Overview
Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

La chronique des arts et de la curiosité — 1898

DOI Heft:
Nr. 11 (12 Mars)
DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.19746#0104
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
94

LA CHRONIQUE DES ARTS

nous le verrons tout à l'heure, à la seule musique
de théâtre ou au poème symphonique.

Pour m'en tenir aux programmes de celte année,
je relève, sur ceux des quatre premiers concerts,
cinq premières auditions de trios, quatuors et
quintettes. Les œuvres qu'elles concernent, signées
de noms différents attestent sans doute des ten-
dances très diverses et ne témoignent pas d'un
talent égal. Depuis les essais des débutants en
ce genre si difficile, jusqu'aux réalisations magis-
trales d'un Franck ou d'un Vincent d'Indy, il y a
place pour toutes les demi-réussites, la chose est
entendue. A tout le moins, même dans les compo-
sitions les plus inexpérimentées et les plus impar-
faites, peut-on noter un touchant effort vers un
but artistique et désintéressé; cette préoccupa-
tion d'honnêteté musicale, en un temps do sno-
bisme irritant, d'impuissante présomption et de
réclame outranciére, est bien faite pour éveiller
l'indulgence et commander la sympathie.

Il n'est pas dans mes intentions d'entrer dans le
détail de chacune des œuvres de musique de
chambre exécutées cette année à la Société Na-
tionale. Malgré les divers mérites qui distinguent
le trio de M. Paul Lacombe, le quatuor do M. J.
Dalcroze et le quintette de M. Witkowski, l'ana-
lyse des divers morceaux qui les composent m'en-
traînerait peut-être un peu loin. Mais je tiens à
mettre à part le quatuor de M. Auguste Ghapuis
et celui de M. Vincent d'Indy, celui-ci en raison
de la maîtrise avec laquelle il est traité, le pre-
mier à cause de la nouveauté des moyens d'exé-
cution.

M. Ghapuis, en effet, dans le quatuor de belle
tenue musicale et d'élégante écriture dont il nous
a fait entendre deux fragments, n'adopte pas le
groupement instrumental en usage depuis Haydn
et dont tous les auteurs de quatuors ont tiré
parti. Son œuvre est conçue, non pas pour deux
violons, un alto et un violoncelle, suivant l'an-
cienne tradition, mais pour un seul violon, accom-
pagné d'une viole véritable, d'un violoncellin et
d'un violoncelle ordinaire.

M. Adolphe de Gennes, l'auteur de cette recon-
stitution d'instruments, qu'il appelle « quatuor
normal », parce qu'elle reproduit la disposition
exacte du quatuor vocal, estime que la sonorité
d'ensemble se trouve ainsi parfaitement équili-
brée, tant par suite des dimensions que de l'ac-
cord des instruments, dont les sons les plus graves
sont en rapport de quintes justes séparées par
une quarte : violoncelle, ut-1 ; violoncellin, sol-1:
viole ut-%; violon, sol-%. Lamanière dont M. Gha-
puis a fait entrer dans la pratique musicale l'idée
de M. do Gennes est bien faite pour lui donner de
l'autorité. Mais j'estime que ce quatuor « normal »
gagnerait beaucoup à être traité en quintette,
c'est-à-dire avec adjonction d'un violon supplé-
mentaire. Il y manque, en effet, un peu du timbre
clair de la chanterelle de l'instrument principal
et, pour très fondue et très homogène que soit la
sonorité des trois instruments graves, elle prédo-
mine un peu trop au détriment de la sonorité
aiguë. Le quatuor instrumental est tout autre
chose que le quatuor vocal et, le plus souvent, la
disposition des violons en premier en second,
n'implique pas du tout que le second doive trou-
ver place au-dessous du premier. Le croisement,
surtout dans les œuvres modernes, depuis Beet-
hoven, place le second violon et le premier à dia-

pason égal : c'est en quelque sorte une même
partie dédoublée. L'innovation de M. de Gennes
n'en mérite pas moins une attention sérieuse de
la part des compositeurs. Ils pourront, à l'occa-
sion, en tirer un réel profit.

Le quatuor de M. d'Indy, qui figurait au der-
nier concert de la Société Nationale, est le se-
cond qu'il ait composé. Il se distingue nettement
du premier, tant par la nature des idées que par
la simplicité de la mise en œuvre. Cette simplicité
n'est qu'un raffinement de plus et, d'ailleurs,
reste toute relative. L'effort vers l'originalité et la
préoccupation d'un style très relevé qui se tra-
duisaient, dans plus d'une œuvre antérieure de
M. d'Indy, par une recherche constante, et par-
fois trop visible, de l'imprévu, se dissimule ici
davantage et trouve des solutions plus aisées.
Voilà tout. Mais cette aisance, cette souplesse
qui donnent aujourd'hui l'impression d'une vraie
spontanéité, marquent dans l'évolution du talent
de M. d'Indy un progrès dont il est impossible
de n'être pas frappé. En pleine possession d'une
des maîtrises les plus complètes qu'on puisse
imaginer, M. d'Indy semble désormais vouloir
s'abandonner avec plus de confiance à ses pre-
mières impulsions. Le résultat est bien fait pour
surprendre beaucoup de ceux qui ne voulaient
absolument voir en son œuvre que les fruits
d'une tenace volonté. Rien de plus fluide, de plus
naturellement conçu que le premier morceau de
ce quatuor, rien de plus mélodieusement déve-
loppé que l'adagio, do plus verveux que le finale.
Et si je ne m'étends pas davantage sur les quali-
tés de cette belle composition, c'est qu'une seule
audiiion, déjà assez loin de moi, ne me la rend
pas assez présente pour en pouvoir parler bien en
détail. A première impression, il m'est seulement
apparu que ce quatuor témoignait chez l'auteur
de la prise de possession définitive de sa person-
nalité. C'est assez en dire l'intérêt.

P. D.

REVUE DES REVUES

* Archivio storioo dell' Arte (fasc. VI, nov.-
déc. 1897). —■ Vittore Carpaccio. C'est la pre-
mière partie d'une étude où M. Gustav Ludwig
fixe un chapitre intéressant de la carrière mys-
térieuse de Carpaccio.

La pinacothèque Brera, à Milan, conserve une
Présentation de la Vierge au Temple, et un
Sposalizio.

La galerie Lochis, de Bergame, renferme une
Naissance de la. Vierge.

Le Musée de Vienne possède une Annoncia-
tion et une Mort de la Vierge.

Enfin, on trouve au musée Gorrer, à Venise
même, une Visitation.

Ces six tableaux dispersés sont bien et dûment
de Carpaccio, et il est visible qu'ils firent partie
d'une série, d'un cycle consacré à la vie de la
Vierge. M. Th. von Frimmel (Repertorium fur
Kunstioissenschaft, XI, 320) est le premier qui
l'ait fait remarquer et les critiques italiens qui
ont étudié Carpaccio ne semblent pas s'en être
aperçu. Or, l'histoire de ce cycle est facile à
recomposer, et c'est ce que fait M. Ludwig, d'après
des documents d'archives.
 
Annotationen