GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
pilent l'ail ou apportent dans des coufies de sparterie des légumes et des
victuailles. Elles sont peintes d'une touche à la fois si moelleuse et si aisée,
ces charmantes créations du jeune maître, qu'en vérité elles nous
apparaissent non comme le résultat d'un effort, d'un travail, mais plutôt
comme une naturelle caresse, quelque chose comme un frais sourire de
ce talent enchanteur.
A Séville, l'émotion fut grande après que Murillo eut achevé ces
premiers ouvrages. Ils lui donnèrent d'ardents admirateurs et les com-
mandes arrivèrent de toutes parts, Avec la réputation vint l'aisance;
Murillo put songer à se marier. Il épousa, en 16A8, doua Beatrix de
Cabrera y Sotomayor, de la ville de Pilas. Cette union, résultat de con-
venances réciproques chez les deux époux, fut heureuse. Un premier
enfant, Gaspar Esteban, leur naquit en 1661. Avec deux autres, une fille
et un garçon, Francisca et Gabriel, nés à quelques années de distance, ce
fut là toute la postérité du maître. Particularité notable, les deux fils,
après que l'aîné se fut essayé un temps à la peinture, entrèrent dans les
ordres, et la fille prit l'habit en 1675, au couvent de la Mère de Dieu, de
Séville. Évidemment l'intérieur de l'artiste dut être des plus pieux.
L'année 1652 marque un nouveau progrès dans le talent de Murillo;
il achève pour le grand cloître des Franciscains une Conception avec un
religieux écrivant sur ce mystère. Ce tableau, donné au couvent par
la confrérie de la Vera Cruz, lui fut payé 2,500 réaux, somme déjà
très-respectable pour l'époque. En poursuivant l'ordre chronologique,
nous arrivons aux commandes de D. Juan Federigui , archidiacre de
Carmona, qui offre, en 1655, au chapitre de la cathédrale, des ouvrages
du meilleur peintre qu'il y eût alors à Séville, pour employer les
termes mêmes de l'acte notarié de cette donation. Ces ouvrages,
acceptés avec empressement par le chapitre, étaient le Saint Isidore
et le Saint Léandre, représentés assis, plus grands que nature, couverts
d'habits pontificaux, et qui sont encore placés dans la sacristie de la
cathédrale1. Cean Bermudez constate que le Saint Léandre est le portrait
du licencié Alonzo de Herrera, apuntador du chœur, et Saint Isidore,
celui du licencié Juan Lopez Talavan. L'un et l'autre sont des morceaux
de premier ordre.
C'est de l'année suivante, c'est-à-dire de 1656, que date le fameux
1. Ces deux tableaux sont reproduits dans la magnifique collection photographique
éditée par M. J. Laurent : tous les chefs-d'œuvre, tous les ouvrages importants ou
simplement intéressants à un point de vue quelconque pour l'étude de l'École espa-
gnole figurent clans cette précieuse collection.
pilent l'ail ou apportent dans des coufies de sparterie des légumes et des
victuailles. Elles sont peintes d'une touche à la fois si moelleuse et si aisée,
ces charmantes créations du jeune maître, qu'en vérité elles nous
apparaissent non comme le résultat d'un effort, d'un travail, mais plutôt
comme une naturelle caresse, quelque chose comme un frais sourire de
ce talent enchanteur.
A Séville, l'émotion fut grande après que Murillo eut achevé ces
premiers ouvrages. Ils lui donnèrent d'ardents admirateurs et les com-
mandes arrivèrent de toutes parts, Avec la réputation vint l'aisance;
Murillo put songer à se marier. Il épousa, en 16A8, doua Beatrix de
Cabrera y Sotomayor, de la ville de Pilas. Cette union, résultat de con-
venances réciproques chez les deux époux, fut heureuse. Un premier
enfant, Gaspar Esteban, leur naquit en 1661. Avec deux autres, une fille
et un garçon, Francisca et Gabriel, nés à quelques années de distance, ce
fut là toute la postérité du maître. Particularité notable, les deux fils,
après que l'aîné se fut essayé un temps à la peinture, entrèrent dans les
ordres, et la fille prit l'habit en 1675, au couvent de la Mère de Dieu, de
Séville. Évidemment l'intérieur de l'artiste dut être des plus pieux.
L'année 1652 marque un nouveau progrès dans le talent de Murillo;
il achève pour le grand cloître des Franciscains une Conception avec un
religieux écrivant sur ce mystère. Ce tableau, donné au couvent par
la confrérie de la Vera Cruz, lui fut payé 2,500 réaux, somme déjà
très-respectable pour l'époque. En poursuivant l'ordre chronologique,
nous arrivons aux commandes de D. Juan Federigui , archidiacre de
Carmona, qui offre, en 1655, au chapitre de la cathédrale, des ouvrages
du meilleur peintre qu'il y eût alors à Séville, pour employer les
termes mêmes de l'acte notarié de cette donation. Ces ouvrages,
acceptés avec empressement par le chapitre, étaient le Saint Isidore
et le Saint Léandre, représentés assis, plus grands que nature, couverts
d'habits pontificaux, et qui sont encore placés dans la sacristie de la
cathédrale1. Cean Bermudez constate que le Saint Léandre est le portrait
du licencié Alonzo de Herrera, apuntador du chœur, et Saint Isidore,
celui du licencié Juan Lopez Talavan. L'un et l'autre sont des morceaux
de premier ordre.
C'est de l'année suivante, c'est-à-dire de 1656, que date le fameux
1. Ces deux tableaux sont reproduits dans la magnifique collection photographique
éditée par M. J. Laurent : tous les chefs-d'œuvre, tous les ouvrages importants ou
simplement intéressants à un point de vue quelconque pour l'étude de l'École espa-
gnole figurent clans cette précieuse collection.