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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 31.1885

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Nr. 5
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Michel, André: Le salon de 1885, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24592#0421

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LE SALON DE 1885.

403

Aussi, tout eu reconnaissant le droit désormais acquis aux artistes
de puiser à pleines mains dans la vie moderne, en souhaitant même
qu’ils l’abordent franchement et en toute liberté parce qu’il semble
qu’ils doivent y trouver plus d’occasions d’impressions spontanées et
jaillissantes, par suite d’œuvres vivantes et émues, — nous réclamons,
au nom de cette même liberté et des intérêts supérieurs de l’art, le
droit de puiser aussi ailleurs, dans la légende, dans l’histoire, dans le
rêve. C’est une grande erreur de croire que la modernité d’une œuvre
d’art consiste uniquement dans la date du sujet. Pour ne citer qu’un
exemple, Gustave Moreau est plus moderne que beaucoup de nos pré-
tendus réalistes, dont certains — il serait facile de le montrer et
nous en aurons peut-être l’occasion •— sont des lyriques inconscients
ou honteux. Les rêves et les visions, les plus chimériques en apparence,
d’un artiste sincère sont au point de vue documentaire plus précieux
que les plus exactes copies. « Mon grand maitre, le défunt Hegel, me
dit un jour ces mots, écrivait Henri Heine dans une de ses Lettres de
Lutèce .' — Si l’on avait noté les songes que les hommes ont faits pen-
dant une période déterminée, nous verrions surgir devant nous, à la
lecture de ces songes recueillis, une image tout à fait juste de l’esprit
de cette période ».

Aussi, dans ces études sur le Salon, nous inquiéterons-nous
surtout de la qualité et de la nuance du talent personnel. Au fond,
au-dessus de toutes les écoles, de tous les systèmes, il n’y a que deux
classes d’artistes; les sincères et les habiles, les croyants et les
farceurs.

« Ne pensez-vous pas, écrivait Georges Elliot au peintre Bûmes
Jones, que de part et d’autre on écrit beaucoup d’inutile verbiage sur
le but de l’art? Un esprit malpropre fera de l’art malpropre, qu’il ait
en vue l’art seul ou autre chose et un esprit médiocre fera de l’art
médiocre. Après quoi, il est certain que l’œuvre produira nécessaire-
ment sur les autres un effet conforme à la noblesse ou à la bassesse
d’àme de l’artiste. »

ANDRÉ MICHEL.

(La suite prochainement.)
 
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