L’ÉCOLE HOLLAN
avaient soumis à l’assemblée des États une requête ou
remontrance dans laquelle, « se justifiant du reproche d’in-
novation », ils avaient exposé leur doctrine et réduit « à
cinq articles essentiels le sujet de la controverse ». Leurs
adversaires, quoiqu’ils refusassent de reconnaître l’auto-
rité civile, avaient alors présenté à l’assemblée des Etats
une autre remontrance, et de là étaient venus les noms de
remontrants et de contre-remontrants, qui devaient désor-
mais désigner les partisans de la liberté et ceux de la
grâce.
Les Etats avaient vainement essayé de calmer les
esprits. Ils s’étaient efforcés de décider les deux partis à
DAISE (1609-1688). 15r
renoncer, en attendant la réunion du synode, à toute discus-
sion dogmatique. Ils n’avaient été écoutés ni d’un côté ni
de l’autre. Aussi l’affaire était allée s’aggravant de plus en
plus jusqu’au jour où, à la suite de troubles sérieux, Mau-
rice de Nassau, dont on avait à plusieurs reprises invoqué
l’intervention, avait brisé la résistance des Etats de Hol-
lande et d’Utrecht, fait ouvrir aux orthodoxes la cathé-
drale occupée par les remontrants et triompher la volonté
des Etats généraux.
Ce coup d’Etat avait eu pour conséquences l’installa-
tion de nouvelles régences dans la plupart des villes de
Hollande, la réunion du synode, la condamnation des
La Mise au tombeau,
par Rembrandt. (Pinacothèque de Munich.)
remontrants, la mise en jugement et l’exécution d’Olden
Barneveldt qui, coupable simplement d’avoir défendu le
droit et la liberté de conscience, était accusé d’avoir voulu
« changer la religion et la constitution de l’État pour
remettre les Provinces sous le joug espagnol ». Cepen-
dant Maurice de Nassau, fort indifférent au fond à toutes
ces controverses, n’avait pas abusé du pouvoir dont il
s’était emparé, et, s’il était intervenu dans les affaires de
l’Église et de l’État, ce n’avait été que « pour tempérer
1 esprit de persécution, et pour mettre un terme à ce qu’il
appelait dédaigneusement les misères et les sornettes de
la théologie militante1 ».
1. Daniel Stern, Histoire des commencements delà République
aux Pays-Bas.
Le conflit entre les remontrants et les contre-remon-
trants avait peu à peu perdu de son acuité; mais l’anta-
gonisme avait subsisté. Les calvinistes orthodoxes conti-
nuaient à revendiquer l’indépendance absolue de leur
église à l’égard du pouvoir civil, à réprouver 1e- luxe, les
plaisirs mondains, les concessions faites aux églises dissi-
dentes ou aux opinions individuelles, et ils exerçaient une
influence considérable sur les classes populaires qui
voyaient en eux les ennemi s-nés des aristocraties de tout
ordre.
Les classes éclairées au contraire, nobles ou bour-
geoises, étaient à peu d’exception près disposées à la plus
large tolérance. Quel que fût leur attachement au protes-
tantisme, elles n’envisageaient pas celui-ci comme une
avaient soumis à l’assemblée des États une requête ou
remontrance dans laquelle, « se justifiant du reproche d’in-
novation », ils avaient exposé leur doctrine et réduit « à
cinq articles essentiels le sujet de la controverse ». Leurs
adversaires, quoiqu’ils refusassent de reconnaître l’auto-
rité civile, avaient alors présenté à l’assemblée des Etats
une autre remontrance, et de là étaient venus les noms de
remontrants et de contre-remontrants, qui devaient désor-
mais désigner les partisans de la liberté et ceux de la
grâce.
Les Etats avaient vainement essayé de calmer les
esprits. Ils s’étaient efforcés de décider les deux partis à
DAISE (1609-1688). 15r
renoncer, en attendant la réunion du synode, à toute discus-
sion dogmatique. Ils n’avaient été écoutés ni d’un côté ni
de l’autre. Aussi l’affaire était allée s’aggravant de plus en
plus jusqu’au jour où, à la suite de troubles sérieux, Mau-
rice de Nassau, dont on avait à plusieurs reprises invoqué
l’intervention, avait brisé la résistance des Etats de Hol-
lande et d’Utrecht, fait ouvrir aux orthodoxes la cathé-
drale occupée par les remontrants et triompher la volonté
des Etats généraux.
Ce coup d’Etat avait eu pour conséquences l’installa-
tion de nouvelles régences dans la plupart des villes de
Hollande, la réunion du synode, la condamnation des
La Mise au tombeau,
par Rembrandt. (Pinacothèque de Munich.)
remontrants, la mise en jugement et l’exécution d’Olden
Barneveldt qui, coupable simplement d’avoir défendu le
droit et la liberté de conscience, était accusé d’avoir voulu
« changer la religion et la constitution de l’État pour
remettre les Provinces sous le joug espagnol ». Cepen-
dant Maurice de Nassau, fort indifférent au fond à toutes
ces controverses, n’avait pas abusé du pouvoir dont il
s’était emparé, et, s’il était intervenu dans les affaires de
l’Église et de l’État, ce n’avait été que « pour tempérer
1 esprit de persécution, et pour mettre un terme à ce qu’il
appelait dédaigneusement les misères et les sornettes de
la théologie militante1 ».
1. Daniel Stern, Histoire des commencements delà République
aux Pays-Bas.
Le conflit entre les remontrants et les contre-remon-
trants avait peu à peu perdu de son acuité; mais l’anta-
gonisme avait subsisté. Les calvinistes orthodoxes conti-
nuaient à revendiquer l’indépendance absolue de leur
église à l’égard du pouvoir civil, à réprouver 1e- luxe, les
plaisirs mondains, les concessions faites aux églises dissi-
dentes ou aux opinions individuelles, et ils exerçaient une
influence considérable sur les classes populaires qui
voyaient en eux les ennemi s-nés des aristocraties de tout
ordre.
Les classes éclairées au contraire, nobles ou bour-
geoises, étaient à peu d’exception près disposées à la plus
large tolérance. Quel que fût leur attachement au protes-
tantisme, elles n’envisageaient pas celui-ci comme une