Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 1)

DOI Artikel:
Rocheblave, Samuel: L' œuvre gravé de Caylus: description de l'œuvre gravé de Caylus - sa valeur artistique, son sens et sa portée
DOI Artikel:
Molinier, Émile: Les candélabres de bronze fondus par Annibale Fontana pour la chartreuse de Pavie
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.25869#0154

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
LES CANDÉLABRES DE BRONZE.

Ne nous y méprenons pas : c’est ce sens, cet amour de la
grande tradition classique qui a créé le titre le plus essen-
tiel de Caylus à la reconnaissance de l’Académie. Il lui a

i3g

dicté son choix '. Caylus ne fut point en peine de le justi-
par la suite 3.

Samuel Rocheblave.

LES CANDÉLABRES DE BRONZE

FONDUS PAR ANNIBALE FONTANA POUR LA CHARTREUSE DE PAVIE

Le sculpteur et fondeur milanais Annibale Fontana
(1540-1587) a continué fort avant dans le xvie siècle les belles
traditions des bronziers du xve et de la première moitié du
xvie siècle; mais, malheureusement pour lui, il est venu
trop tard à notre goût, ce qui fait qu’aujourd’hui on lui
marchande les regards tant soit peu distraits que l’on jette
en passant sur les beaux candélabres dont il a enrichi
l’église déjà si magnifique de la Chartreuse de Pavie.
Auprès des bronziers padouans ou vénitiens, il apparaît
en quelque sorte comme un déshérité; il mérite pourtant
une meilleure place ainsi qu’on s’en peut convaincre par
l’image que nous donnons ici, ainsi qu’on peut s’en
assurer aussi à San Celso, à Milan. Contemporain de
Leone L.eoni, Fontana n’a pas, il est vrai, eu autant de
talent ni de célébrité que lui, et il a toujours montré un
goût plus douteux aussi, bien que le premier ne soit pas
à l’abri de tout reproche. Comme son contemporain, il a
été préoccupé par le style de Michel-Ange, modèle dan-
gereux, et il a tenté de se l’approprier; mais comme
tous les copistes, bien entendu, il a exagéré, si l’on
peut s’exprimer ainsi, tous les défauts du maître, sans en
acquérir les qualités géniales. On le ressent trop dans
les figures de sibylles dont il a décoré la façade de San
Celso, bonnes figures, mais maniérées au possible, qui
forment cependant, avec quatre autres prophètes et des
anges, une décoration très riche et très somptueuse que
viennent compléter fort heureusement trois bas-reliefs: la
Nativité, l'Adoration des Mages et la Présentation au
Temple. Ce sont là des œuvres qui mériteraient une étude,
car en somme elles sont considérables et il est surprenant
que l’ensemble des travaux de Fontana, qui est encore fort
prisé en Italie, n’ait pas donné lieu à une étude d’en-
semble; d’autant que chez lui, à côté du sculpteur, point
méprisable du tout, nous trouvons l’étoffe d’un décorateur
de talent ; les festons de fleurs et de fruits, en bronze fondu
et ciselé, disposés au-dessus des portes de San Celso sont
aussi de lui. De lui aussi sont à l’intérieur de la même
église, où se trouve son tombeau, une Vierge ravie au ciel
par des anges, qui, primitivement, devait prendre place sur
le pignon de la façade; sur la base de cette figure est fixée
une plaque d’or ciselé sur laquelle Fontana a figuré une
Pietà. Enfin, un autre bas-relief d’argent, la Mort de la
Vierge, placé à l’une des extrémités de l’autel, est aussi de
lui. Une statue de saint Jean l’Evangéliste et la grille de

il ne fut pas suivi : « Caylus tenta de faire revivre la gravure en
camaïeu, si florissante au xvi9 siècle, et tombée depuis presque
entièrement en oubli. Secondé par Nicolas Lesueur, graveur sur
bois, comme son père et ses oncles, il publia des estampes en clair-
obscur,. mais qui ne peuvent lutter avec celles de Zanetti. (Sur cet
antiquaire, voir dans le Recueil de Bottari ses lettres et celles de
Mariette.) 11 eut l’idée de substituer à la planche de bois destinée aux
contours et aux traits vigoureux, une planche en cuivre gravée à
l’eau-forte, et cette innovation fut malheureuse, car la différence
des travaux en creux sur le métal et en relief sur le bois n’a donné
que des résultats peu harmonieux, effets inévitables de la réunion
mal entendue des hachures nettes et maigres de l’eau-forte et des
teintes larges et molles des tailles d’épargne. )> (Villot, Cabinet de
l’Amateur, IV, n° 10.) Caylus a aussi essayé de la manière noire
(4" vol., f°" 556, 669).

