ET DE LA CURIOSITE
207
dans laquelle il résume les idées générales de cet
important ouvrage.
Marcel Reymond.
Illustré d'une jolie eau-forte de M. Laguillermie
représentant une scène de Lysistrata, l'Almanach
des Spectacles de notre confrère Albert Soubies
année 1010, tome 40° de la collection) vient de
paraître à la librairie Flammarion. Ce volume, aussi
abondamment documenté que les précédents, ren-
ferme, entre autres, la liste de toutes les pièces
représentées pour la première fois en France pen-
dant le dernier exercice, et une bibliographie des
nouveaux ouvrages consacrés au théâtre et à la
musique.
-K t ïx--
NECROLOGIE
Nous avons le bien vif regret d'annoncer la mort
de notre collaborateur M. Maurice Maindron,
chevalier de la Légion d'honneur, décédé à Paris
le 19 juillet. Il était né à Paris en 1857. Fils
du statuaire Ernest-Hippolyte Maindron, l'au-
teur de la Velléda du jardin du Luxembourg,
il avait commencé par des études scientifiques et
en 1877 avait été chargé pour le Muséum d'histoire
naturelle d'une première mission qui fut suivie de
plusieurs autres. Il visita ainsi la Nouvelle Guinée
et la Malaisie, l'Indo-Chine, le Sénégal, l'Ethiopie,
l'Arabie, l'Inde. De ces voyages, Maindron ne
rapporta pas seulement des documents précieux
pour les études entomologiques qu'il avait en-
treprises et où il acquit une compétence indis-
cutée ; sa curiosité s'était intéressée également à
l'histoire de ces pays, aux arts, aux armes, aux
costumes, aux mœurs. L'universalité de ses con-
naissances et de ses travaux, toujours d'une do-
cumentation très sûre et d'une réalisation achevée,
faisait de lui une figure à part. En dehors de ses
publications scientifiques, il a donné des rela-
tions de voyage très colorées, où l'histoire et
l'art tiennent une large place, telles que ses deux
Tolumes Dans ïlnde du Sud dont nous avons
rendu compte ici même, et il avait auparavant
publié dans la Bibliothèque de l'Enseignement
des Beaux-Arts, un volume sur VArt Indien, qu'il
connaissait à merveille et dont il collectionnait les
œuvres. Son goût d'archéologue s'était surtout
porté vers l'étude des armes anciennes, où il ac-
quit une érudition pour laquelle on ne lui connais-
sait point de rival ; son livre sur Les Armes, pu-
blié également dans la Bibliothèque de l'Enseigne-
ment des Beaux-A.rts, en 1894, est un manuel de
tous points excellent ; il rêvait de le reprendre
sous une forme plus développée, avec une docu-
mentation iconographique plus riche ; il est mort
malheureusement sans avoir pu réaliser ce projet.
Il avait donné dans notre Gazette des Beaux-Arts
de nombreuses études de détail, toutes excellentes,
sur ce sujet qui le passionnait si fort: Les Collec-
tions d'armes du musée du Louvre (1891-92), La
Collection d'armes du Musée d'Artillerie (L893-
1894), L'Armeria de Madrid (1895) ; puis Une
page sur les arts décoratifs de l'Inde : la céra-
mique et les émaux (1893-99). Il avait également
publié des études du même genre dans d'autres
revues, et la Société de l'Histoire du Costume
l'avait nommé son vice-président. Ce goût des
armes et des anciens costumes et la connais-
sance parfaite qu'il avait de l'époque de la
Renaissance le conduisirent en même temps à
écrire d is romans historiques qui ont contribué
surtout à le faire connaître, et qui se distinguent
par l'originalité de leur conception, leur allure
héroïque, passionnée, pittoresque, leur langue sa-
voureuse et colorée. Autant pour ces robustes
qualités d'artiste, l'homme privé valait par une
fierté, une indépendance et une loyauté de carac-
tère qui le font vivement regretter de tous ceux,
qui l'ont connu.
