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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 31.1885

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Nr. 6
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Michel, André: Le salon de 1885, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24592#0502

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482 GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

discrète fait pénétrer dans l’âme, par les yeux, un délicieux apai-
sement.

Ce coin de paysage intime n’a certes rien d’héroïque et je lui ai
entendu reprocher, par de graves théoriciens, de manquer de carac-
tère. Il n’a pas de grandes prétentions assurément : il est certain aussi
que Bidault l’eût dédaigné et jugé bon à peine pour ses poules; mais
le père Corot s’y fût arrêté longuement et on devine avec quel
plaisir il s’y fût mis à peindre, en fumant sa pipette ! C’est, comme
on dit, fait avec rien; mais ce rien est beaucoup en art : une
facture très simple et que des juges exigeants pourraient même
trouver lâchée par endroits, un charme pénétrant fait de sincé-
rité, de simplicité et de clarté. Dans son humble langage, ce tableau
nous raconte une histoire qui suffit après tout à intéresser les esprits
peu sublimes; ce jour-là, l’air était transparent et tranquille; près
d’un hameau recueilli, un vieux bonhomme, qui pourtant n’a jamais
lu Candide, cultivait son jardin; un artiste passant parla prit plaisir
à le regarder faire, s’assit près de lui pour jouir de la douceur de
l’heure, puis partit en rêvant à l’aménité de l’air et à la paix de la
vie campagnarde.

Le plaisir qu’il éprouva, il a su nous le faire éprouver et c’est
pourquoi, à la fin de nos longues séances dans les salles poudreuses,
nous venons reposer nos yeux fatigués et notre esprit lassé par tant
de grandes machines prétentieuses, de mythologies plates et d’aca-
démies médiocres, devant cet humble potager où un simple villageois
sarcle de simples choux...

VII.

Les critiques des époques heureuses où l'idéal de l’Ecole brillait
paisiblement sur des autels respectés frémiraient d’indignation si les
pages que nous venons d’écrire pouvaient être lues chez les morts.
Leur droite se fût desséchée plutôt qiie de commencer le compte
rendu d’un Salon par un simple paysage —■ et quel paysage! sans
nymphe, sans temple, sans style ! — et par une scène qui mériterait
à peine d’être classée dans le genre historique. Non pas même dans le
genre historique, car l’introduction des costumes modernes fait
tomber un tableau au dernier degré de la hiérarchie esthétique et lui
enlève tout titre à l’attention des esprits sérieux. N’ai-je pas entendu
de mes oreilles un peintre, je crois même un membre du jury,
s’écriant devant le tableau de M, Ulule, avec quel accent de tranchante
 
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