ET DE LA CURIOSITÉ
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en peinture, « aussi nauséeux et assommant que
l’adultère en littérature » (art. II, § 3). Un mau-
vais goût impardonnable nous a pourtant valu
quelques morceaux pas trop nauséeux. Ainsi une
Ariane, de Delacroix, un Saint Sébastien, de Corot,
das Baigneurs, de Cézanne. Nus idéalisés, ou du
moins abstraits des contingences de la vie contem-
poraine. Avec Manet, avec Seurat apparaissent nos
semblables dévêtus pour le bain ou simplement
pour la séance de pose. Mais Seurat s'élève jus-
qu’au style, avec sa Baignade, vraie peinture mu-
rale, restée jeune et singulière dans l’histoire de la
peinture moderne. M. Renoir peint des Parisiennes,
mais son génie transporte ces Baigneuses-là au
bienheureux séjour de la fantaisie, où elles retrou-
vent celles de Boucher et de Fragonard. Là veulent
aussi s’ébattre les nymphes de M. Roussel et celles
de M. Denis, tandis que les jeunes femmes que
peignirent MM. Bonnard, Yuillard et Yallotton ne
quittent pas leur logis.
Peintres et Sculpteurs Gascons
(Cercle international des Arts)
Un déterminisme convaincu trouverait peut-être
à relever chez tous ces Gascons des marques d’une
commune origine. Mais Paris les a trop vite appe-
lés pour que ce petit jeu soit aisé. Notez pour-
tant que Mlle Dufau, M1U Bermond et M. Caro
Delvaille sont originaires de la même province d’où
vient aussi M. Rostand. Leurs envois vous les mon-
treront tels que vous les connaissez, et de même
ceux de MM. Laparra, Henri Martin, Firmin
Bouisset. Un ensemble de sculptures de M. Bour-
delle accuse, en même temps que sa souplesse et
que son archaïsme souvent forcé, d'indéniables
qualités de modeleur, surtout dans les chèvres de
Y Art pastoral. M. Marcel Lenoir expose une série
de dessins à la plume remplis de souvenirs mi-
chelangesques, d’intentions lyriques et d’indica-
tions anatomiques un peu trop démonstratives,
mais qui laissent quand même bon espoir en sa
vaillance.
Exposition George Desvallières
(Galerie Druet)
Si M. Desvallières a composé des illustrations
pour Rolla, c’est plutôt à Baudelaire qu'il fait
songer. Il aime le rare. Il le réalise doublement:
par les éléments qu’il réunit, par les fonds et les
accessoires de ses figures, grâce auxquels il com-
bine des harmonies de couleurs subtiles, où le bleu
clair fait valoir le jaune soufre, et par sa techni-
que, qui donne à chaque partie de sa toile une
valeur de matière précieuse. Sa culture intellec-
tuelle, sa manière de transformer la signification
des sujets religieux et son goût pour les scènes
nocturnes de la vie élégante Le rapprochent aussi
du poète.
M. Desvallières, qui montra naguère dans les
peintures qu’il exécuta pour M. Rouché la riche
imagination d’un décorateur épris d’exotisme, est
aussi un portraitiste qui, dès ses débuts, sut ac-
centuer le caractère et serrer la forme en dessina-
teur volontaire. Le portrait de Mlu D..., œuvre
grave et approfondie, est de celles qui font le plus
aimer ce noble artiste.
Exposition R. de Roveredo
(Galerie Malesherbes)
Parmi les élèves de Gustave Moreau, il en est un
qui, mort jeune, n’est pas assez connu. Linaret a
laissé en ses nombreux dessins la marque d’un
artiste épris des maîtres, mais aussi de la nature,
et très savoureux, très réfléchi dans ses moyens
d’expression. On peut croire que M"8 de Roveredo
a été émue par ces dessins, comme l’avait été
M. Kayser. Au moins ses études font-elles parfois
songer à celles de Linaret, surtout les paysages
qui actuellement semblent ses œuvres les mieux
réalisées et s’expliquent mieux que les figures
d’expression, moins soutenues par la réalité.
Exposition Louis Ciiarlot
(Galerie Blot)
M. Chariot a peint de jolis paysages dans le
Morvan, en été, et en hiver sous la neige. lia
froide saison semble refroidir son imagination
idyllique, qui a un charme sérieux et paisible
quand il s’inspire des ombrages verdoyants. Mais
toujours il reste nuancé, disciple modeste de Cé-
zanne — avec les qualités qui font les paysages
éloquents.