Le 19 j uillet est mort également, à Ouchy (Suisse),
à la suite d'une courte maladie, un des artistes
les plus personnels de notre école moderne : l'ar-
chitecte René Binet. Il n'avait pas quarante-
quatre ans. Né à Sens, d'un modeste employé de
chemin de fer, il sentit de bonne heure s'éveiller sa
vocation artistique et, venu très jeune cà Paris, il
entra à l'Ecole des Beaux-Arts dans l'atelier de
l'architecte Louvet. Quelques concours lui ayant
fourni l'occasion de se mettre en évidence et de
s'affirmer dans la décoration comme un esprit
très inventif, il n'attendit pas la consécration
du prix de Rome et quitta l'Ecole pour se faire
de haute lutte sa place dans la vie. Il alla étudier
sur place les architectures byzantines et mu-
sulmanes et rapporta de ces voyages des séries
d'aquarelles extrêmement habiles et séduisantes
qu'il exposa. Il signa avec M. Deglane un des
projets envoyés et retenus au concours ouvert
pour le Grand Palais des Champs-Elysées à ériger
pour l'Exposition de 1900. La porte monumentale
de l'Exposition qui lui fut confiée, et diverses instal-
lations à l'Exposition telles que celle de la Laiterie,
mirent pleinement en évidence ses qualités d'inven-
tion originale et lui valurent la grande notoriété.
Dès lors, plusieurs travaux importants lui furent
confiés où il continua de s'affirmer non seulement
comme décorateur ingénieux et pittoresque, mais
même comme architecte doué du sens pratique :
telle l'heureuSB transformation des magasins du
Printemps et les annexes de ceux-ci; la maison de
retraite des comédiens à Pont-aux-Dames. Il a
donné aussi aux Gobelins un modèle de tapis de
Savonnerie, a publié un remarquable ouvrage sur
les motifs décoratifs qu'on peut tirer de la na-
ture, etc. Il était chevalier de la Légion d'horn?ur
depuis 1901 et faisait partie depuis peu du comité
technique et d'esthétique à la préfecture de la Seine.
On annonce également la mort à Paris, cette
semaine, du vicomte Révérend, généalogiste et
héraldiste distingué, auteur notamment de Y Armo-
riai du Premier Empire et de Y Armoriai de la
Restauration.
La semaine dernière est mort en Suisse, à l'âge
de quarante-six ans, M. Philippe Monnier. Filsf
du renommé professeur et conteur Marc Monnier,.
il était lui-même un écrivain fort distingué. Es-
prit délicat et fin, pourvu d'une culture étendue,
Philippe Monnier s'était déjà signalé par deux .
ouvrages de fonds solide et de style brillant, Le
Quattrocento, et ï'enise au xvnr8 siècle, qui a
été loué ici même.
-j.f---
207
dans laquelle il résume les idées générales de cet
important ouvrage.
Marcel Reymond.
Illustré d'une jolie eau-forte de M. Laguillermie
représentant une scène de Lysistrata, l'Almanach
des Spectacles de notre confrère Albert Soubies
année 1010, tome 40° de la collection) vient de
paraître à la librairie Flammarion. Ce volume, aussi
abondamment documenté que les précédents, ren-
ferme, entre autres, la liste de toutes les pièces
représentées pour la première fois en France pen-
dant le dernier exercice, et une bibliographie des
nouveaux ouvrages consacrés au théâtre et à la
musique.
-K t ïx--
NECROLOGIE
Nous avons le bien vif regret d'annoncer la mort
de notre collaborateur M. Maurice Maindron,
chevalier de la Légion d'honneur, décédé à Paris
le 19 juillet. Il était né à Paris en 1857. Fils
du statuaire Ernest-Hippolyte Maindron, l'au-
teur de la Velléda du jardin du Luxembourg,
il avait commencé par des études scientifiques et
en 1877 avait été chargé pour le Muséum d'histoire
naturelle d'une première mission qui fut suivie de
plusieurs autres. Il visita ainsi la Nouvelle Guinée
et la Malaisie, l'Indo-Chine, le Sénégal, l'Ethiopie,
l'Arabie, l'Inde. De ces voyages, Maindron ne
rapporta pas seulement des documents précieux
pour les études entomologiques qu'il avait en-
treprises et où il acquit une compétence indis-
cutée ; sa curiosité s'était intéressée également à
l'histoire de ces pays, aux arts, aux armes, aux
costumes, aux mœurs. L'universalité de ses con-
naissances et de ses travaux, toujours d'une do-
cumentation très sûre et d'une réalisation achevée,
faisait de lui une figure à part. En dehors de ses
publications scientifiques, il a donné des rela-
tions de voyage très colorées, où l'histoire et
l'art tiennent une large place, telles que ses deux
Tolumes Dans ïlnde du Sud dont nous avons
rendu compte ici même, et il avait auparavant
publié dans la Bibliothèque de l'Enseignement
des Beaux-Arts, un volume sur VArt Indien, qu'il
connaissait à merveille et dont il collectionnait les
œuvres. Son goût d'archéologue s'était surtout
porté vers l'étude des armes anciennes, où il ac-
quit une érudition pour laquelle on ne lui connais-
sait point de rival ; son livre sur Les Armes, pu-
blié également dans la Bibliothèque de l'Enseigne-
ment des Beaux-A.rts, en 1894, est un manuel de
tous points excellent ; il rêvait de le reprendre
sous une forme plus développée, avec une docu-
mentation iconographique plus riche ; il est mort
malheureusement sans avoir pu réaliser ce projet.
