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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 1)

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Leroi, Paul: Salon de 1890: introduction, I, [1]; quelqu'un
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https://doi.org/10.11588/diglit.25869#0185

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SALON DE 1889.

167

le Nouveau Dictionnaire d’Économie politique, dirigé par MM. Léon Say et Joseph Chailley.

Depuis Théophile Thoré, depuis mon vieil ami Burger ', à la chère mémoire de qui un des
meilleurs esprits de ce temps, M. Pierre Petroz a consacré un excellent livre 2, on n’a rien écrit
sur l’art de plus substantiel, de plus sain, de plus réellement éloquent, que les sept pages qui
ont suffi à M. Aynard pour condenser merveilleusement le plus difficile des sujets, je dis le
plus difficile, car il n’en est pas qui ait été plus obscurci par la sottise chauvine officielle, par
les phrases creuses débitées de toutes parts en son honneur, sans en excepter la pituite oratoire
dont MM. les directeurs des Beaux-Arts sont affligés à tout propos et hors de propos surtout.

Thoré exigea que sur sa tombe on inscrivit ces seuls mots shakespeariens qui disaient vrai :
He was a man%. Si notre ami était encore de ce monde et qu’il pût lire M. Aynard, il s’écrierait
à coup sûr : He is a mank. Etre quelqu’un, se dégager du reste du troupeau humain par l’élé-
vation de la pensée, par la droiture de l’esprit et l’indépendance du caractère, il n’est pas de
sort plus enviable, à quelque degré de l’échelle sociale qu’on appartienne. M. Aynard compte,
sous tous ces rapports, parmi les plus privilégiés.

La nature de cette revue ne me permet pas d’y faire ce que je ne manquerai pas d’exécuter
fidèlement dans le Courrier de l’Art. Tout numéro du Courrier débutera désormais par un passage

de l’étude du député du Rhône jusqu’à ce que l’État se soit enfin décidé à transporter dans la

pratique chacune des vérités que le président de la Chambre de Commerce lyonnaise met si
admirablement en lumière pour le plus grand bien de la patrie.

Ce que je veux au moins ici, c’est donner à nos lecteurs une idée de l’article du Nouveau
Dictionnaire d’Economie politique, article que tout membre du Parlement, soucieux de ses devoirs,
ne saurait trop lire et relire et que la Direction des Beaux-Arts, si elle se rendait compte de sa
réelle mission, devrait tenir pour Évangile et le prouver par ses actes.

M. Aynard établit « que pour compléter la grande synthèse du vrai, du beau et du bien, il

convient d’y ajouter l’utile, qui représente les nécessités matérielles de la vie. L’utile lui-même
se rapporte au beau, puisqu il contient en lui des éléments d’ordre, d’harmonie, d’agrément, et
que c’est ainsi qu’on a pu dire que la beauté n’était peut-être qu’une harmonie entre la forme et
sa destination. »

Et, plus loin : « Les Beaux-Arts plastiques, architecture, sculpture et peinture, créent des
œuvres matérielles et durables qui font partie du capital universel; la musique à un moindre
degré est également productrice, quand ce ne serait que par les industries nombreuses qu’elle
suscite. La danse seule, quoique représentant un certain travail, ne donne que des résultats
éphémères. La valeur ou l’utilité des Beaux-Arts apparaît en cet autre fait, que le beau augmente
le prix des choses; qu’autrement parler, le beau ajoute du prix au travail. L’idéal économique
de l’industrie serait de faire beau, bien et bon marché, puisque le bon marché est l’expression
de l’utilité la plus largement satisfaite. Mais le bon marché est relatif; le beau imprimé à l’objet,
ou en change justement le prix, ou bien mis en concurrence avec ce qui n’est pas aussi beau,
facilite la vente à prix égal. Enfin, il est à observer que tout objet sorti de la main de l’homme
porte une empreinte d’art; que l’art s’y incorpore à un degré quelconque, depuis l’objet rudi-
mentaire n’en portant que la trace la plus faible et la plus grossière, jusqu’à celui où l’âme d’un
grand artiste fait parler à la matière un langage surhumain. Tout notre travail porte en lui une
parcelle, souvent impondérable, de notre sentiment. On peut donc affirmer que l’art et le travail
sont inséparables; que si le travail est la source de la richesse, l’art ne cesse de l’alimenter. »

De ces prémisses si justes, si complètes dans leur magistrale sobriété, il y a à déduire
certaines conclusions indispensables à la parfaite connaissance de la personnalité de l’auteur.

Je compte parmi mes amis, et je m’honore de compter parmi les meilleurs, un petit nombre
de peintres dont le talent est rehaussé par la dignité du caractère ; ils sont habitués à ne m’en-
tendre parler que le langage de la vérité et seront des premiers, j’en suis certain, à reconnaître

1. Pseudonyme de Théophile Thoré.

2. Un Critique d'art au XIX° siècle.

3. Il fut un homme.

4. U est un homme.
 
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