans il fit imprimer un Traité de la Preséance des
Rois de France sur les autres Rois, pour réfuter le Livre d'un Espag nol imprimé
5. ou 6. ans auparavant , de la Dignité des Rois d'Espagne. Aussi fi
dés les premieres années de sa jeunesse, comme un des plus sçavans & des plus
honnestes hommes de son siecle. Il donna à l'âge de 25. ans des Notes sur les
Formules de Marculphe si pleines d'érudition, d'esprit &: de bon sens qu'elles
firent & font encore l'admiration de tous les Sçavans. Ensuite il dédia au Roy
Henry le Grand un traitté de l'Excellence des Rois & du Royaume de France ,
qui n estoit que comme le crayon d'un plus grand dessein , auquel le Roy luy
commanda de travailler-, mais qui fut interrompu par la mort de ce grand Mo-
narque. Il n'ignoroit aucune des Langues sçavantes , ny presque rien de tout ce
qui a esté écrit sur quelque Science que ce soit.
Il fit sa principale estude de la Jurisprudence civile & canonique , dont on
peut dire qu'il épuisa tous les secrets , & qu'il en devint luy-mesme comme une
source intarissable , car sur quelque matiere qui se presentast à examiner dans
ses Plaidoyers admirables, qui ont esté pendant qu'il a vescu la plus solide instruc-
tion non seulement de la jeunesse du Barreau , mais des plus anciens Advocats
& de tous les Juges mesmes ,il n'y avoit rien de beau , de curieux qu'il ne rap-
portait , en sorte ques'ily a eu quelque chose qu'on pust reprochera ce grand
personnage,c'est qu'il fournissoit tant de raisons de part & d'autre qu'il laisToit
louvent les Juges en suspens sur le party qu'ils avoient à prendre, & qu'il les
ébloüissoit quelquefois à force de les éclairer.
Il commença à paroistre & à donner des marques de sa capacité dans la pro-
fession de simple Advocat, & il continuas se faire connoistre dans celle d'Advo-
cat General du grand Conseil , où sa réputation s'accrut encore de telle sorte
que le Roy luy donna la charge d'Advocat General au Parlement, vacante par
la mort de l'Illustre Monsieur Servin en 1641. Il remit cette Charge à Monsieur
Briquet son gendre homme d'un mérité singulier , & en mesine-temps le Roy
le fit Conseiller d'Estat ; mais Monsieur Briquet estant mort quatre ans après
il reprit la charge d'Advocat General, en la fonction de laquelle il mourut art
mois d'Avril 1656. après s'estre acquis une réputation qui ne mourra jamais
Ierome Bignon nasquit en l'année 1590. avec toutes les difc
portions que peut donner une heureuse nature , & son Pere qui
se chargea luy-mesme de son Institution luy apprit les Langues ,
les Humanités, l'Eloquence , la Philosophie , les Mathématiques ,
l'Histoire , la Jurisprudence & la Théologie , sans l'avoir jamais
envoyé au College. Il fut élevé enfant d'honneur auprès du feu Roy Loüis X1IL
qui l'estimoit tant, que lorsquïl s'absentoit de la Cour il l'envoyoit ausli-tost
chercher , n'y ayant point de conversation qui luy plust tant que la sienne.
A l'âge de dix ans il donna au public la Description de la Terre-Sainte , à
i, ans les Antiquitez Romaines avec un Traité du Droit & un autre de la ma-
nière d'élire les Papes. A 18. ans il fit imprimer un Traité de la Preséance des
Rois de France sur les autres Rois, pour réfuter le Livre d'un Espag nol imprimé
5. ou 6. ans auparavant , de la Dignité des Rois d'Espagne. Aussi fi
dés les premieres années de sa jeunesse, comme un des plus sçavans & des plus
honnestes hommes de son siecle. Il donna à l'âge de 25. ans des Notes sur les
Formules de Marculphe si pleines d'érudition, d'esprit &: de bon sens qu'elles
firent & font encore l'admiration de tous les Sçavans. Ensuite il dédia au Roy
Henry le Grand un traitté de l'Excellence des Rois & du Royaume de France ,
qui n estoit que comme le crayon d'un plus grand dessein , auquel le Roy luy
commanda de travailler-, mais qui fut interrompu par la mort de ce grand Mo-
narque. Il n'ignoroit aucune des Langues sçavantes , ny presque rien de tout ce
qui a esté écrit sur quelque Science que ce soit.
Il fit sa principale estude de la Jurisprudence civile & canonique , dont on
peut dire qu'il épuisa tous les secrets , & qu'il en devint luy-mesme comme une
source intarissable , car sur quelque matiere qui se presentast à examiner dans
ses Plaidoyers admirables, qui ont esté pendant qu'il a vescu la plus solide instruc-
tion non seulement de la jeunesse du Barreau , mais des plus anciens Advocats
& de tous les Juges mesmes ,il n'y avoit rien de beau , de curieux qu'il ne rap-
portait , en sorte ques'ily a eu quelque chose qu'on pust reprochera ce grand
personnage,c'est qu'il fournissoit tant de raisons de part & d'autre qu'il laisToit
louvent les Juges en suspens sur le party qu'ils avoient à prendre, & qu'il les
ébloüissoit quelquefois à force de les éclairer.
Il commença à paroistre & à donner des marques de sa capacité dans la pro-
fession de simple Advocat, & il continuas se faire connoistre dans celle d'Advo-
cat General du grand Conseil , où sa réputation s'accrut encore de telle sorte
que le Roy luy donna la charge d'Advocat General au Parlement, vacante par
la mort de l'Illustre Monsieur Servin en 1641. Il remit cette Charge à Monsieur
Briquet son gendre homme d'un mérité singulier , & en mesine-temps le Roy
le fit Conseiller d'Estat ; mais Monsieur Briquet estant mort quatre ans après
il reprit la charge d'Advocat General, en la fonction de laquelle il mourut art
mois d'Avril 1656. après s'estre acquis une réputation qui ne mourra jamais