Il avait donné dans notre Gazette des Beaux-Arts
de nombreuses études de détail, toutes excellentes,
sur ce sujet qui le passionnait si fort: Les Collec-
tions d'armes du musée du Louvre (1891-92), La
Collection d'armes du Musée d'Artillerie (L893-
1894), L'Armeria de Madrid (1895) ; puis Une
page sur les arts décoratifs de l'Inde : la céra-
mique et les émaux (1893-99). Il avait également
publié des études du même genre dans d'autres
revues, et la Société de l'Histoire du Costume
l'avait nommé son vice-président. Ce goût des
armes et des anciens costumes et la connais-
sance parfaite qu'il avait de l'époque de la
Renaissance le conduisirent en même temps à
écrire d is romans historiques qui ont contribué
surtout à le faire connaître, et qui se distinguent
par l'originalité de leur conception, leur allure
héroïque, passionnée, pittoresque, leur langue sa-
voureuse et colorée. Autant pour ces robustes
qualités d'artiste, l'homme privé valait par une
fierté, une indépendance et une loyauté de carac-
tère qui le font vivement regretter de tous ceux,
qui l'ont connu.
Le 19 j uillet est mort également, à Ouchy (Suisse),
à la suite d'une courte maladie, un des artistes
les plus personnels de notre école moderne : l'ar-
chitecte René Binet. Il n'avait pas quarante-
quatre ans. Né à Sens, d'un modeste employé de
chemin de fer, il sentit de bonne heure s'éveiller sa
vocation artistique et, venu très jeune cà Paris, il
entra à l'Ecole des Beaux-Arts dans l'atelier de
l'architecte Louvet. Quelques concours lui ayant
fourni l'occasion de se mettre en évidence et de
s'affirmer dans la décoration comme un esprit
très inventif, il n'attendit pas la consécration
du prix de Rome et quitta l'Ecole pour se faire
de haute lutte sa place dans la vie. Il alla étudier
sur place les architectures byzantines et mu-
sulmanes et rapporta de ces voyages des séries
d'aquarelles extrêmement habiles et séduisantes
qu'il exposa. Il signa avec M. Deglane un des
projets envoyés et retenus au concours ouvert
pour le Grand Palais des Champs-Elysées à ériger
pour l'Exposition de 1900. La porte monumentale
de l'Exposition qui lui fut confiée, et diverses instal-
lations à l'Exposition telles que celle de la Laiterie,
mirent pleinement en évidence ses qualités d'inven-
tion originale et lui valurent la grande notoriété.
Dès lors, plusieurs travaux importants lui furent
confiés où il continua de s'affirmer non seulement
comme décorateur ingénieux et pittoresque, mais
même comme architecte doué du sens pratique :
telle l'heureuSB transformation des magasins du
Printemps et les annexes de ceux-ci; la maison de
retraite des comédiens à Pont-aux-Dames. Il a
donné aussi aux Gobelins un modèle de tapis de
Savonnerie, a publié un remarquable ouvrage sur
les motifs décoratifs qu'on peut tirer de la na-
ture, etc. Il était chevalier de la Légion d'horn?ur
depuis 1901 et faisait partie depuis peu du comité
technique et d'esthétique à la préfecture de la Seine.
On annonce également la mort à Paris, cette
semaine, du vicomte Révérend, généalogiste et
héraldiste distingué, auteur notamment de Y Armo-
riai du Premier Empire et de Y Armoriai de la
Restauration.
La semaine dernière est mort en Suisse, à l'âge
de quarante-six ans, M. Philippe Monnier. Filsf
du renommé professeur et conteur Marc Monnier,.
il était lui-même un écrivain fort distingué. Es-
prit délicat et fin, pourvu d'une culture étendue,
Philippe Monnier s'était déjà signalé par deux .
ouvrages de fonds solide et de style brillant, Le
Quattrocento, et ï'enise au xvnr8 siècle, qui a
été loué ici même.
-j.f---