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La chronique des arts et de la curiosité — 1910

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Nr. 14 (2 Avril)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19767#0117
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ET DE LA CURIOSITE.

10/

CORRESPONDANCE DE BELGIQUE

Le musée de Bruxelles a pu s’enrichir récem-
ment de quelques œuvres nullement indifférentes de
l’école néerlandaise ancienne. La Société des Amis
des Musées a fait preuve, à son profit, d’initiative
et de libéralité. Lors de la vente Fétis, elle a pu
se. faire, adjuger trois morceaux passablement con-
voités et dont, surtout, la valeur documentaire
rendait fort désirable l’entrée dans les collections
nationales.

Il faut d’abord mentionner une production vrai-
ment très curieuse de Lucas de Leyde, si rarement
représenté comme peintre dans les musées.

Le sujet, uue Tentation de saint Antoine, est
traité avec une étonnante sûreté, si. l’on songe
qu’il s’agit de l’œuvre d’un artiste âgé de dix-sept
ans à peine, ce que prouve la date de 1511, accom-
pagnée du monogramme bien connu du maître: Le
pieux solitaire est agenouillé devant le crucifix.
Derrière lui uu cortège de monstres, dont, l’un est
monté sur le pourceau, ,compagnon do saint Antoine,
ayant pendue à l’oreille la clochette de l'ana-
chorète. La tunique blanche, le manteau bleu
de saint Antoine sont enlevés avec aisance et
n’ont rien du faire souvent pénible des Primi-
tifs. On est très frappé de la grande iniluence
exercée sur le jeune peintre de Leyde par Jérôme
Bosch avec lequel, à la rigueur, en l'absence delà
signature, une confusion pourrait s’établir. Bien
conservé, le panneau mesure 70 centimètres de
long sur 66 de liant.

A peine moins intéressante est une granle dé-
trempe de Pierre Breughel le vieux, représentant
L'Adoration des Mages. Peuplée de figures d'hom-
mes et d’animaux, cette œuvre caractéristique d’un
maître très pauvrement représenté dans les col-
lections,à l’exception du musée impérial de Vienne,
porte au nombre de trois les Breughel authenti-
ques de la galerie de l’Etat belge. Bien que
dépourvue de signature, la toile offerte par les
« Amis des Musées » est d’authenticité irrécu-
sable. Tout y révèle le très grand artiste de qui
elle émane et qui utilisa, on le. sait, fréquemment
la détrempe. Scs deux chefs-d’œuvre du musée de
Naples, la Parabole des Aveugles et la Dupli-
cité du Monde, sont l’un et l’autre peints à la
détrompe. Dans l'Adoration des Mages, nous
avons tous les types: chers au peintre, si extra-
ordinairement soucieux de la vérité, que nous
avons naguère étudiés dans la Gazette. Malheu-
reusement, ce remarquable morceau a subi les
outrages du temps.

On est mal renseigné sur la provenance des
peintures de la collection Fétis. Le plus souvent,
c’était de là main à la main, à d’obscurs brocan-
teurs venant le trouver chez lui, que Fétis faisait
ses achats. Pour ce qui est du Breughel, cependant,
il fut acquis en vente publique et à Bruxelles, à la lin
d’une vacation où, en quelque sorte, on l’adjugea
pour l’amour de Dieu et, si nos souvenirs sont
lidôles, pour une cinquantaine de francs. Habent
sua fat a. ! •

Une troisième peinture,également due à la libé-
ralité de la Société des Amis du Musée, mérite
l’attention des' curieux : Apollon et Diane, par
Lucas Granacli le vieux. Haut de 45 centimètres

et large de 31, ce petit ensemble, est delà-meilleure
époque de son auteur et les nus y sont traités avec
une entente remarquable. Bien que de petite di-
mension, Pceuvre est digne d’un musée, et nous en
savons qui avaient fait, en vue de son achat, des
offres toujours déclinées par Fétis.

La collection particulièrement nombreuse des
bois sculptés a été disputée peut-être avec plus
d'acharnement encore que les peintures. En
somme, nous pensons bien que Taucien président
de la Commission du musée, dans sa modestie,
était loin de prévoir l’empressement des amateurs-
à vouloir s’approprier les choses que sa curiosité
avait su réunir dans la modeste demeure qui
abrita sa vieillesse. Sa collection, d’ailleurs, a pro-
duit plus de deux cent mille francs.

*

* *

On sait qu'à la suite de la célébration à Anvers,
en 1877, du troisième centenaire de la naissance
de Rubens, une commission fut formée avec mis-
sion de rassembler tous les éléments d’une histoire
du grand artiste.

Fait curieux à constater, Rubens, à ce'moment
encore, ne jouissait parmi les-amateurs1 que d’une
considération limitée.

Il était de mode de critiquer les imperfections
de sa forme et l’absence d’élévation de son style;!).
Plus de trente ans se sont écoulés depuis lors ; ils
ont été mis à profit. On peut dire qu’en acquérant
une connaissance plus complète de la vie et des
œuvres du maître, l'admiration professée à leur
endroit s’est accrue. Les artisans de cette évolution
ont été nombreux et, certes, la commission insti-
tuée à Anvers n’a pas perdu son temps. Ses repré-
sentants primitifs ont disparu aujourd’hui ; seul,
M. Max Piooscs survit, toujours fidèle à son culte
pour l’illustre chef de l’école d’Anvers.

La commission avait fait paraître un Bulletin,
d’abord rédige en, français, puis en flamand, ce
qui a p mt être, contribué à restreindre quelque
peu sa diffusion. Ce Bulletin, à la rédaction du-
quel concoururent des critiques éminents de tous
les- pays, vient de paraître pour la dernière.fois !
Rédigé parles soins de M. llooses, il.contient la
taille générale de toutes les œuvres de Rubens
mentionnées dans les cinq volumes de la collection.

Source précieuse d’informations pour les érudits,
ce dernier fascicule emporte avec lui la reconnais-
sance de quiconque s’est intéressé au progrès des
études non seulement dans le domaine rnbénien,
mais dans le domaine de l’école flamande en, gé-
néral. Il y a là, en effet, un nombre considérable
d'hommes: et de choses mêlés à l’histoire du
xvn° siècle qu'on ne songerait pas tout d’abord à
y chercher.

Combien il serait désirable de voir se constituer
uu peu partout des commissions ayant pour but de
faire la lumière sur la vie et l’œuvre des grands
artistes encore, mal connus! Et, disons-le pour
finir, fhistoire' de la vie et de l’œuvre de Rubens
contient encore un si grand nombre d’obscurités,,
que quantité de nouvelles révélations peuvent
encore:être attendues du temps.

Henri H yuans.
 
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