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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 1)

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Bessières, Marc: Le musée Frédéric Spitzer et son catalogue, I-IV
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https://doi.org/10.11588/diglit.25869#0183

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LE MUSEE FREDERIC SPITZER ET SON CATALOGUE.

que le Dressoir d’Annecy et maintes autres créations,
l’honneur de ces huchiers lyonnais et bourguignons, qui
furent de vrais artistes. Voici également des tables
Henri II, un Cabinet espagnol en cuir doré de tout pre-
mier ordre, et, partout, disséminés avec un sentiment
décoratif extraordinaire, des majoliques, des marbres,
des bronzes, — il en est de Riccio, il en est de Peter
Visscher, — des bronzes aux magnifiques patines; enfin,
aux larges baies qui prennent jour sur le jardin de l’hôtel,
des vitraux considérables, dont les compositions, dues à
Jean Cousin et traitées en camaïeu, sont d’un grand
caractère.

Il est certain que tout visiteur a peine à s’arracher à
cette vaste salle qui, pour les non-initiés, paraît — à elle
seule ! — constituer toute la collection du maître de céans,
tant les spécimens si variés répartis dans ce Hall sont de
nature à satisfaire les ambitions de l’amateur le plus pas-
sionné, du Curieux le plus raffiné.

Tout cela cependant ne constitue qu’une introduction,
une' fort modeste introduction.

Traversez le palier. En face de vous, de bien autres
prodiges vous réclament dans la succession de galeries,
que termine, que couronne, me permettrai-je de dire, un
Hall aux surprises plus inattendues encore que toutes
celles du cabinet de travail dont vous vous êtes éloigné à
regret.

II ï

La première salle est presque entièrement consacrée à
la Renaissance française. Six vitrines contiennent en grand
nombre des exemplaires de choix de ces fameux émaux
peints de Limoges que l’on se dispute aujourd’hui à des
prix qui paraissent insensés aux seuls profanes, depuis les
compositions d’un style archaïque d’un Nardon Pénicaud,
jusqu’aux peintures plus aimables d’un Jean Pénicaud,
d’un Léonard Limosin, d’un Couly Noylier, d’un Pierre
Reymond ou d’un Jean Courteys. Triptyques, plaques de
toutes formes et de toutes dimensions, portraits, plats,
assiettes, coupes, aiguières ou salières décorent les tablettes
en mariant les tons chauds des émaux polychromes sur
paillon aux teintes laiteuses et plus discrètes des grisailles
rehaussées d’or. Puis, voici, dans une chapelle à part,
sept des pièces de cette énigmatique vaisselle qui a porté
successivement tant de noms différents : les faïences dites
de Henri II, dites d’Oiron et que notre éminent collabo-
rateur, M. Edmond Bonnaffé, a dernièrement baptisées,
avec les plus grandes apparences de raison, de faïences de
Saint-Porchaire. Elles comptent aujourd’hui parmi les plus
grandes raretés de la curiosité; plus coûteuses que les plus
somptueuses orfèvreries, on est trop heureux, lorsqu’on
en trouve, de les payer plus de dix fois, que dis-je ? plus de
vingt fois leur poids en or; mais il faut encore les trouver,
et en posséder sept peut presque passer pour de l’accapa-
rement. Plus loin , Bernard Palissy et ses conceptions
d’une fantaisie quelquefois un peu hasardée trônent avec
une foule de pièces de toutes formes et de toutes couleurs,
quelques-unes absolument uniques, telles que ce beau bas-
relief, épave de la décoration de quelque grotte rustique,
où le potier a personnifié l’Eau, sous la figure d’une nymphe
qu’entourent tous les attributs du domaine de Neptune.

L’orfèvrerie civile, aux tons chatoyants ; la serrurerie,
plus sévère d’aspect, mais fouillée et ciselée à l’instar de
bijoux délicats; enfin, une collection de cuirs ciselés et
estampés, boîtes, coffrets, étuis, boucliers, absolument
unique et telle qu’aucun Musée n’en peut montrer de sem-
blable, complètent cette première salle, préface merveil-
leuse des merveilles suivantes.