J.-F. SCHNERB.
Académie des Beaux-Arts
Séance du 14 mai
Concours de Rome. — Ont été désignés à entrer
en loge pour le concours du prix de Rome (com-
position musicale) à décerner en 1910, et par ordre
de classement : MM. Delmas, Paray, Gallon,
Flament, élèves de M. Charles Lenepveu ; Delvin-
court, élève de M. Widor, et Mignon, élève de
M. Ch. Lenepveu.
Académie des Inscriptions
Séance du 13 mai
Fouilles de Bordeaux. — M. Camille Jullian fait
connaître le dernier résultat des fouilles si inté-
ressantes qui se poursuivent, avec le concours de
l'Académie, dans le cimetière gallo-romain et
chrétien de Saint-Seurin à Bordeaux. Au milieu
des sarcophages chrétiens qui s’y trouvent aciu-
mulés, s’est trouvé un monument carré remontant
aux premiers temps de l’empire romain ; sur les
flancs de ce monument, et encastré sous un arc de
déchai’ge, existe un énorme sarcophage à acrotères
qui est certainement du Ier siècle. Dans le sarco-
phage, à côté du squelette, était couchée une fiole
de verre, de forme allongée, mesurant 45 centi-
mètres de longueur et d’une forme qui est inconnue
jusqu’ici dans les Gaules. Cette fiole contenait des
résidus que M. Courtault, le directeur des fouilles,
a fa't analyser par M. Denigès, directeur du Labo-
ratoire de la Faculté de Médecine de Bordeaux ; le
résultat détaillé de cette analyse sera communiqué
à l’Académie des Sciences. D’après les vestiges
certains de tannin qui y ont été relevés, on est
assuré que la fiole contenait du vin.
M. Clermont-Ganneau observe que cette forme
spéciale de fiole en verre caractérise avec certitude
les verreries de Syrie; il a eu, jadis, l’occasion
d'en rapporter quelques spécimens au musée du
Louvre. On peut donc être assuré que la fiole du
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en peinture, « aussi nauséeux et assommant que
l’adultère en littérature » (art. II, § 3). Un mau-
vais goût impardonnable nous a pourtant valu
quelques morceaux pas trop nauséeux. Ainsi une
Ariane, de Delacroix, un Saint Sébastien, de Corot,
das Baigneurs, de Cézanne. Nus idéalisés, ou du
moins abstraits des contingences de la vie contem-
poraine. Avec Manet, avec Seurat apparaissent nos
semblables dévêtus pour le bain ou simplement
pour la séance de pose. Mais Seurat s'élève jus-
qu’au style, avec sa Baignade, vraie peinture mu-
rale, restée jeune et singulière dans l’histoire de la
peinture moderne. M. Renoir peint des Parisiennes,
mais son génie transporte ces Baigneuses-là au
bienheureux séjour de la fantaisie, où elles retrou-
vent celles de Boucher et de Fragonard. Là veulent
aussi s’ébattre les nymphes de M. Roussel et celles
de M. Denis, tandis que les jeunes femmes que
peignirent MM. Bonnard, Yuillard et Yallotton ne
quittent pas leur logis.
Peintres et Sculpteurs Gascons
(Cercle international des Arts)
Un déterminisme convaincu trouverait peut-être
à relever chez tous ces Gascons des marques d’une
commune origine. Mais Paris les a trop vite appe-
lés pour que ce petit jeu soit aisé. Notez pour-
tant que Mlle Dufau, M1U Bermond et M. Caro
Delvaille sont originaires de la même province d’où
vient aussi M. Rostand. Leurs envois vous les mon-
treront tels que vous les connaissez, et de même
ceux de MM. Laparra, Henri Martin, Firmin
Bouisset. Un ensemble de sculptures de M. Bour-
delle accuse, en même temps que sa souplesse et
que son archaïsme souvent forcé, d'indéniables
qualités de modeleur, surtout dans les chèvres de
Y Art pastoral. M. Marcel Lenoir expose une série
de dessins à la plume remplis de souvenirs mi-
chelangesques, d’intentions lyriques et d’indica-
tions anatomiques un peu trop démonstratives,
mais qui laissent quand même bon espoir en sa
vaillance.
