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Marmora(l), en en publiant un spécimen, l’a expliqué comme un Géryon. C’est
plutôt un Talos , ou plus exactement le Baal-Moloch, avide de victimes humaines,
qui, comme l’a très bien vu Bœttiger (2), a subi cette transformation dans les lé-
gendes grecques (3). Talos était aussi appelé Tauros (4), et en effet le Baal-Moloch,
dont les Hellènes virent l’effroyable culte en pleine activité dans les établissements
phéniciens de la Crète, était un dieu tauromorphe et taurocéphale, qui dans cette
même contrée a aussi donné naissance à la conception du Minotaure. Un scarabée
étrusque, compris dans la collection d’empreintes publiées par l’Institut Archéolo-
gique (5), nous offre une représentation , sûrement imitée d’un modèle phénicien,
qui fournit la transition entre le Minotaure et le Talos triple ou tricéphale ; c’est un
personnage à corps humain surmonté de trois têtes de taureau. Sur une hydrie
peinte à figures noires, du Musée Britannique, le céramiste a figuré, au-dessus de
la lutte d’Hercule contre le lion de Némée, trois hommes ayant une tête et une
queue de taureau (6).
De tout ceci l’on peut conclure, je crois , que les Grecs et les Etrusques ont
emprunté aux Phéniciens le type plastique de leurs représentations de Géryon,
comme le mythe même de son combat avec Héraclès au cycle légendaire du Mel-
qarth tyrien. Mais cet emprunt a été fait sérieusement, en connaissance de cause,
et non par des quiproquos enfantins sur des images mal comprises, comme on l’a
prétendu récemment (7), en échafaudant sur cette donnée toute une théorie nou-
velle de l’origine de la mythologie grecque.
E. de CHANOT.
MONUMENTS D’ARGENT TROUVÉS EN SYRIE
(Planches 23 et 24.)
Grâce à l’obligeance du prince Ladislas Czartoryski, il nous est
permis de publier dans notre recueil quelques monuments d’argent
qui font partie de sa collection. Ces précieux restes de l’art ancien
ont été trouvés en Syrie, il y a une quainzaine d’années.
p Voyage en Sardaigne, p. 271.
(2) Ideen z. Kunslmythologié, t. I, p. 338, 380
et s. ; cf. Hœck, Kreta, t. II, p. 72.
(3) Aussi, à côté du héros Talos, nous trouvons
un Zeus Talaios : Hesych. , s. u.; voy. Hœck,
Kreta, t. III, p. 140.
(4) Apollodor., I, 9, 26.
(5) Cent. III, n“ 26; Bullet. de l'Inst. arch.,
1834, p. 118. Ce scarabée est gravé dans les Nom.
Ann. de l’Inst. arch., t. II, p. 314.
(6) J. de Witte, Catal. étrusque, no 74; Catal.
of vases in lhe British Muséum, n° 449.
(7) Clermont-Ganneau, Mythologie iconogra-
phique (Paris, 1878), p. 8 et s.
Marmora(l), en en publiant un spécimen, l’a expliqué comme un Géryon. C’est
plutôt un Talos , ou plus exactement le Baal-Moloch, avide de victimes humaines,
qui, comme l’a très bien vu Bœttiger (2), a subi cette transformation dans les lé-
gendes grecques (3). Talos était aussi appelé Tauros (4), et en effet le Baal-Moloch,
dont les Hellènes virent l’effroyable culte en pleine activité dans les établissements
phéniciens de la Crète, était un dieu tauromorphe et taurocéphale, qui dans cette
même contrée a aussi donné naissance à la conception du Minotaure. Un scarabée
étrusque, compris dans la collection d’empreintes publiées par l’Institut Archéolo-
gique (5), nous offre une représentation , sûrement imitée d’un modèle phénicien,
qui fournit la transition entre le Minotaure et le Talos triple ou tricéphale ; c’est un
personnage à corps humain surmonté de trois têtes de taureau. Sur une hydrie
peinte à figures noires, du Musée Britannique, le céramiste a figuré, au-dessus de
la lutte d’Hercule contre le lion de Némée, trois hommes ayant une tête et une
queue de taureau (6).
De tout ceci l’on peut conclure, je crois , que les Grecs et les Etrusques ont
emprunté aux Phéniciens le type plastique de leurs représentations de Géryon,
comme le mythe même de son combat avec Héraclès au cycle légendaire du Mel-
qarth tyrien. Mais cet emprunt a été fait sérieusement, en connaissance de cause,
et non par des quiproquos enfantins sur des images mal comprises, comme on l’a
prétendu récemment (7), en échafaudant sur cette donnée toute une théorie nou-
velle de l’origine de la mythologie grecque.
E. de CHANOT.
MONUMENTS D’ARGENT TROUVÉS EN SYRIE
(Planches 23 et 24.)
Grâce à l’obligeance du prince Ladislas Czartoryski, il nous est
permis de publier dans notre recueil quelques monuments d’argent
qui font partie de sa collection. Ces précieux restes de l’art ancien
ont été trouvés en Syrie, il y a une quainzaine d’années.
p Voyage en Sardaigne, p. 271.
(2) Ideen z. Kunslmythologié, t. I, p. 338, 380
et s. ; cf. Hœck, Kreta, t. II, p. 72.
(3) Aussi, à côté du héros Talos, nous trouvons
un Zeus Talaios : Hesych. , s. u.; voy. Hœck,
Kreta, t. III, p. 140.
(4) Apollodor., I, 9, 26.
(5) Cent. III, n“ 26; Bullet. de l'Inst. arch.,
1834, p. 118. Ce scarabée est gravé dans les Nom.
Ann. de l’Inst. arch., t. II, p. 314.
(6) J. de Witte, Catal. étrusque, no 74; Catal.
of vases in lhe British Muséum, n° 449.
(7) Clermont-Ganneau, Mythologie iconogra-
phique (Paris, 1878), p. 8 et s.