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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 16.1877

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Nr. 2
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Chantelou, Paul Fréart de; Lalanne, Ludovic [Hrsg.]: Journal du voyage du cavalier Bernin en France, [4]
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https://doi.org/10.11588/diglit.21845#0186

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JOURNAL DU VOYAGE DU CAVALIER BERNIN EN FRANGE. 175

du corps qui est imparfait, de sorte qu’elle dégoûte celui même qui en était
amoureux auparavant, comme d’une chose divine,

Au sujet des maisons de France, j’ai dit qu’il n’en avait vu aucune ; qu’il
n’était pas venu pour voir, mais pour travailler. Il a répondu qu’il avait ouï-
dire qu’il s’y était fait de grandes dépenses; que ce n’était pas cela qui faisait
les belles maisons, mais bien cela, montrant le front.

Le vingt-quatrième, il a travaillé à son buste et m’a dit l’après-dinée,
qu’il avait dit à M. Perrault de mander à M. Colbert qu’il ne trouvât pas à
dire qu’étant venu à Paris, comme il a fait, il ne lui eût pas fait l'honneur
de le voir, mais qu’il n’eût daigné venir voir le Roi. Le soir, il n’est point
sorti, ayant six dépêches à faire. M. le cardinal Antoine l’est venu voir, à qui
il a fait voir ses dessins.

Le vingt-cinquième, j’ai donné ordre qu’on amenât le carrosse du Roi, à
huit heures pour aller chez Jabak voir ses dessins, M. Mignard s’étant chargé
de l’avertir. Mais à huit heures un quart, il a envoyé un billet par lequel il a
mandé que Jabak était allé à la campagne. Le Cavalier est demeuré un peu
étonné. Je lui ai dit que Mignard avait tort d’avoir attendu si tard à lui en-
voyer cet avis. Il a répondu : No è suo diffetlo, è délia nazione; non c’è qui
punctualitci1. J’ai réparti que tous n’étaient pas de même. Un peu avant la
réception de ce billet, nous avions discouru de ces dessins, et je lui avais dit
que c’étaient choses estimables, mais que moi qui aimais le dessin, je n’avais
point voulu m’embarquer dans cette curiosité, à cause de la facilité qu’il y a
d’être trompé. Il m’a répondu que l’on l’était aussi en peinture. J’en suis
demeuré d’accord, mais j’ai dit que l’on l’était moins. Il m’a allégué qu’à
Urbin il y avait un tableau de Raphaël, dans un monastère, que les religieuses
avaient été sollicitées diverses fois de vendre; qu’elles ne l’avaient jamais
voulu; qu’enfin quelqu’un ayant fait une plus ardente sollicitation, il l’avait
tiré de leurs mains ; lequel tableau étant depuis porté à Rome, il s’était trouvé
qu’il était moins que médiocre, de qui peut-il être2, et qu’il ne fallait pas
regarder au nom, mais à l’ouvrage. Je lui ai dit, au respect3 du mien, que
ç’avait été un nommé du Laurier4, Français, élève du Guide, qui m’en avait
donné Lavis; qu’il avait dit que le temps était favorable pour l’acheter; que
le cardinal Antoine étant à Bologne, et que, comme il commandait l’armée5
contre le duc de Parme et autres princes ligués, l’on craignait qu’il ne voulût
avoir ce tableau pour une pièce de pain; que c’était un tableau connu et que
le Guide ne voyait jamais qu’à genoux. Le Cavalier a dit qu’en cela, plus
qu’en toute autre chose, il s’assurerait de sa beauté, et comme il avait destiné
la matinée à voir ces dessins de Jabak et que les mesures furent rompues, il a
demandé à venir chez moi6. Il était huit heures et demie. Son fds et Mathie
étaient avec lui.

Il est entré d’abord dans l’antichambre où il a considéré un buste qui a

1. « Ce n’est pas son défaut; c’est celui de la nation. Il n’y a pas ici d’exactitude. »

2. C’est-à-dire : N’importe de qui il fût. — 3. Au respect, à l’égard.

4. Je n’ai rien pu trouver sur ce personnage qui ne figure pas dans Nagler.

5. L’armée papale. — 0. Chantelou demeurait rue Saint-Thomas-du-Louvre.
 
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