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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 31.1885

DOI issue:
Nr. 6
DOI article:
Michel, André: Le salon de 1885, 2
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.24592#0506

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486

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

et de la robe de la marchande sèment avec discrétion la variété et la
vie. L’observation de tous les morceaux est excellente; le type de
chaque corps de métier est caractérisé avec une profonde justesse, et
à mesure qu’on entre davantage dans cette immense toile, l’œil est
de plus en plus séduit et l’esprit intéressé par la virtuosité de
l’exécution et la sincérité de l’observation. Dans un coin perdu, à
gauche, émergeant d’un fossé, apparaît la tète d’un personnage qui
contemple avec une religieuse attention ce peuple de travailleurs et
ressemble beaucoup au portrait de l’auteur.

A-t-il complètement exprimé tout ce qu’il voulait dire? Nous ne
le pensons pas. En dépit de la justesse des mouvements rigoureu-
sement suivis, de la vérité individuelle de chaque morceau, l’ensemble
paraît figé. Cette impression tient-elle à la dispersion des figures et
des groupes sur l’étendue de cet immense chantier, ou bien à la
manière un peu cotonneuse et monotone dont M. Roll a traité les
accessoires, poutres, pierres, wagonnets et instruments de toute sorte?
Probablement aux deux causes à la fois. Ce double inconvénient
résulte sans doute de la nature même des travaux représentés et de
l’effet de plein air. Mais, il ne faut pas l’oublier, un tableau n’est
pas un rectangle quelconque découpé vaille que vaille dans la réalité ;
toute œuvre d’art est une transposition et une interprétation; pour
surprendre et exprimer la vérité et la vie dans leur intimité, le peintre
doit nécessairement en mettre en évidence quelque caractère essentiel
et c’est justement par le discernement de ce caractère qu’il donne sa
mesure. M. Roll, qui dans ce grand tableau se révèle peintre si
vaillant et si loyal, observateur si sincère et si pénétrant, eût peut-
être mieux fait de restreindre davantage son champ d’observation.
Voilà nos réserves que nous ne pouvions nous défendre de lui
présenter, bien que de bons juges, avec qui nous sommes toujours
troublé de nous trouver en désaccord, n’aient pas partagé sur ce point
notre avis.

Quel nom donner à l’autre tableau de M. Roll? Il l’a appelé tout
simplement Etude, résistant avec raison aux perfides conseils de
ceux qui lui soufflaient Pasiphaé. C’est, dans un coin vague de prairie
où l’herbe folle s’épaissit sous les pas, une femme nue jouant avec un
taureau. Ils arrivent après une course échevelée, l’un poussant
l’autre : la femme se renverse à demi, comme pour arrêter l’animal
dont elle entoure le mufle de son bras gauche replié, tandis que
de l’autre elle caresse le fauve pelage de ses robustes flancs. Sa
tête aux cheveux blonds mêlés de fleurs sauvages se penche sur la
 
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