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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
LA GROSSE.
Dans la cérémonie de sa consécration, l’évêque reçoit l’anneau et le
bâton pastoral, la crosse. L’anneau le fiance à l’église; la crosse repré-
sente la puissance spirituelle.
On considère dans la crosse : la hampe, la volute et la pointe. Un
sens symbolique a été rattaché à chacune de ces divisions. La forme
droite de la hampe rappelle au prélat la justice, la rectitude dans le
gouvernement. L’enroulement de la volute lui conseille la douceur
envers les âmes pieuses, la bonté qui les attire. Le pied qui se termine
en pointe émoussée est un emblème de juste sévérité, une arme contre
les ennemis de la foi.
L’anneau, le pommeau, le nœud que l’on voit à l’extrémité de la
hampe, à l’endroit où la volute prend naissance, semble provenir des
époques primitives, lorsque la crosse était un bâton court sur lequel le
prélat s’appuyait en tenant le pommeau dans la main. On a cru recon-
naître, dans sa forme sphérique, le symbole de la Divinité.
La crosse entrait aussi dans la cérémonie de la consécration abba-
tiale. Orderic Vital, qui écrivait au xi« siècle, dit que l’investiture des
évêchés et des abbayes se donnait par le bâton pastoral.
Les abbés, d’après certains liturgistes, devaient, lorsqu’ils portaient
la crosse, en tourner la volute vers l’épaule, tandis que les évêques
tenaient la volute dirigée en dehors, vers les assistants. Les monu-
ments figurés viennent à chaque instant donner un démenti formel à cette
théorie.
Vers les derniers temps du moyen âge, on rencontre sur les sceaux
des crosses garnies d’un voile, d’un sudarium, attaché au haut du bâton
près du nœud. Ce linge fin était destiné à s’interposer entre la main du
prélat et la hampe.
Parmi les matières employées dans la confection des crosses, on
remarque : le bois, la corne, l’ivoire, le cristal, le fer, le cuivre, l’argent
et l’or.
Les crosses en bois passent pour très-anciennes. Le métal le plus
en usage était le cuivre que l’on décorait de nielles, d’émaux, de fili-
granes, de pierres précieuses. Les crosses d’argent sont plus rares;
quelques-unes, cependant, existent encore. Le musée de Cluny possède
une crosse en ivoire du plus beau travail : une branche de lierre court
tout le long de la volute dont le centre renferme la Vierge debout, tenant
l’Enfant Jésus et accostée de deux anges. Quant aux crosses revêtues de
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
LA GROSSE.
Dans la cérémonie de sa consécration, l’évêque reçoit l’anneau et le
bâton pastoral, la crosse. L’anneau le fiance à l’église; la crosse repré-
sente la puissance spirituelle.
On considère dans la crosse : la hampe, la volute et la pointe. Un
sens symbolique a été rattaché à chacune de ces divisions. La forme
droite de la hampe rappelle au prélat la justice, la rectitude dans le
gouvernement. L’enroulement de la volute lui conseille la douceur
envers les âmes pieuses, la bonté qui les attire. Le pied qui se termine
en pointe émoussée est un emblème de juste sévérité, une arme contre
les ennemis de la foi.
L’anneau, le pommeau, le nœud que l’on voit à l’extrémité de la
hampe, à l’endroit où la volute prend naissance, semble provenir des
époques primitives, lorsque la crosse était un bâton court sur lequel le
prélat s’appuyait en tenant le pommeau dans la main. On a cru recon-
naître, dans sa forme sphérique, le symbole de la Divinité.
La crosse entrait aussi dans la cérémonie de la consécration abba-
tiale. Orderic Vital, qui écrivait au xi« siècle, dit que l’investiture des
évêchés et des abbayes se donnait par le bâton pastoral.
Les abbés, d’après certains liturgistes, devaient, lorsqu’ils portaient
la crosse, en tourner la volute vers l’épaule, tandis que les évêques
tenaient la volute dirigée en dehors, vers les assistants. Les monu-
ments figurés viennent à chaque instant donner un démenti formel à cette
théorie.
Vers les derniers temps du moyen âge, on rencontre sur les sceaux
des crosses garnies d’un voile, d’un sudarium, attaché au haut du bâton
près du nœud. Ce linge fin était destiné à s’interposer entre la main du
prélat et la hampe.
Parmi les matières employées dans la confection des crosses, on
remarque : le bois, la corne, l’ivoire, le cristal, le fer, le cuivre, l’argent
et l’or.
Les crosses en bois passent pour très-anciennes. Le métal le plus
en usage était le cuivre que l’on décorait de nielles, d’émaux, de fili-
granes, de pierres précieuses. Les crosses d’argent sont plus rares;
quelques-unes, cependant, existent encore. Le musée de Cluny possède
une crosse en ivoire du plus beau travail : une branche de lierre court
tout le long de la volute dont le centre renferme la Vierge debout, tenant
l’Enfant Jésus et accostée de deux anges. Quant aux crosses revêtues de