Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Monatshefte für Kunstwissenschaft — 1. Halbband, Heft 1 - 6.1908

DOI issue:
Heft 4
DOI article:
Réau, L.: L'art allemand dans les Musées français
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.70400#0264

DWork-Logo
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
256

Monatshefte für Kunstwissenschaft

Ce tableau formait le panneau central d'un triptyque dont les volets ont malheu-
reusement disparu. II presente une forme cruciale, suivant un usage tres repandu au
XVe siede pour les sujets empruntes ä l'histoire de la Passion. On sait que la fameuse
Deposition de croix de Rogier van der Weyden, qui etait ä en juger par ses nom-
breuses repliques l'une des ceuvres les plus populaires de l'Ecole flamande, presente la
meme disposition. Il est certain que le maitre colonais a connu le tableau de Rogier;
car nous savons que les ceuvres de J. van Eyck et de Rogier ont ete importees de
bonne heure ä Cologne et les deux compositions presentent entre elles des analogies
frappantes. Cependant le maitre colonais de la Deposition de croix n'est pas un
imitateur servile. La fa^on dont il groupe ses personnages autour du corps inerte du
Crucifie a quelque chose de moins monumental et de moins sculptural que dans l'ceuvre
de son devancier. En revanche les groupes sont plus pittoresques, les attitudes plus
familieres, non sans un soupqon de mievrerie, comme dans la plupart des ceuvres de
la fin du XVe siecle. La grande inferiorite du Maitre de S ' Barthelemy vis-a-vis de
Rogier, c'est qu'il ne possede ä aucun degre le sens de la vie interieure; il rapetisse
les sujets tragiques et pathetiques par un manque choquant de gravite et de simplicite.
La Madeleine gantee qui soutient d'une main la jambe du Sauveur n'est qu'une bour-
geoise contrite qui songe moins ä son deuil qu'ä sa toilette. Mais toutes ces defaillances
sont compensees par 1'habilete de la mise en scene et la magnificence du coloris. Les
tons chauds des chairs et des etoffes, les degradations subtiles de couleurs, la tonalite
generale ambree qui harmonise l'eclat des tons locaux, sont une veritable joie pour
l'ceil. Les ombres glacees sur fond d'or donnent ä cette ceuvre peinte l'aspect somptueux
d'un coffret de laque ou d'un email.
Par suite de quelles circonstances ce tableau qui est avec la Veronique attribuee
ä Maitre Wilhelm et le Dombild de Stefan Lochner, le chef-d'ceuvre le plus precieux
de l'Ecole colonaise, est-il venu s'egarer au Musee du Louvre? Si etrange que cela
paraisse, il est probable qu'il a ete peint directement pour une Confrerie d'Antonites de
Paris. En examinant de pres la bordure peinte du tableau qui simule un riche enca-
drement en bois sculpte, on aper^oit le T et la clochette qui symbolisent la confrerie
de Sf Antoine. Les memes emblemes se retrouvent, comme on sait, dans l'admirable
retable du Musee de Colmar, qui avait ete commande ä M. Grünewald par le prieur
du Couvent des Antonites d'Isenheim. Quoiqu'il en soit, notre tableau se trouvait au
XVIIe siecle dans une maison professe des Jesuites de la rue Sf Antoine; il fut trans-
porte en 1763 dans l'Eglise du Val de Grace et incorpore aux collections du Louvre
sous Napoleon Ier.
Pourquoi faut-il que ce chef-d'ceuvre de l'Ecole colonaise soit deshonore par un
cadre hideux? Le tableau presentait ä l'origine, comme nous l'avons dit, la forme
symbolique d'une croix. Le souvenir de cet usage se perdit et on eprouva plus tard
le besoin de ramener cette forme singuliere et un peu deconcertante ä un carre regulier,
en inserant aux angles superieurs du tableau deux petits rectangles en bois dore,
decores pour comble de mauvais goüt de palmes entrelacees et de couronnes d'epines.
Le style de cet encadrement nous permet de deviner que cet embellissement est l'ceuvre
 
Annotationen