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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 1)

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Mannheim, Jules: L' exposition rétrospective d'objets d'art français au palais du Trocadéro, [3]
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https://doi.org/10.11588/diglit.25869#0134

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[ 20

L’ART.

qu’il y eût pour cette raison de la faïence proprement dite,
c’est-à-dire une terre à émail stannifère; de plus, on trouve
des Glérissy à Marseille, des Viry à Moustiers, et récipro-
quement, ce qui n’embrouille pas peu la question; aussi
les avons-nous mis, en attendant, dans l’ordre alphabé-
tique.

A Moustiers, nous sommes en présence de deux genres
bien distincts :

Le camaïeu bleu avec le style de Tempesta, d’abord,
puis de Bérain, de Toro, etc., qui se prolonge jusqu’au
milieu du xviii0 siècle; tels sont : un plat, à M. Antiq, à
sujets de chasse, d’après Tempesta, avec l’inscription :
G. Viry f. à Moustiers che\ Clerissy, et un plat d’après
Bérain, à M. du Sartel ;

Le polychrome avec la couleur orangée comme domi-
nante, qui apparaît au milieu du xviii0 siècle et que pra-
tiqua surtout Joseph Olery, genre qui, transplanté de
toutes pièces à Alcora, en Espagne, rend très difficile la
distinction des produits des deux fabri-
ques. Tels sont : un plat à barbe, où
nous assistons au Triomphe d’Amphi-
trite, à M. du Sartel, et des légumiers,
fontaine, bottes à fards, etc.

Après Moustiers, vient Lille, dont
la première manufacture, fondée par
Jacques Febvrier, remonte à 1676:
l’Exposition n’en comptait qu’une as-
siette datée de 1767 seulement, portant
sur une banderole le nom de Maitre
Daligné, vainqueur sans doute de
quelque concours dont un service de
vaisselle aurait été le prix.

M. Ploquin avait envoyé une assiette
aux armes des Molé, en 1730 ; c’est un
spécimen de la fabrique fondée à Bor-
deaux par Jacques de Hustin, fabrique
qui reçut en 1720 le titre royal, ce qui
laisse présumer qu’elle était impor-
tante, mais dont cependant il ne reste
que très peu de pièces.

De Sceaux, dont le premier atelier
est de 1747, Mme la comtesse d’Yvon avait
prêté un pot à eau et sa cuvette, déco-
rés d’amours et d’une scène galante en
camaïeu rose; M. Ploquin, deux porte-
bouquets avec vues de port de mer ;

Mme Gille, une jardinière ornée
d’amours en camaïeu rose, toutes pièces dans lesquelles
on sent le désir brûlant, à l’époque, de copier la porcelaine
de Saxe.

Enfin, Niderwiller, dont la faïencerie remonte à 1754,
avec le baron de Beverlé, un Strasbourgeois, était repré-
senté par un plateau, à M. Ploquin, simulant le bois avec
un trompe-l’œil blanc, à port de mer, spécialité de cette
fabrique qui, à part ce genre, se borna à contrefaire le
Strasbourg ou le Saxe, sous Lanfrey et le général Custine.

Si l’Exposition ne comptait pas d’exemples des tout
premiers essais de porcelaine tendre de Claude Révérend,
à Paris, en 1664'; de Louis Poterat, à Rouen, en 1673, la
série des pâtes tendres françaises n’en était pas moins une
des plus réussies du Trocadéro.

Nous y trouvons du Saint-Cloud, fabrique qui est la
troisième en date et qui nous reporte aux environs de l’an-
née 1695, ce qui est déjà très satisfaisant comme époque,
bien que ses produits légèrement jaunâtres de ton se ren-
contrent assez fréquemment. Il va sans dire que tous les
échantillons des premières périodes sont de style chinois,
attestant l’ardeur des porcelainiers à donner le change aux

j clients sur la pâte dure de Chine qu’on ne savait pas encore
reproduire, mais qu’on s’efforçait d’imiter; ainsi, deux
petits cache-pots, au marquis de Thuisy, offrent sur leur
pourtour des personnages chinois.

