LE LOTUS DANS L’ARCHITECTURE ÉGYPTIENNE
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Fis. 6
ou comme leurs ascendants plus directs du moyen âge, de regarder
les trésors que la nature prodigue sous leurs pieds en pure perte !
La floraison luxuriante du chapiteau gagne peu à peu la colonne,
et c’est ainsi que se réalise la colonne fasciculée,
réunissant plusieurs tiges en un groupe, — comme
les colonnettes massées autour des gros piliers
gothiques, — et présentant l’aspect d’une plante
qui sort du sol. Il était naturel que cette combi-
naison, représentée dans les ruines les plus célè-
bres, frappât davantage l'attention des voyageurs
et qu’on prêtât aux plus anciens architectes de
l'Egypte l’idée de la colonne-plante à tiges mul-
tiples, élevant dans les airs sa couronne de ver-
dure et de fleurs. Mais M. G. Foucart rétablit les
1 1 faits, grâce à une chronologie plus exacte : c’est
d’en haut que la végétation est descendue, gagnant jusqu’à la base
du fût et y installant des garnitures de feuillage et de fleurs qui rap-
pelaient la décoration du chapiteau.
Ajoutons d’ailleurs que la division du fût en plusieurs tiges
remonte très haut dans l’histoire, car on le constate déjà sur le cha-
piteau d’Abousir, qui est de la ve dynastie. Nous devons savoir grand
gré à l’auteur d’avoir publié à nouveau et d’une façon définitive un
monument qui n’était jusqu’alors connu que par des croquis tout
à fait insuffisants et inexacts. Nous pouvons admirer maintenant, dans
la majesté et la simplicité saine de ses formes, un des plus beaux et
un des plus anciens chapiteaux que l’art
égyptien ait produits. Sans aucun rap-
port avec les chapiteaux grecs et for-
mant avec eux un contraste parfait, il
est cependant issu des mêmes principes,
du souci d’imiter la nature sans la copier
servilement, de plier le réel aux con-
ventions de l’art, de styliser le végétal
et de lui donner la rigidité nécessaire
pour s’accommoder aux lignes architec-
turales, enfin de créer un galbe à la fois
élégant et robuste, de produire une im-
pression d'élancement et de force. C’est du plus grand art, et cet art a
mis sa marque jusque dans le pieux scrupule du détail, dans l’espèce
de dévotion avec laquelle le sculpteur a ciselé les fines nervures
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ou comme leurs ascendants plus directs du moyen âge, de regarder
les trésors que la nature prodigue sous leurs pieds en pure perte !
La floraison luxuriante du chapiteau gagne peu à peu la colonne,
et c’est ainsi que se réalise la colonne fasciculée,
réunissant plusieurs tiges en un groupe, — comme
les colonnettes massées autour des gros piliers
gothiques, — et présentant l’aspect d’une plante
qui sort du sol. Il était naturel que cette combi-
naison, représentée dans les ruines les plus célè-
bres, frappât davantage l'attention des voyageurs
et qu’on prêtât aux plus anciens architectes de
l'Egypte l’idée de la colonne-plante à tiges mul-
tiples, élevant dans les airs sa couronne de ver-
dure et de fleurs. Mais M. G. Foucart rétablit les
1 1 faits, grâce à une chronologie plus exacte : c’est
d’en haut que la végétation est descendue, gagnant jusqu’à la base
du fût et y installant des garnitures de feuillage et de fleurs qui rap-
pelaient la décoration du chapiteau.
Ajoutons d’ailleurs que la division du fût en plusieurs tiges
remonte très haut dans l’histoire, car on le constate déjà sur le cha-
piteau d’Abousir, qui est de la ve dynastie. Nous devons savoir grand
gré à l’auteur d’avoir publié à nouveau et d’une façon définitive un
monument qui n’était jusqu’alors connu que par des croquis tout
à fait insuffisants et inexacts. Nous pouvons admirer maintenant, dans
la majesté et la simplicité saine de ses formes, un des plus beaux et
un des plus anciens chapiteaux que l’art
égyptien ait produits. Sans aucun rap-
port avec les chapiteaux grecs et for-
mant avec eux un contraste parfait, il
est cependant issu des mêmes principes,
du souci d’imiter la nature sans la copier
servilement, de plier le réel aux con-
ventions de l’art, de styliser le végétal
et de lui donner la rigidité nécessaire
pour s’accommoder aux lignes architec-
turales, enfin de créer un galbe à la fois
élégant et robuste, de produire une im-
pression d'élancement et de force. C’est du plus grand art, et cet art a
mis sa marque jusque dans le pieux scrupule du détail, dans l’espèce
de dévotion avec laquelle le sculpteur a ciselé les fines nervures