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Leroi, Paul: Salon de 1890: la peinture
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L’ART.
dont l’effet a été manifestement très cherché, offre je ne sais quoi de morne ; les personnages
semblent figés; on dirait que l’auteur a moins travaillé d’après la nature que d’après des cires
du Musée Grévin. Seul le groupe des trois petites fdles, dont 1 une lit un compliment, présente
quelque intérêt. L’ensemble, d’un aspect dur et peu agréable, produit l'impression d'une sym-
phonie mal orchestrée. Observons d'ailleurs qu'il serait bien difficile de tirer un grand parti
d'une donnée aussi foncièrement ingrate, et qu’une cérémonie officielle n a nul besoin de l'appoint
d’un peintre pour être une chose fort ennuyeuse.
Arrivons à la grande toile de M. René Gilbert. Ge véritable artiste, au tempérament peut-
être plus robuste que fin, se moque assurément beaucoup des fatras et des défroques des vieilles
écoles. Vrai moderne, il cherche à rendre, avec ampleur et énergie, la réalité contemporaine.
Il nous a peint cette année le Départ du ballon « l’Armand Barbés », place Saint-Pierre ; siège
Portrait de M"‘e Caroline Cahen.
Dessin de MUa Beaury-Saurel, d’après son tableau. — (Salon de 1890.)
de Paris, i8jo. La scène, incontestablement, est vue par un œil sain, et traitée par une main
sûre, un pinceau accoutumé aux effets libres et larges. Voici les buttes pelées où serpentent de
maigres végétations; voici les pauvres maisons, entassées et serrées, du vieux Montmartre; un
groupe de matelots escalade la pente, portant des fascines; un homme du peuple, auprès dune
vieille femme en cheveux, regarde le ballon qui s’élève. Au premier plan, un matelot monte la
garde. C’est le morceau le plus savoureux du tableau, ce marin avec son grand col bleu, sa
giberne et son bidon, son béret que surmonte la houppe de laine. Sur l’ensemble de l’œuvre,
sur la perspective, sur la façon dont la scène est plantée et construite, sur les proportions des
maisons, des figures, des objets, du ballon lui-même, il y aurait lieu d indiquer de nombreuses
réserves.
M. Osiris, ayant subi dans sa jeunesse une opération chirurgicale qui a réussi, a, pour con-
sacrer ce souvenir, commandé à M. Édouard Bisson une vaste toile commémorative destinée à
l’hôpital Necker. On connaît les grandes libéralités de ce financier, qui a bâti de ses deniers, rue
L’ART.
dont l’effet a été manifestement très cherché, offre je ne sais quoi de morne ; les personnages
semblent figés; on dirait que l’auteur a moins travaillé d’après la nature que d’après des cires
du Musée Grévin. Seul le groupe des trois petites fdles, dont 1 une lit un compliment, présente
quelque intérêt. L’ensemble, d’un aspect dur et peu agréable, produit l'impression d'une sym-
phonie mal orchestrée. Observons d'ailleurs qu'il serait bien difficile de tirer un grand parti
d'une donnée aussi foncièrement ingrate, et qu’une cérémonie officielle n a nul besoin de l'appoint
d’un peintre pour être une chose fort ennuyeuse.
Arrivons à la grande toile de M. René Gilbert. Ge véritable artiste, au tempérament peut-
être plus robuste que fin, se moque assurément beaucoup des fatras et des défroques des vieilles
écoles. Vrai moderne, il cherche à rendre, avec ampleur et énergie, la réalité contemporaine.
Il nous a peint cette année le Départ du ballon « l’Armand Barbés », place Saint-Pierre ; siège
Portrait de M"‘e Caroline Cahen.
Dessin de MUa Beaury-Saurel, d’après son tableau. — (Salon de 1890.)
de Paris, i8jo. La scène, incontestablement, est vue par un œil sain, et traitée par une main
sûre, un pinceau accoutumé aux effets libres et larges. Voici les buttes pelées où serpentent de
maigres végétations; voici les pauvres maisons, entassées et serrées, du vieux Montmartre; un
groupe de matelots escalade la pente, portant des fascines; un homme du peuple, auprès dune
vieille femme en cheveux, regarde le ballon qui s’élève. Au premier plan, un matelot monte la
garde. C’est le morceau le plus savoureux du tableau, ce marin avec son grand col bleu, sa
giberne et son bidon, son béret que surmonte la houppe de laine. Sur l’ensemble de l’œuvre,
sur la perspective, sur la façon dont la scène est plantée et construite, sur les proportions des
maisons, des figures, des objets, du ballon lui-même, il y aurait lieu d indiquer de nombreuses
réserves.
M. Osiris, ayant subi dans sa jeunesse une opération chirurgicale qui a réussi, a, pour con-
sacrer ce souvenir, commandé à M. Édouard Bisson une vaste toile commémorative destinée à
l’hôpital Necker. On connaît les grandes libéralités de ce financier, qui a bâti de ses deniers, rue