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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Per. 19.1898

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Nr. 5
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Rod, Édouard: L' atelie de M. Rodin
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https://doi.org/10.11588/diglit.24683#0444

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

422

La première me paraît illusoire, la seconde trop technique. Pour-
tant, si la seconde ne contient pas toute la vérité, il est certain
qu’elle en approche davantage.

Quoiqu'il en soit, c’est le désir d’étudier le mouvement quia
poussé d’abord M. llodin à entreprendre une grande composition,
comprenant des motifs nombreux et variés. L'Enfer, la seule des trois
cantiche de la Divine Comédie qu'il connût alors, et la seule qu’il
connaisse encore aujourd’hui, lui parut répondre à son désir d’a-
tiste. Car il y a, dans ce rêve grandiose et tragique du plus grand des
poètes modernes, toutes les attitudes, toutes les passions, toutes les
douleurs, en un mot tous les mouvements. Les motifs abondent,
fournis par les principaux épisodes, et, plus encore, suggérés par les
indications ou les descriptions du terrible voyage. Seulement, nous
touchons ici à la question si souvent débattue des limites de l'art et de
la poésie : l’artiste se trouve aux prises avec des difficultés maté-
rielles que le poète ne connaît pas. Il ne dispose que d’un espace
limité; son œuvre doit avoir des dimensions déterminées ; il ne peut
point s’élever librement dans tous les sens. De là, la nécessité de
bien des sacrifices; de là aussi, en quelque sorte, l’obligation de
s’affranchir du guide et du maître, de chercher, non pas à illustrer
son poème, mais à y puiser des motifs indépendants. Et je ne sais
rien de plus curieux que de suivre, à ce point de vue, le travail de
M. llodin. La publication de ses nombreux croquis nous en livre le
secret : ce somptueux ouvrage est donc un document de premier ordre,
où ceux qui s’intéressent à ce problème plein de mystère, la forma-
tion d’une œuvre d’art, pourront puiser les renseignements les plus
abondants, les plus décisifs et, si l’on peut dire, les plus confidentiels.

La première intention de M. llodin était, naturellement, de s’en
tenir à peu près au texte, ou du moins de le serrer d’aussi près que
possible. Et, dans le fait, le texte lui fournissait des motifs admi-
rables, tels qu’aucune inspiration n’en saurait concevoir de plus puis-
sants ni de plus variés. C’était, pour en citer quelques-uns parmi les
plus frappants, le tribunal où « siège l’horrible Minos en grinçant des
dents ; iL examine les fautes de ceux qui entrent ; il les juge et, par le
mouvement de sa queue, indique leur condamnation ». C’était le pas-
sage de cette bu fera, de la trombe infernale qui emporte les âmes des
luxurieux. C’étaient des monstres comme la Fortune, Géryon ou le
Minotaure, des démons aux formes infiniment variées, les Centaures,
les Furies. Et puis, toute la troupe serrée des damnés, tordus dans
leurs étranges supplices, contorsionnés dans toutes les poses et dans
 
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