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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 31.1885

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Nr. 5
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Ephrussi, Charles: La "Divine comédie" illustrée par Sandro Botticelli, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24592#0434

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416

GAZETTE DES BEAUX-A11TS.

sorcières de Macbeth. Cependant, dégagé de l’étreinte écrasante des
drames infernaux, transporté dans un monde plus calme, plus appro-
prié à sa tendre nature, Botticelli a reconquis ses qualités ordinaires
et, malgré trop de faiblesses encore d’invention et de composition, son
Purgatoire accuse l’effort d’une imagination plus souple et plus variée.
Le décor même, frais et printanier, ajoute à l’agrément des diverses
scènes ; l’arbre du chant XXIII, chargé de feuilles et de fruits, est d’une
exécution charmante, aussi bien que la faune riante du chant XXXIII,
bornée par le cours circulaire du fleuve de l’Eunoé qui semble séparer
le Purgatoire du Paradis. Pourquoi l’interprétation reste-t-elle,
malgré tout, obscure, parfois indéchiffrable sans le secours du texte
commenté? Pourquoi la scène essentielle de chacun des chants n’est-
elle pas nettement dégagée de manière à dominer les scènes secon-
daires? Le vice capital de ces compositions comme de celles de Y Enfer
est, répétons-le, dans la servile traduction du texte, dans une inter-
prétation vers à vers, émiettée, déchiquetée. On dirait un dessinateur
suivant son auteur pas à pas, le crayon à la main, notant chaque
épisode, sans avoir lu l’ensemble, sans avoir saisi la pensée principale,
ni découvert l’idée génératrice. Qu’arrive-t-il? Les mêmes groupes,
Dante et Virgile, Dante et Mathilde, Dante et Béatrix, reparaissent
fastidieusement sur la même page, ainsi que tous les acteurs des
scènes successives, sans aucune indication de perspective. Dans le
chant XXVIII où Mathilde apparaît cueillant des fleurs, puis expli-
quant à Dante les merveilles de l’Eden, Botticelli montre d’abord
le poète et ses guides pénétrant dans un décor d’arbres parallèles qui
occupe tout le premier plan, puis le second groupe en face de Mathilde
s’enlevant de terre et s’adressant à lui, puis enfin Mathilde encore,
courbée vers la terre et moissonnant des fleurs. Comment s’expliquer
sans recourir au poème la succession de ces épisodes ? L’ordre des scènes
a été interverti. L’unité manque à chacune de ces pages, le commenta
est une sorte de traduction juxtalinéaire, qui a le mérite, sans
doute, de faire connaître le texte par le menu, d’en faciliter la lecture,
mais — et c’est une conséquence inévitable de ce système d’illustra-
tion — qui ne montre aucune indépendance, aucune communion
réelle entre le dessinateur et le poète; le commentaire verbum verbo
a étouffé l’interprétation vivante ; le détail a effacé l’ensemble, la
lettre a tué l’esprit.

(La fin prochainement.)

CHARLES EPHRUSSI.
 
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