DOI Heft:
Nr. 17 (23 Avril)
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.19746#0151
X» 17. — 18H BOREAUX : 83 RUE FAVART '23 Avril
LA
CHRONIQUE DES ARTS
ET DE LA CURIOSITÉ
SUPPLÉMENT A LA GAZETTE DES BEAUX-ARTS
PARAISSANT LE SAMEDI MATIN
Les abonnés à une année entière de la Gazette des Beaux-Arts reçoivent gratuitement
la Chronique des Arts et de la Curiosité.
PARIS ET DÉPARTEMENTS :
Un an.........12 fr. | Six mois........8 fr.
PROPOS DU JOUR
fusTAVE Moreau n'est plus.
L'art vient de perdre un lumi-
neux génie, l'école française un
maître harmonieux et noble.
Épris des enchantements du passé, mais
créateur d'images prestigieuses et de galbes
nouveaux, mystérieux et fécond, tendre et
fort, poète et penseur réfléchi en même
temps que technicien consommé, on mesu-
rera bientôt et d'un coup la portée de sa flère
doctrine et son envergure spirituelle; il a
déjà marqué l'art de son temps de la pro-
fonde empreinte où se reconnaissent les vo-
lontés d'airain et les hauts caractères.
Son étrange et hautaine réserve à l'égard
du siècle lit qu'on l'aimait sans le bien con-
naître et qu'on l'abordait avec une nuance
de crainte. Il semblait se complaire à ré-
péter : Secretum meum mihi. Il n'exposa
que de mauvaise grâce, sauf peut-être en
1878, à l'Exposition universelle, peignit pour
de rares initiés, cacha sa vie avec une obsti-
nation qui aurait paru inexplicable si l'on
n'avait su que, dans le silence, il édifiait le
monument de cette vie, élaborant sa gloire
posthume, accumulant les œuvres où son
rêve orgueilleux s'incarnait. Aujourd'hui,
selon son suprême commandement, la France
va entrer en possession du musée qu'il a
composé; sa demeure privée va s'ouvrir au
public, abri d'une collection inconnue où
deux cents tableaux — labeur énorme — se-
ront la chair de sa chair et la tradition de
son esprit.
L'Académie des Beaux-Arts l'élut tard et
il s'y sentit isolé. Par une bizarre antinomie,
il se pliait volontiers aux hiérarchies offi-
cielles; mais son enseignement à l'École des
Beaux-Arts ne produisit que des fruits hy-
brides, et ce solitaire, qui chaque jour pré-
parait sa mort en se mettant au travail, et
que quelques tableaux entrevus ont rendu,
pour ainsi dire, obscurément célèbre, n'aura
livré qu'en mourant le secret de son art
hermétique à la postérité.
NOUVELLES
*** En exécution de la loi portant de cinq
à sept le nombre des membres du Conseil des
musées, le Journal officiel publie un décret
nommant M. le comte Henri Delaborde,
membre de l'Institut, et M. Georges Berger,
président de la Société des Amis du Louvre,
membres du Conseil des musées nationaux.
sic** Le Journal officiel a publié le décret
aux termes duquel, à dater du 10 avril, le
type des monnaies de billon sera conforme
aux modèles exécutés par le graveur Daniel
Dupuis et déposés à l'administration des Mon-
naies et Médailles.
*** Dans un discours prononcé à Athènes
durant les fêtes du cinquantenaire de l'École
française d'Athènes, M. Homolle, directeur de
l'École, a annoncé qu'un riche banquier grec,
M. Syngros, a décidé de fonder à Delphes un
musée digne des œuvres découvertes dans les
fouilles effectuées par les savants français.
Deux stèles commémoratives portant sur
leurs deux faces un médaillon de M. Iloty ont
été inaugurées, à cette occasion, sur la terrasse
de l'École.
LA
CHRONIQUE DES ARTS
ET DE LA CURIOSITÉ
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PARIS ET DÉPARTEMENTS :
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PROPOS DU JOUR
fusTAVE Moreau n'est plus.
L'art vient de perdre un lumi-
neux génie, l'école française un
maître harmonieux et noble.
Épris des enchantements du passé, mais
créateur d'images prestigieuses et de galbes
nouveaux, mystérieux et fécond, tendre et
fort, poète et penseur réfléchi en même
temps que technicien consommé, on mesu-
rera bientôt et d'un coup la portée de sa flère
doctrine et son envergure spirituelle; il a
déjà marqué l'art de son temps de la pro-
fonde empreinte où se reconnaissent les vo-
lontés d'airain et les hauts caractères.
Son étrange et hautaine réserve à l'égard
du siècle lit qu'on l'aimait sans le bien con-
naître et qu'on l'abordait avec une nuance
de crainte. Il semblait se complaire à ré-
péter : Secretum meum mihi. Il n'exposa
que de mauvaise grâce, sauf peut-être en
1878, à l'Exposition universelle, peignit pour
de rares initiés, cacha sa vie avec une obsti-
nation qui aurait paru inexplicable si l'on
n'avait su que, dans le silence, il édifiait le
monument de cette vie, élaborant sa gloire
posthume, accumulant les œuvres où son
rêve orgueilleux s'incarnait. Aujourd'hui,
selon son suprême commandement, la France
va entrer en possession du musée qu'il a
composé; sa demeure privée va s'ouvrir au
public, abri d'une collection inconnue où
deux cents tableaux — labeur énorme — se-
ront la chair de sa chair et la tradition de
son esprit.
L'Académie des Beaux-Arts l'élut tard et
il s'y sentit isolé. Par une bizarre antinomie,
il se pliait volontiers aux hiérarchies offi-
cielles; mais son enseignement à l'École des
Beaux-Arts ne produisit que des fruits hy-
brides, et ce solitaire, qui chaque jour pré-
parait sa mort en se mettant au travail, et
que quelques tableaux entrevus ont rendu,
pour ainsi dire, obscurément célèbre, n'aura
livré qu'en mourant le secret de son art
hermétique à la postérité.
NOUVELLES
*** En exécution de la loi portant de cinq
à sept le nombre des membres du Conseil des
musées, le Journal officiel publie un décret
nommant M. le comte Henri Delaborde,
membre de l'Institut, et M. Georges Berger,
président de la Société des Amis du Louvre,
membres du Conseil des musées nationaux.
sic** Le Journal officiel a publié le décret
aux termes duquel, à dater du 10 avril, le
type des monnaies de billon sera conforme
aux modèles exécutés par le graveur Daniel
Dupuis et déposés à l'administration des Mon-
naies et Médailles.
*** Dans un discours prononcé à Athènes
durant les fêtes du cinquantenaire de l'École
française d'Athènes, M. Homolle, directeur de
l'École, a annoncé qu'un riche banquier grec,
M. Syngros, a décidé de fonder à Delphes un
musée digne des œuvres découvertes dans les
fouilles effectuées par les savants français.
Deux stèles commémoratives portant sur
leurs deux faces un médaillon de M. Iloty ont
été inaugurées, à cette occasion, sur la terrasse
de l'École.