bronze qui ferme le sanctuaire de la même église com-
plètent un ensemble de décoration qui, comme l’a remar-
qué Mongeri dans son Arte a Milano3, prouve complète-
ment les tendances michelangesques de son auteur, et
montre combien il portait d’affection à la paroisse de San
Celso à laquelle il légua tous ses dessins.

Orfèvre, sculpteur et médailleur, car — au dire de
Lomazzo — Fontana fit aussi des médailles, notre artiste
continuait donc complètement les grandes traditions de la
Renaissance. Il avait eu la même éducation artistique que
ses devanciers, et il ne faut pas trop s’en prendre à lui si
les œuvres qu’il a produites ne sont pas d’un style plus
pur et exempt d’emphase, si, en un mot, il appartient à
cette fin de la Renaissance italienne que l’on aurait tort de
dédaigner, car elle est représentée par des hommes comme
Jean Bologne, et en faveur de laquelle se produira tôt ou
tard une réaction. Le jour où l’on sera suffisamment saturé
des primitifs dont on finit par admirer beaucoup plus les
défauts que les incontestables qualités, on reviendra au
xvie siècle et à ses suites pour lesquels on professera sans
doute une admiration d’autant plus déraisonnable, d’au-
tant plus exagérée, que l’oubli non justifié dans lequel on le
tient aujourd’hui aura été plus long et plus méprisant. Ce
jour-là, sans doute, et il n’est peut-être pas aussi éloigné
qu’on le croit généralement, car les extrêmes se touchent,
et l’extrême folie qui nous pousse aujourd’hui à admirer,
comme des œuvres de maîtres, des morceaux d’école ou
des répliques exécutées par de simples manœuvres, nous
conduira rapidement par ses excès mêmes à des sentiments
plus raisonnables. On rendra justice à Fontana, comme à
bien d’autres; on le découvrira comme beaucoup de ses
contemporains trop dédaignés; Dieu veuille qu’on n’aille
pas trop loin et qu’on n’essaie pas alors de nous faire
admirer les œuvres des artistes qui de Michel-Ange n’ont
su prendre que les attitudes et la manière, mais sous la
main desquels les figures sont devenues des mannequins
contorsionnés, drapés dans des loques absolument sans
style ! Beaucoup sans doute de ces sculptures seront écar-
tées, mais celles qui n’ont d’autres prétentions que d’être
décoratives subsisteront toujours ; les candélabres de Pavie
sont de ce nombre; par leurs proportions (1 m. 88 cent,
de haut), ils peuvent être classés parmi les plus considé-
rables œuvres de ce genre qu’a produites la Renaissance :
le candélabre du Santo de Padoue, l’œuvre si célèbre de

1. Les cuivres des dessins du Cabinet du roi, donne's à ce Cabi-
net après la mort de Caylus, sont aujourd’hui déposés à la Chalco-
graphie du Louvre. Ils forment l’ensemble imposant de 22a pièces.
(Détail au Catalogue.) Mais, jusqu’ici, ils ont peu servi. Les repro-
ductions des dessins des maîtres trouvent peu d’acheteurs. Nous
tenons de source certaine que, depuis dix ans, on n’a pas vendu dix
gravures de la collection Caylus. Le goût public est ailleurs, comme
il y a un siècle et demi.

2. On trouvera une étude complète sur la nature et l’importance
du rôle artistique de Caylus dans l’art du xviii” siècle, dans l’ou-
vrage qui va paraître incessamment à la librairie Hachette : Essai
sur le comte de Caylus, l’homme, l’artiste, l’antiquaire, par Samuel
Rocheblave, professeur au lycée Louis-le-Grand, docteur ès-lettres
(ln-8«.)

3. Page 233.
 
Annotationen