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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 31.1885

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Nr. 4
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Lafenestre, Georges: Le Musée de Harlem, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24592#0366

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

de Cornelis et de Grebber, avec moins de gravité dans les physiono-
mies, avec plus de laisser-aller dans les attitudes. Ces douze bons
Hollandais, de santé robuste, d’allure décidée, de mine loyale, n’ont
suspendu qu’un instant, pour le plaisir du peintre, autour de la
table copieusement servie, leurs gestes spontanés de mangeurs solides
et de forts buveurs. Les deux porte-drapeaux, deux jeunes gens
superbes, se tiennent debout : l’un, au fond, la tète nue, près de la
fenêtre ouverte, sa bannière blanche et jaune sur l’épaule; l’autre, à
droite, au coin, la main sur l’épée et portant haut sa tète coiffée d’un
grand feutre à panache enguirlandé d’une chaîne d’or. Comme chez
Cornelis et chez Grebber, c’est donc toujours l’ordre dispersé; l’idée
déconcentration d’effet et d’unité harmonique, qui se marquera bientôt,
n’apparaît, au moins dans l’ordonnance, qu’à l’état crépusculaire. A
bien voir, on trouve même encore, dans l’opacité persistante des
fonds, dans certaines froideurs des ombres, dans l’inégalité indécise
d’une lumière jaunâtre, dans certaines attentions méticuleuses du
coup de brosse, des vestiges nombreux de l’ancienne manière. Mais,
si les acteurs sont les mêmes, quelle différence dans leur jeu! En
passant de Grebber à Hais, l’impression est celle qu’on éprouve en
sortant d’un musée de figures en cire dans la rue ensoleillée où s’agite
la foule vivante. Sous son pinceau déjà libre et hardi, aux touches
nettes et résolues, tous ces visages virils s’animent, tous ces yeux
honnêtes s’allument, toutes ces lèvres joyeuses s’entr’ouvrent, et la
lumière abondante, circulant autour des corps solides, rapproche
subitement, dans un accord retentissant de couleurs brillantes, les
faces rubicondes, les armes polies, les verreries diaphanes, les vaisselles
à reflets, les velours lustrés, les écharpes soyeuses dont les notes
dispersées naguère s’éparpillaient chez ses prédécesseurs en taches
claires et discordantes sur le fond monotone des pourpoints sombres.
Si Hais trahit encore çà et là quelque timidité, d’ailleurs très rela-
tive, dans l’exécution des figures sous lesquelles on sent un dessin
aussi ferme et aussi précis que celui de ses plus illustres contempo-
rains, il est déjà passé maître dans l’art d’animer, en les subor-
donnant, tous les accessoires. Personne désormais ne fripera mieux
que lui une collerette, ne chiffonnera mieux une ceinture, n’assouplira
mieux un gant, ne cisèlera mieux un pommeau d’épée. C’est la vie, la
joie, le naturel, la santé, toutes les qualités foncières de la race qui
rentrent, tout de bon cette fois, dans l’art de la Hollande et qui n’en
sortiront plus. L’année 1616 était vraiment bonne pour la peinture
civique; car Jan van Ravesteyn, au même moment, faisait sa Réunion
 
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