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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 8.1882 (Teil 2)

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Lenormant, François: Le céramique des anciens et ses caractères généraux au point de vue technique
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https://doi.org/10.11588/diglit.19459#0037

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22 L'ART.

d'après le degré de dureté et de résistance de la pâte, mais d'après la manière dont elle se
comporte sous l'action de certains feux.

Mettant à part les Chinois, dont la civilisation, tout à fait distincte de celle des autres
nations de l'antiquité, s'est développée dans l'isolement et d'une manière entièrement indépendante,
aucun peuple ancien n'a connu les poteries de la troisième classe, n'a fabriqué de porcelaines ni
tendres ni dures.

Rien de plus faux, en effet, que la désignation vulgaire de la prétendue « porcelaine égyp-
tienne », dont nos musées renferment tant de beaux spécimens. Ce n'est en aucune façon une
porcelaine. C'est une poterie à texture sableuse, blanchâtre ou grisâtre, qui donne à l'analyse de
80 à go p. 100 de silice contre de i3 à 4 d'alumine et de 3 à 2 de chaux. La masse n'en a ni
ténacité ni cohésion, et s'égruge avec une extrême facilité. C'est du sable presque pur, auquel on
n'a joint que la quantité d'argile indispensable pour le lier. D'un semblable mélange est résultée
une pâte manquant presque complètement de plasticité, dont on a surtout fait des figurines et
des pièces rondes sans pied, d'un modelage très simple, car elle était extrêmement difficile à
façonner en vases exécutés sur le tour.

La glaçure, presque toujours d'un bleu plus ou moins franc, tantôt tirant sur le vert, tantôt
si intense et si beau qu'on l'a quelquefois attribué au cobalt, la glaçure qu'on appliquait sur
cette fritte sableuse est un verre tendre, souvent très épais, composé de silice et de soude et
coloré par des sels de cuivre. C'est à l'état d'oxyde que ce métal a dû y être employé, et c'est
l'action alcaline de la soude, lors de la fusion de la glaçure clans le four, qui lui a fait prendre
la couleur bleue. L'addition de plomb aurait seule permis de lier une semblable glaçure aux pâtes
argileuses dont les Egyptiens faisaient leur poterie usuelle. Mais ils ne paraissent pas avoir
connu l'emploi de ce métal clans les vernis céramiques, pratiqué, au contraire, de très bonne
heure par les Babyloniens. Placée sur la poterie d'argile telle qu'ils la faisaient, la glaçure de
leur soi-disant porcelaine aurait bouillonné ou grésillé, ou serait tombée en écailles.

« Les Egyptiens, qui faisaient bien le verre, mais assez mal la poterie, dit Brongniart,
avaient probablement découvert la glaçure bleue de cuivre avant de savoir si elle pouvait aller
sur leurs pâtes céramiques; ils ont donc été obligés d'en inventer une particulière qui pût recevoir
et retenir ce beau verre ; ils ont alors composé comme excipient cette pâte presque entièrement
siliceuse et poreuse, n'ayant d'argile que ce qui était indispensable pour qu'on pût la manier et
la façonner. » La fritte sableuse qu'ils revêtaient de leur glaçure vitreuse colorée à l'aide du
cuivre était pour eux, du reste, moins une poterie à proprement parler qu'une sorte de pierre
artificielle, un succédané de certaines roches naturellement poreuses auxquelles ils appliquaient
la même glaçure après les avoir sculptées, par exemple des schistes qui retenaient facilement
la glaçure.

Ajoutons que le verre tendre, ainsi employé en guise de vernis céramique par les Egyptiens,
se décompose avec une extrême facilité. La plus légère quantité d'un acide quelconque, même
très étendu, l'attaque immédiatement, et en le décomposant donne naissance à des sels de cuivre
solubles qui peuvent être toxiques. Les vases revêtus de cette glaçure, tels que les coupes, n'étaient
donc d'un emploi sans danger que dans un très petit nombre de cas. C'était une céramique
décorative bien plutôt qu'usuelle.

Sur quelques points du monde antique on rencontre exceptionnellement quelques exemples
de poteries qui offrent dans la composition chimique, dans la dureté et l'imperméabilité de leur
pâte, les caractères de la seconde classe. Dans certaines fabriques locales, en petit nombre,
dispersées sur des points très divers, l'emploi de terres particulières, telles que les donnait le sol
de la localité, a produit de véritables grès-cérames. Mais le fait reste toujours exceptionnel. Nulle
part cette fabrication ne paraît, dans l'antiquité, s'être développée sur une grande échelle. Surtout
elle a été alors purement fortuite, résultant des qualités naturelles de l'argile employée, non pas
voulue et calculée. Les anciens ne se sont certainement jamais rendu compte que la combinaison
rationnelle et calculée de certains éléments dans la confection des pâtes permettait de produire
à volonté des poteries de cette espèce.
 
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