L' art: revue hebdomadaire illustrée (12.1886 (Teil 1))

LES PLAQUETTES DE LA RENAISSANCE

italiennes peut aussi, en général, s'appliquer à celles-là.
Elles suivent les mêmes règles, et leur origine, comme
leur développement, ont des traits communs ; comme les
plaquettes italiennes, on y trouve des reproductions de
gravures célèbres ; telle est par exemple la plaquette
représentant Y Enlèvement d'Amymone, d'après la célèbre
gravure d'Albert Durer. Mais, il faut bien l'avouer, si l'on
retranche des plaquettes allemandes ces innombrables
modèles d'orfèvrerie de la seconde moitié du xvic siècle
dont les musées de Munich et de Nuremberg possèdent

L'Enfant Jésus.
Plaquette flamande, xv« siècle. (Musée du Louvre.)

des séries considérables, leur nombre est très restreint.
L'Italie, seule ou à peu près, seule, a produit les vé-
ritables plaquettes du xvc et du xvic siècle; et il faut
encore remarquer que toute l'Italie n'a pas concouru
également à cette fabrication. Près des trois quarts des
plaquettes italiennes appartiennent à l'art du nord de
l'Italie. La Toscane, si riche et si féconde sous le rapport
des autres arts, n'a produit qu'un nombre assez restreint
de fondeurs et de médailleurs, et ces derniers n'apparais-
sent qu'à la fin du xve siècle. C'est là un fait assez

LÉGENDE DU ROI de MeRCIE.

Plaquette allemande du xve siècle. (Collection Louis Courajod.)

étrange, mais dont la vérification est si facile qu'on ne peut
le mettre en doute. Ce qui s'est passé pour les médailles a
eu lieu également pour les plaquettes, et l'on ne se trom-
perait pas de beaucoup en disant que la plaquette est née
à Padoue. Il est vrai que c'est un peu du passage d'un
Florentin à Padoue, de l'immortel Donatello, que date
Pëclosion de ces générations de fondeurs illustres tels que
Bertoldo, Vcllano, Briosco, Cavino, Minello, Mosca ;
mais il faut avouer que le sculpteur florentin avait trouvé
le terrain bien préparé par des artistes du nord de l'Italie,

des Véronais, tels que Vittore Pisano et Matteo de' Pasti.
De Padoue et de Vérone, cette industrie, car la fabrication
de toutes sortes de menus objets de bronze était devenue
une véritable industrie, cette industrie rayonna à Venise,
à Mantoue, à Brescia, à Parme, à Bologne, à Ferrare.
Est-ce à dire que Florence et la Toscane, que Rome
n'aient pas eu aussi leurs orfèvres, leurs sculpteurs, qui
eux aussi ont pu fabriquer des plaquettes ? Non assuré-

LuCRÈCE se POIGNARDANT,

par Moderno. (Musée du Louvre.)

ment ; mais ce que l'on peut affirmer, c'est que jamais à
Florence cette fabrication n'a été aussi prospère que dans
le nord de l'Italie, et la meilleure preuve que l'on puisse
en donner est la naissance dans la plaine du Pô d'un genre
nouveau de décoration architecturale dans lequel l'a pla-
quette joue un rôle prépondérant. D'ailleurs, en dehors
des copies littérales de pierres gravées ou de sculptures
antiques, la plupart des plaquettes portent, à un très haut
degré, tous les caractères de l'art du nord de l'Italie.

Dans la peinture, dans la miniature, dans presque tous
les arts enfin, la plaquette a joué un rôle comme dans la
sculpture. On a cité un portrait de jeune fille attribué à
Sandro Boticelli dans lequel on trouve la reproduction de

Plaque de pommeau d'épée.
Italie, xve siècle. (Musée du Louvre.)

la célèbre pierre gravée de la collection des Médicis,
Apollon et Marsyas, si souvent traduite en plaquette '.
Les miniatures dans l'ornementation desquelles entrent
les pierres gravées, les plaquettes, les médailles antiques
ou de la Renaissance sont extrêmement nombreuses.
Enfin, même dans la sculpture de portrait, on trouve des
exemples de ces imitations. Le buste du jeune Gattame-
lata, au musée du Bargello, à Florence, buste de l'école de
Donatello, porte sur la poitrine l'imitation d'une pierre

i. Eug. Mûntz, les Précurseurs de la Renaissance, p. 196.