Jean-Baptiste Tiepolo
Jean-Baptiste Tiepolo, issu d’une famille qui n’avait, paraît-il, de commun que le nom
avec celle des patriciens Tiepolo, fut baptisé à Venise le 6 avril 1696. A peine âgé d’un an,
il perdit son père, qui était compropriétaire et capitaine de navires marchands. Il eut pour
maître Grégoire Lazzarini, mais ayant un talent des plus précoces, il le quitta bientôt et
s’établit comme peintre indépendant. Le 21 novembre 1719 il se maria, dans sa ville natale,
avec Cecilia Guardi, sœur de peintre bien connu François Guàrdi, et eut d’elle neuf enfants,
dont deux, Jean-Dominique et Laurent, devinrent peintres et aidèrent constamment leur père
dans ses travaux.
La vivacité du pinceau de Tiepoletto (c’est ainsi que notre artiste était généralement
appelé), l’éclat extraordinaire de sa palette, et surtout ses conceptions neuves et parfois fort
bizarres, lui procurèrent rapidement une vogue énorme, au point que, bien qu’il fût doué d’une
prodigieuse célérité d’exécution au service d’une imagination inépuisable, il avait de la peine
à suffire aux commandes. Mais nous n’ avons pas à énumérer ici la quantité énorme de pein-
tures à fresque, à 1’ huile, à la gouache faites par Jean-Baptiste, et nous devons nous contenter
de donner quelques renseignements sur sa vie et sur son œuvre gravé.
La renommée qui le proclamait le meilleur peintre-décorateur de l’époque avait franchi
les frontières de l’Italie. Charles-Philippe de Greiffenklau, prince-évêque de la Franconie
Orientale, voulant faire décorer le château qu’ il venait de se faire bâtir en style rococo à
Wurzbourg, capitale de son petit état, fit à Tiepolo des offres si séduisantes que celui-ci ne
put que les accepter. Il alla donc s’ établir avec Jean-Dominique et Laurent, et tout le reste
de sa famille, à Wurzbourg, où il resta trois ans, de 1750 à 1753. Le prince-évêque, très sa-
tisfait de l’artiste, le récompensa généreusement; il lui donna 21.000 florins, outre 2000 florins
qu’ il lui avait déjà remis pour les frais du voyage.
Mais déjà bien avant de se rendre à Wurzbourg, Tiepolo avait reçu de l’étranger une
invitation des plus flatteuses. En 1736, le comte de Tessin, ministre du roi de Suède et con-
naisseur très éclairé en matière d’art, avait été chargé par son souverain de chercher, à l’oc-
casion d’un voyage qu’ il devait faire à travers 1’ Europe, un peintre décorateur pour le
nouveau palais royal de Stokholm. Il entra en pourparlers avec plusieurs artistes, entre autres
avec Jean-Baptiste, sur lequel, dans une de ses lettres à la cour de Suède, il s’exprime ainsi:
« Tiepolo, dit Tiepoletto, est fait exprès pour nous_Il est plein d’esprit, accommodant comme
un Taraval, un feu infini, un coloris éclatant, et d’une vitesse surprenante. Il fait un tableau
en moins de temps qu’il n’en faut à un autre pour broyer ses couleurs.... » Mais à cause
d’une misérable différence sur le chapitre des honoraires, l’affaire ne fut pas conclue.