Exposition George Desvallières
(Galerie Druet)
Si M. Desvallières a composé des illustrations
pour Rolla, c’est plutôt à Baudelaire qu'il fait
songer. Il aime le rare. Il le réalise doublement:
par les éléments qu’il réunit, par les fonds et les
accessoires de ses figures, grâce auxquels il com-
bine des harmonies de couleurs subtiles, où le bleu
clair fait valoir le jaune soufre, et par sa techni-
que, qui donne à chaque partie de sa toile une
valeur de matière précieuse. Sa culture intellec-
tuelle, sa manière de transformer la signification
des sujets religieux et son goût pour les scènes
nocturnes de la vie élégante Le rapprochent aussi
du poète.
M. Desvallières, qui montra naguère dans les
peintures qu’il exécuta pour M. Rouché la riche
imagination d’un décorateur épris d’exotisme, est
aussi un portraitiste qui, dès ses débuts, sut ac-
centuer le caractère et serrer la forme en dessina-
teur volontaire. Le portrait de Mlu D..., œuvre
grave et approfondie, est de celles qui font le plus
aimer ce noble artiste.
Exposition R. de Roveredo
(Galerie Malesherbes)
Parmi les élèves de Gustave Moreau, il en est un
qui, mort jeune, n’est pas assez connu. Linaret a
laissé en ses nombreux dessins la marque d’un
artiste épris des maîtres, mais aussi de la nature,
et très savoureux, très réfléchi dans ses moyens
d’expression. On peut croire que M"8 de Roveredo
a été émue par ces dessins, comme l’avait été
M. Kayser. Au moins ses études font-elles parfois
songer à celles de Linaret, surtout les paysages
qui actuellement semblent ses œuvres les mieux
réalisées et s’expliquent mieux que les figures
d’expression, moins soutenues par la réalité.
Exposition Louis Ciiarlot
(Galerie Blot)
M. Chariot a peint de jolis paysages dans le
Morvan, en été, et en hiver sous la neige. lia
froide saison semble refroidir son imagination
idyllique, qui a un charme sérieux et paisible
quand il s’inspire des ombrages verdoyants. Mais
toujours il reste nuancé, disciple modeste de Cé-
zanne — avec les qualités qui font les paysages
éloquents.
J.-F. SCHNERB.
Académie des Beaux-Arts
Séance du 14 mai
Concours de Rome. — Ont été désignés à entrer
en loge pour le concours du prix de Rome (com-
position musicale) à décerner en 1910, et par ordre
de classement : MM. Delmas, Paray, Gallon,
Flament, élèves de M. Charles Lenepveu ; Delvin-
court, élève de M. Widor, et Mignon, élève de
M. Ch. Lenepveu.
Académie des Inscriptions
Séance du 13 mai
Fouilles de Bordeaux. — M. Camille Jullian fait
connaître le dernier résultat des fouilles si inté-
ressantes qui se poursuivent, avec le concours de
l'Académie, dans le cimetière gallo-romain et
chrétien de Saint-Seurin à Bordeaux. Au milieu
des sarcophages chrétiens qui s’y trouvent aciu-
mulés, s’est trouvé un monument carré remontant
aux premiers temps de l’empire romain ; sur les
flancs de ce monument, et encastré sous un arc de
déchai’ge, existe un énorme sarcophage à acrotères
qui est certainement du Ier siècle. Dans le sarco-
phage, à côté du squelette, était couchée une fiole
de verre, de forme allongée, mesurant 45 centi-
mètres de longueur et d’une forme qui est inconnue
jusqu’ici dans les Gaules. Cette fiole contenait des
résidus que M. Courtault, le directeur des fouilles,
a fa't analyser par M. Denigès, directeur du Labo-
ratoire de la Faculté de Médecine de Bordeaux ; le
résultat détaillé de cette analyse sera communiqué
à l’Académie des Sciences. D’après les vestiges
certains de tannin qui y ont été relevés, on est
assuré que la fiole contenait du vin.
M. Clermont-Ganneau observe que cette forme
spéciale de fiole en verre caractérise avec certitude
les verreries de Syrie; il a eu, jadis, l’occasion
d'en rapporter quelques spécimens au musée du
Louvre. On peut donc être assuré que la fiole du