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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
gauche de deux boucliers ou baccinelle, en relief de stuc, avec can-
nelures dorées convergeant au médaillon central ; et, au dessous
des boucliers, une console de stuc saille, destinée à recevoir un buste.
C’est l’ornement typique dont le principe, emprunté à l’antiquité
par Jules Romain, est appliqué partout où celui-ci a présidé à la
décoration ; il domine à la Reggia de Mantoue, au palais du T, et
dans d’autres monuments de Sabbioneta. L’espace, aux deux extré-
mités de la paroi, est rempli par de longs trophées, peints à fresque,
suspendus par un nœud de rubans. Toute cette frise est limitée par
une longue guirlande de Heurs posées à plat.
On remarquera, dans les dessins à l’appui, que des huit consoles
placées sous les baccinelle qui décorent les quatre parois, cinq seu-
lement portent des bustes, d’aspect empâté, lourds, ternes, peints
grossièrement d’un ton vert antique, mais d’un ciseau hardi ; si on
les regarde de près, on reconnaîtra là les vestiges des équestres
mutilés par les barbares, sauvés, en 18i0, d’une destruction inévi-
table par le chanoine Perazzi et par le conseil municipal. Le rôle que
jouent ici ces bustes de bois, l'effet qu’ils produisent, montrent claire-
ment que, si les consoles que les décorateurs du xvi° siècle disposaient
aux bases de ces boucliers concaves restaient la plupart du temps
vides, elles pouvaient aussi parfois recevoir des bustes de bronze, de
marbre ou de stuc. L’exemple le plus célèbre de ce genre de déco-
ration, si répandu depuis, est la salle des Capitaines de la Reggia de
Mantoue. Nous n’hésitons pas à croire que toutes les consoles de la
salle où nous sommes devaient, au temps de Vespasien, supporter
des motifs de cette nature, aujourd'hui dispersés ou détruits.
11 faut s’arrêter ici devant le plafond, le plus riche et le plus
complet des dix ou douze qui ornent le palais ducal. Le champ,
qui mesure 10"1 75 sur 10m 40, est coupé sur les quatre faces en
trois parties égales par deux poutres entrecroisées, très saillantes,
formant neuf caissons réguliers et assez profonds. Chacun de ces
compartiments, qui mesure quatre mètres, porte au centre, comme
motif de décoration, une des armoiries ou des imprese de la maison
ducale. Au milieu, ce sont les armes des Colonna, dont se réclame
Vespasien par sa mère Isabelle : la colonne flanquée de deux génies
ailés en pied, dans un cadre circulaire inscrit dans un double carré.
Les quatre compartiments, aux quatre sommets des deux axes, mon-
trent, encadrées dans une bordure octogone, les foudres aux doubles
ailes forgées par les Cyclopes pour Jupiter, empruntées à T aïeul Gian
Francesco ; et, aux caissons des quatre angles, s’étale l’écusson
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gauche de deux boucliers ou baccinelle, en relief de stuc, avec can-
nelures dorées convergeant au médaillon central ; et, au dessous
des boucliers, une console de stuc saille, destinée à recevoir un buste.
C’est l’ornement typique dont le principe, emprunté à l’antiquité
par Jules Romain, est appliqué partout où celui-ci a présidé à la
décoration ; il domine à la Reggia de Mantoue, au palais du T, et
dans d’autres monuments de Sabbioneta. L’espace, aux deux extré-
mités de la paroi, est rempli par de longs trophées, peints à fresque,
suspendus par un nœud de rubans. Toute cette frise est limitée par
une longue guirlande de Heurs posées à plat.
On remarquera, dans les dessins à l’appui, que des huit consoles
placées sous les baccinelle qui décorent les quatre parois, cinq seu-
lement portent des bustes, d’aspect empâté, lourds, ternes, peints
grossièrement d’un ton vert antique, mais d’un ciseau hardi ; si on
les regarde de près, on reconnaîtra là les vestiges des équestres
mutilés par les barbares, sauvés, en 18i0, d’une destruction inévi-
table par le chanoine Perazzi et par le conseil municipal. Le rôle que
jouent ici ces bustes de bois, l'effet qu’ils produisent, montrent claire-
ment que, si les consoles que les décorateurs du xvi° siècle disposaient
aux bases de ces boucliers concaves restaient la plupart du temps
vides, elles pouvaient aussi parfois recevoir des bustes de bronze, de
marbre ou de stuc. L’exemple le plus célèbre de ce genre de déco-
ration, si répandu depuis, est la salle des Capitaines de la Reggia de
Mantoue. Nous n’hésitons pas à croire que toutes les consoles de la
salle où nous sommes devaient, au temps de Vespasien, supporter
des motifs de cette nature, aujourd'hui dispersés ou détruits.
11 faut s’arrêter ici devant le plafond, le plus riche et le plus
complet des dix ou douze qui ornent le palais ducal. Le champ,
qui mesure 10"1 75 sur 10m 40, est coupé sur les quatre faces en
trois parties égales par deux poutres entrecroisées, très saillantes,
formant neuf caissons réguliers et assez profonds. Chacun de ces
compartiments, qui mesure quatre mètres, porte au centre, comme
motif de décoration, une des armoiries ou des imprese de la maison
ducale. Au milieu, ce sont les armes des Colonna, dont se réclame
Vespasien par sa mère Isabelle : la colonne flanquée de deux génies
ailés en pied, dans un cadre circulaire inscrit dans un double carré.
Les quatre compartiments, aux quatre sommets des deux axes, mon-
trent, encadrées dans une bordure octogone, les foudres aux doubles
ailes forgées par les Cyclopes pour Jupiter, empruntées à T aïeul Gian
Francesco ; et, aux caissons des quatre angles, s’étale l’écusson