Tome XLVIII.

L’ivoire avec ses diptyques, ses bas-reliefs, ses coffrets,
ses groupes et ses figures que l’art du peintre a rehaussés
de vives couleurs, se partage la seconde galerie avec les
plus riches spécimens des buis sculptés et des pierres de
Munich que les artistes allemands du xvie siècle ont
fouillés con amore : médailles et médaillons, coffrets,
miroirs, grains de chapelet chargés de microscopiques
figures montrent chez nos voisins un art et un savoir-faire
dont nous autres Français nous pourrions être jaloux si
nous n’avions tenu la première place au Moyen-Age pour
la sculpture en ivoire et si nos huchiers du xvie siècle
avaient laissé après eux quelque chose à créer dans l’art
difficile du bois sculpté.

L’orfèvrerie religieuse du xiic au xvie siècle déroule
devant nos yeux ses innombrables ustensiles aux formes
gracieuses ou somptueuses ravivées d’émail aux tons vifs,
éclatants et toujours harmonieux. La France occupe
encore le premier rang dans cette série, mais ce n’est pas
sans difficulté qu’on le lui attribue, car l’Italie, l’Alle-
magne et l’Espagne sont en droit de revendiquer leur part
des éloges réservés aux splendeurs des trésors d’église. On
se croirait, un jour de fête, dans la sacristie de quelque
riche cathédrale, alors que toutes les portes des armoires
s’ouvrent par exception et éblouissent les fidèles par l’éclat
des reliquaires, des calices, des châsses, des crosses ou
des statues d’or et d’argent.

Reposons maintenant nos yeux de tant de somptuosité,
sur les fines sculptures en cire colorée, reliefs délicats où
l’amour du réalisme et l’exactitude du portrait poussés
jusqu’aux dernières limites se sont donné libre carrière
au xvie siècle. Arrêtons-nous aussi à cet ensemble considé-
rable de verres églomisés, du xve au xvne siècle, ensemble
sans rival aucun, qui nous initie à toutes les phases des
perfectionnements de cet art exquis de la peinture et de la
dorure sous verre, malheureusement si délaissé aujour-
d’hui.

Si M. Spitzer a voué un véritable culte au Moyen-Age
et à la Renaissance, si ce culte s’est même, pendant long-
temps, montré exclusif, un amateur d’aussi grand goût
devait infailliblement arriver à faire également ses dévo-
tions à l’antiquité, et, dès lors, à ne pas tarder à lui deman-
der de constituer une sorte d’introduction naturelle à son
Musée. Bref, cela ne pouvait manquer de s’imposer à un
tel connaisseur ; à côté des chefs-d’œuvre de l’ère chré-
tienne, il lui fallait des chefs-d’œuvre de l’art grec. Autre-
fois on achetait des marbres antiques ou des bronzes ; les
récentes découvertes des archéologues nous ont dotés d’un
art grec moins encombrant, plus intime et aussi moins
académique, sous forme de terres cuites polychromes, du
faire le plus gracieux, le plus délicat; vous avez nommé
les figures et les groupes de Tanagra et de l’Asie Mineure
qui ont révélé un art grec tout nouveau ; ce sont, en
quelque sorte, aux marbres froids et souvent d’une banale
correction que l’on admirait tant au xvme siècle, ce
qu’étaient les terres cuites de Clodion aux abominables
petits groupes, vrais sujets de pendules la plupart du
temps, dont chaque académicien était tenu, lors de sa
réception, à doter ses collègues. Quelques bronzes sévère-
ment choisis, tous remarquables à divers titres, com-
plètent, dans le Musée Spitzer, une sélection d’antiques
peu nombreuse, mais suffisante pour prouver une fois de
plus que nous autres modernes nous n’avons guère
inventé.

Des marbres d’un travail achevé, quelques beaux
échantillons de ces terres cuites émaillées auxquelles est
résté attaché le nom de leur créateur, le nom de Luca
délia Robbia, des médailles de bronze et [d’argent, des
plaquettes, une suite imposante de bagues et de bijoux

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