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Revue archéologique — 10.1864

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Hauréau, Barthélemy: Le concile de Paris de l'année 1210
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.24252#0423

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LE CONCILE DE PARIS DE L’ANNÉE 1210.

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d’Aire, se disant, assure-t-on, un envoyé de Dieu (1). Parmi ses
confrères du Grand-Pont (2), Guillaume était sans doute le plus
lettré. Avait-il, comme le raconte Césaire d’Heisterbach, le principal
historien de cette tragique aventure, suivi dans sa jeunesse les leçons
publiques des théologiens? Quoi qu’il en soit, car le témoignage de
Césaire n’est pas toujours fidèle, l’orfévre Guillaume fréquentait
habituellement un certain nombre de clercs gradués, avec lesquels
il se plaisait à discourir très-librement sur toute question théolo-
gique. Poursuivant donc en la présence de Me Raoul un de ses entre-
tiens ordinaires, il ne tarde pas à lui déclarer que les temps d’une
rénovation religieuse sont proches, ainsi que le manifestent les signes
prédits. La corruption des prélats n’est-elle pas notoire? N’est-il pas
évident que les jours de l’Antéchrist sont déjà venus? Peut-on le
méconnaître sous les traits du pape Innocent? Rome enfin n’est-elle
pas Rabylone?

Me Raoul prêtant à ce discours une oreille attentive, Guillaume
ajoute que les esprits tant soit peu clairvoyants pressentent déjà
quelle sera la forme de la religion nouvelle. De même que la
très-sainte Trinité consiste en trois personnes dont les attributs sont
distincts, ainsi la vie de l’humanité, sur cette terre d’exil, se partage
en trois périodes différentes, et à chacune de ces trois périodes pré-
side particulièrement une des trois personnes qui composent la
mystérieuse déité. A l’unité de l’essence divine correspond l’unité de
l’espèce humaine, et à la triplicité des modes qui nous manifestent
la permanente unité de Dieu correspond, ou, pour mieux dire, s’as-
simile, dans le même sujet créé, au sein de l’humanité vivante, une
triple série de phénomènes sociaux (3). Yoilà pour la doctrine. Main-
tenant voici comment cette doctrine est confirmée par l’histoire. A
l’avénement de la première période, Dieu le Père s’est incarné dans

(1) Cæsarius Heisterbacheensis, Illustr. mirac. et Ilist. memorab., lib. V, c. 22.

(2) Le Grand-Pont, construit par Charles le Chauve, était un pont de pierre qui
joignait la rive droite de la Seine à la Cité. Sur ce pont étaient les opulentes bou-
tiques des orfèvres et des changeurs, comme nous l’attestent plusieurs chartes du
Cartulaire de Notre-Dame, et Jean de Garlande dans son Dictionnaire, cité par
M. Springel, Paris au XIIIe siècle, ch. n.

(3) Cæsarius, ibid. — Nous n’avons pas, suivant M/Daunou, les actes du concile de
1210, qui condamna les complices de Guillaume d’Aire. C’est une erreur du savant
historien. Ces actes, inconnus il est vrai au P. Labbe et au P. Hardouin, ont été
publiés par Martene, Thés. Nov. Anecd., t. IV, col. 163 et suiv. En voici un premier
fragment : « In hune modum detrahebant creatori, qui creatura erant. Auctoritas
sancta sic loquitur : Opéra Trinüatis imeparabilia. Hi e contra : Pater a principio
operatus est sine Filio et Spiritu Sancto, usque ad ejusdem Filii incarnationem.
 
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