Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Hinweis: Ihre bisherige Sitzung ist abgelaufen. Sie arbeiten in einer neuen Sitzung weiter.
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 8.1882 (Teil 2)

DOI Artikel:
Yriarte, Charles: A propos d'un tableau attribué au Giorgione: Exposition des Old Masters, à Londres
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.19459#0082

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
A PROPOS D'UN TABLEAU ATTRIBUÉ AU GIORGIONE.

65

C'est une mode, presque un affolement, et si nous nous trouvons, dans une fresque ou dans un
panneau des maîtres du temps, en face de personnages vivants, de figures historiques, échos
précieux du monde d'alors, nous les voyons naïvement mêlés, dans leurs costumes, à des scènes
de la Bible ou de l'antiquité. Il en sera de même en Italie pendant encore un siècle.

De tous les peintres vénitiens du temps, c'est le Giorgione qui répugne le plus à se fixer sur
un fait. Il généralise, il élève, il embrasse l'humanité clans son ensemble, il peint les rois, les
bergers, les martyrs, les dieux et les guerriers, il évoque des êtres de raison, mais jamais, au
grand jamais, ce fantaisiste, ce poète, ce coloriste, ne fixe sa pensée sur un fait spécial, et surtout
à la demande de tel ou tel seigneur, de tel ou tel prince. Tout au plus Jera-t-il un jour un
portrait dont plus tard nous aurons peine à déterminer l'original.

D'ailleurs, il faut convenir que quand une famille commande à un artiste la représentation
d'un fait historique qui se rapporte à quelqu'un de ses ancêtres ou de ses contemporains, elle
désigne généralement un fait qui l'honore et non un épisode peu à sa louange; et, de la façon
dont j'ai peint ces Malatesta dans Un Condottiere au xvie siècle, d'après leur propre correspondance,

on doit penser que, si un peintre s'était permis de les représenter au vif en cette circonstance, il
n'eut pas continué longtemps son métier de moraliste.

Si vous détruisez les arguments un à un, si vous contestez l'authenticité du sujet, vous ne
pouvez nier cependant qu'il y ait là une intention très particulière; le personnage principal pose
devant le public, il n'est pas dans l'action; et le fait de présenter un crâne à un couple amoureux
qui s'ébat dans un délicieux paysage constitue au premier chef une intention définie.

Je ne nie point qu'il y ait là un portrait dont je ne connais pas l'original, mais je dis :
nous sommes tout simplement en face d'un de ces Mémento mori si fréquents en Italie à cette
époque. C'est l'affirmation de l'idée chrétienne, l'application fantaisiste, à la façon italienne, du
Respice finem de l'école allemande; c'est l'influence germanique, la mélancolie allemande qui
font irruption en Italie, c'est aussi la revanche contre le paganisme des humanistes, l'idée
d'éternité, de la mort présente, l'idée de morale symbolisée au chevet du lit de chaque famille de
ce temps, ou clans le cabinet de travail. Et cette idée se fait jour sous toutes les formes ; comptez
les crânes de marbre, d'ivoire, de buis, d'ébène à dents d'ivoire qui nous restent de cette époque.
Voici celui que ce même Sigismond Malatesta a constamment devant les yeux dans son Studio;
depuis Durer jusqu'à Domenico Feti, tous les artistes ont sacrifié à cette idée, et quand un
maître vénitien évoque l'image de la mort au milieu des splendeurs de la vie, sa façon de dire
 
Annotationen