Une tasse avec soucoupe, à M. Beurdeley, signée
S1 C. T. (Saint-Cloud. Trou — Henri et Gabriel Trou
furent les directeurs de la fabrique après Jean Chican-
neau, leur frère utérin), est décorée de fleurs et d’oiseaux
dans le goût chinois, et de même des autres pièces.

Passant sur l'usine de Lille fondée en 1713, parles
frères Doré, nous voici à Chantilly dont les débuts remontent
à Ciquaire Cirou, en 1725, sous la protection du prince
Louis-Henri de Condé. Ici, ce que l’on avait en vue c’était
l’imitation des fines poteries du Japon, celles que dans les
anciens catalogues on appelle première qualité du Japon,
et que les travaux de MM. Bing et Gonse ont permis de
désigner par leur lieu d’origine; puis, ce fut la copie des
porcelaines de Saxe, enfin plus tard de Mennecy et de
Sèvres.

De ces diverses catégories, voici, à
M. Gérard, un vase pot-pourri orné de
couronnes de fleurs, marqué du cor de
chasse, et une assiette en camaïeu bleu,
au chiffre du duc de Penthièvre, mar-
quée de même avec les mots Villers-
Cotterets; au marquis de Thuisy. une
assiette avec une chasse au sanglier
en couleurs, la même marque et la
lettre R, etc.

De Chantilly, l’ordre des temps
nous amène à la manufacture du duc
de Villeroy, à Mennecy près d’Essonnes,
fondée en 1735 par François Barbin :
si, dans les commencements, elle cher-
cha à contrefaire les produits de Saint-
Cloud et de Chantilly, elle ne tarda pas
à abandonner cette voie inféconde pour
suivre les errements des usines de Saxe
£t de Sèvres, et nous n’hésitons pas à
affirmer qu'elle y réussit d’une façon
magistrale et devint une sérieuse rivale
pour l’établissement royal.

Les produits de Mennecy étaient
nombreux à l’Exposition et il en est
parmi eux des plus remarquables, tant
par la finesse des peintures et l’harmo-
nie des tons, que par l’élégance des
formes : tels sont un très joli pot à eau et sa cuvette à
fleurs et à vues de ports de mer, appartenant à Mmc Gille
et marqué du D. V. ordinaire; deux écuelles offrant des
oiseaux et des jeux d’amours, à M. du Sartel; une tasse
avec oiseaux de style chinois, à M. Gasnault, et beaucoup
d’autres des divers tvpes de Mennecv et qu’il faudrait tous
citer, si l’on ne voulait choisir que les plus beaux.

il est curieux à examiner le circuit de la pâte tendre en
France : partis de Paris, les porcelainiers semblent
craindre d’y rentrer et se contentent d’en faire le tour : au
bout de quatre-vingts ans environ, les frères Dubois rebu
tés à Saint-Cloud, ayant échoué à Chantilly, s en rap-
prochent le plus en venant poursuivre à Vincennes, en
1740, le cours de leurs insuccès qui reportent à 1745 la
fondation effective de la manufacture royale par Gravant,
un de leurs ouvriers, sous le nom de Charles Adam, et ce
n’est que sous Louis XVI, avec la pâte dure, qu’ils se ris-
queront décidément dans les murs de la capitale.

De Vincennes, signalons seulement une théière présen-
tant une vue de ville en couleurs, marquée au point,
appartenant au marquis de Thuisy, et arrivons à Sèvres,

Vase

en ancienne porcelaine tendre de Sèvres (1758),
appartenant à M,,e Grandjean.

Dessin de J. Hugard.

(Exposition Universelle de 188g.)
(Section rétrospective d'objets d’art français.)
 
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