Aucun des biographes de Tiepolo n’a jamais parlé d’un voyage qu’il aurait fait à
Saint-Pétersbourg. C’est qu’en effet la tradition et les documents sont également muets à cet
égard. Il existe pourtant, en faveur de ce voyage, nous ne dirons pas une preuve absolue,
mais un indice qui nous paraît d’un certain poids. Les n08 39, 41, 42 et 43 de la deuxième
table (dont tout à l’heure nous donnerons le texte) des gravures des trois Tiepolo publiées
par Jean-Dominique à Venise, se rapportent à quatre grands plafonds avec des sujets mytho-
Jean-Baptiste Tiepolo, issu d’une famille qui n’avait, paraît-il, de commun que le nom
avec celle des patriciens Tiepolo, fut baptisé à Venise le 6 avril 1696. A peine âgé d’un an,
il perdit son père, qui était compropriétaire et capitaine de navires marchands. Il eut pour
maître Grégoire Lazzarini, mais ayant un talent des plus précoces, il le quitta bientôt et
s’établit comme peintre indépendant. Le 21 novembre 1719 il se maria, dans sa ville natale,
avec Cecilia Guardi, sœur de peintre bien connu François Guàrdi, et eut d’elle neuf enfants,
dont deux, Jean-Dominique et Laurent, devinrent peintres et aidèrent constamment leur père
dans ses travaux.
La vivacité du pinceau de Tiepoletto (c’est ainsi que notre artiste était généralement
appelé), l’éclat extraordinaire de sa palette, et surtout ses conceptions neuves et parfois fort
bizarres, lui procurèrent rapidement une vogue énorme, au point que, bien qu’il fût doué d’une
prodigieuse célérité d’exécution au service d’une imagination inépuisable, il avait de la peine
à suffire aux commandes. Mais nous n’ avons pas à énumérer ici la quantité énorme de pein-
tures à fresque, à 1’ huile, à la gouache faites par Jean-Baptiste, et nous devons nous contenter
de donner quelques renseignements sur sa vie et sur son œuvre gravé.
La renommée qui le proclamait le meilleur peintre-décorateur de l’époque avait franchi
les frontières de l’Italie. Charles-Philippe de Greiffenklau, prince-évêque de la Franconie
Orientale, voulant faire décorer le château qu’ il venait de se faire bâtir en style rococo à
Wurzbourg, capitale de son petit état, fit à Tiepolo des offres si séduisantes que celui-ci ne
put que les accepter. Il alla donc s’ établir avec Jean-Dominique et Laurent, et tout le reste
de sa famille, à Wurzbourg, où il resta trois ans, de 1750 à 1753. Le prince-évêque, très sa-
tisfait de l’artiste, le récompensa généreusement; il lui donna 21.000 florins, outre 2000 florins
qu’ il lui avait déjà remis pour les frais du voyage.
Mais déjà bien avant de se rendre à Wurzbourg, Tiepolo avait reçu de l’étranger une
invitation des plus flatteuses. En 1736, le comte de Tessin, ministre du roi de Suède et con-
naisseur très éclairé en matière d’art, avait été chargé par son souverain de chercher, à l’oc-
casion d’un voyage qu’ il devait faire à travers 1’ Europe, un peintre décorateur pour le
nouveau palais royal de Stokholm. Il entra en pourparlers avec plusieurs artistes, entre autres
avec Jean-Baptiste, sur lequel, dans une de ses lettres à la cour de Suède, il s’exprime ainsi:
« Tiepolo, dit Tiepoletto, est fait exprès pour nous_Il est plein d’esprit, accommodant comme
un Taraval, un feu infini, un coloris éclatant, et d’une vitesse surprenante. Il fait un tableau
en moins de temps qu’il n’en faut à un autre pour broyer ses couleurs.... » Mais à cause
d’une misérable différence sur le chapitre des honoraires, l’affaire ne fut pas conclue.
Aucun des biographes de Tiepolo n’a jamais parlé d’un voyage qu’il aurait fait à
Saint-Pétersbourg. C’est qu’en effet la tradition et les documents sont également muets à cet
égard. Il existe pourtant, en faveur de ce voyage, nous ne dirons pas une preuve absolue,
mais un indice qui nous paraît d’un certain poids. Les n08 39, 41, 42 et 43 de la deuxième
table (dont tout à l’heure nous donnerons le texte) des gravures des trois Tiepolo publiées
par Jean-Dominique à Venise, se rapportent à quatre grands plafonds avec des sujets mytho-